Publié il y a 1 an - Mise à jour le 25.03.2023 - Boris de la Cruz (avec Abdel Samari) - 5 min  - vu 8971 fois

FAIT DU JOUR L’élu, le promoteur et l’ombre du stade des Costières

Nouveau stade des Costières
© Opalia Immobilier

Jean-Paul Bonicel, le promoteur immobilier et ami du maire, son fils Fabien, mais aussi le patron du Nîmes Olympique, Rani Assaf, sont partenaires en affaire. Un trio d’entrepreneurs ayant pignon sur rue. Un autre acolyte apparaît dans ce méandre de sociétés, celui de l’élu à la Voirie de Nîmes, Richard Flandin.

Elle voit le jour par une radieuse journée d’été, au rond-point des Champs-Élysées à Paris. Cette belle petite fille est porteuse d’un avenir scintillant, les parents jubilent et trinquent à la santé des millions à venir. Ne cherchez pas son poids et sa taille pour vous rendre compte de sa forme le 1er juin 2022, à la date de sa création. Car le cadeau béni n’est pas un enfant. Le nourrisson va grandir et prospérer au fil du temps, des mois et de l’argent injecté. Les heureux parents de ce bébé qui grossit bien vite… Une société appelée SAS Gaudenays, avec comme responsables des noms qui résonnent au pied des Arènes. Ils s’appellent d’un côté Fabien Bonicel, promoteur influent et surtout fils de Jean-Paul Bonicel…

Ce dernier est présenté depuis des décennies comme l’ami du maire de Nîmes. L’autre parent de Gaudenays n’est autre que Rani Assaf, patron du Nîmes Olympique et chef d’entreprise omniprésent. Une SAS Gaudenays qui perçoit le jour de sa création en juin 2022, en guise de bienvenue, 1 million d’euros. De l’argent venu, selon nos renseignements, de deux autres structures commerciales : Petrusse Invest détenue par Rani Assaf qui va verser 501 000 euros en « dépôt de capital » à SAS Gaudenays dont il est le directeur général. Un autre « gros verseur » va faire un transfert de fond pour 499 000 euros par le biais de la SAS JPF, dont le président n’est autre que Jean-Paul Bonicel. De l’argent « viré » par le père pour son fils Fabien, qui est d’ailleurs le président de SAS Gaudenays et dont l’associé n'est autre que Rani Assaf.

Les amis, Rani Assaf et Fabien Bonicel, sont fin prêts pour les affaires dans cette entreprise dont l’objet est l’achat « de biens immobiliers en vue de leur revente, de la promotion immobilière et de l’activité de para-hôtellerie ». D’ailleurs, quelques mois plus tard, en octobre 2022, les mêmes structures vont verser une nouvelle augmentation de capital de près de 1,5 million d’euros en direction de SAS Gaudenays, avec du 50-50 pour les deux copains d’investissements. Si les chiffres se cumulent dans cet article et qu’ils circulent dans une myriade de sociétés satellites, ce n’est pas pour pointer du doigt les liens professionnels de deux hommes qui ont décidé - et c’est bien leur droit - de faire du business ensemble. Non l’objet de cet article est aussi de démontrer les relations parfois troubles entre l’économie et la politique. Des liens qui posent question au sens de l’éthique et de la morale entre des élus influents et des chefs d’entreprise.

Le mariage entre un élu et un promoteur

C’est d’ailleurs La gazette de Nîmes qui a révélé un mariage pour le moins intriguant entre le patriarche du clan Bonicel, Jean Paul, et un élu de premier plan, l’adjoint à la Voirie, Richard Flandin. L’édile nîmois est associé dans une SCI avec Jean-Paul Bonicel. Une SCI baptisée Flanbo, pour le "Flan" de Flandin et le "bo" de Bonicel. Deux « associés » qui ont acheté une maison près de Gérone en Espagne en 2019. Mais, selon nos confrères, alors que Jean-Paul Bonicel avait 90 % des parts, il les a vendues deux ans plus tard pour la modique somme de 630 euros... L’élu serait ainsi devenu « le seul propriétaire » de l’habitation espagnole. Flandin aurait ainsi réalisé une belle opération immobilière.

Richard Flandin
Richard Flandin, élu de la ville de Nîmes en charge des travaux • Photo : Nicolas Dhombres

Contacté mardi 21 mars par nos soins, l'élu Richard Flandin indique : "J'ai travaillé pour son père. Maintenant il s'est arrêté. J'avais des problèmes personnels. Et nous avons monté une SCI ensemble pour acheter une maison il y a quatre ans. Là, c'est une affaire personnelle. La loi ne m'interdit pas d'acheter une maison avec qui que ce soit."

Un élu concerné ? 

Richard Flandin est actuellement adjoint délégué à la mairie de Nîmes en charge des Aménagements urbains, à la voirie, à l’éclairage public et au plan lumière. Il est aussi président du conseil de quartier Costières. Il a aussi été, dans le précédent mandat de l’équipe Fournier, le puissant patron de la SPL Agate... Cette société de droits privés à capitaux publics a été fondée en 2012 et elle est chargée d’accompagner les communes de Nîmes métropole dans des opérations d’exploitation, d’aménagement, ou de nouvelles constructions industrielles ou commerciales d’intérêt général. Par exemple, elle peut piloter et financer la création d’une nouvelle zone d’activité. Aujourd’hui, et depuis 2020, c’est un autre élu qui la dirige, l’actuel premier adjoint Julien Plantier.

Richard Flandin a, en outre, et il ne s’en est pas caché récemment sur le plateau du Club Objectif Gard, une activité de lobbying auprès des collectivités territoriales. De plus, il est directeur général d’une autre société de promotion immobilière de logement enregistrée à Mauguio et fondée récemment en 2023. Une société dont la présidente est son actuelle compagne, salariée de la SPL Agate.

L’ombre du stade des Costières

Il faut noter également que le 6 juillet 2019, en tant qu’adjoint à la mairie de Nîmes et au moment de la vente du stade des Costières dans une procédure de gré-a-gré à Rani Assaf, l’élu Richard Flandin a participé à la délibération concernant "le principe de désafectation, de déclassement et de cession du stade des Costières" au profit du président du Nîmes Olympique. Un président, rappelons-le, en affaire avec le fils Bonicel. Ce dernier, Fabien Bonicel, qui détient des parts dans la société SAS Nemau, dirigée par Rani Assaf, une structure en charge du projet de la construction du nouveau stade des Costières et de son quartier. Fabien Bonicel, dans le cadre d’une énième société « SAS 4B », a déposé quelques mois plus tard, un capital dans la société Nemau. Le père, Jean-Paul Bonicel, étant lui en « affaire » avec l’élu de la ville de Nîmes.

Concernant les liens avec les affaires du fils, Fabien Bonicel, Richard Flandin assure toujours lors de notre entretien avec lui mardi dernier : "Je n'ai aucun rapport et je n'ai jamais aidé Fabien Bonicel pour ses affaires. J'étais président de la SAT. Ce n'est pas le président qui choisi les promoteurs, c'est le maire de la commune concernée. Pour moi, il n'y a pas d'affaire." Pour lui...

Le maire de Nîmes intervient

Un drôle de mélange qui fait mauvais genre. D’ailleurs, Jean-Paul Fournier a décidé d’intervenir hier, vendredi, par le biais d’un communiqué de presse : « J’ai pris connaissance de faits relatifs à une opération immobilière réalisée par Richard Flandin qui, bien que relevant de sa vie privée, sont de nature à engager sa responsabilité morale d’élu et à mettre en cause son intégrité, indique le maire de Nîmes avant d’ajouter, J’ai demandé au directeur général des services de m’apporter dans les plus brefs délais les éléments relatifs à nos procédures internes et à nos contrôles déontologiques, et de saisir le référent déontologue de la collectivité de cette situation. Dans l’attente de ces éléments et de l’entretien que j’aurai avec lui, j’ai aussi demandé à Richard Flandin de se mettre en retrait de son action municipale. »

Difficile donc avec tous ses éléments compilés et complexes à cause de myriades de sociétés qui interviennent, d’imaginer que la situation reste figée dans les prochains jours.

Une chose est sûre, le si beau bébé est devenu bien pâlichon ces temps-ci...

Boris de la Cruz (avec Abdel Samari)

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