SCANDALES DE L'ÉTÉ Pradille, l'affaire qui colle aux basques d'Habitat du Gard
Vingt ans après sa condamnation pour corruption, Claude Pradille hante toujours Habitat du Gard. La justice mène actuellement une enquête pour déterminer si l'ancien président PS du bailleur social a organisé son insolvabilité pour se soustraire à son amende de 1,5 millions d'euros.
"En 1995, quand éclate l’affaire Pradille, j’étais à la fac", répète, un brin agacé, le directeur général de l'Office, Stéphane Cabrié. Celui qui s'efforce "de changer l'image d'Habitat du Gard" se retrouve héritier d'une triste affaire, où corruption rime avec subordination de témoins et détournements de fonds.
L'histoire se déroule dans les années 90s. Depuis onze ans, Claude Pradille, sénateur-maire de Sauve, est à la tête de l'Office public HLM du Gard. Aux cotés de Gilbert Baumet, président du conseil général, il règne en maître sur le Département. Mais le politique chevronné est loin de se douter que le 29 mars 1994, scellera la fin, tonitruante, de sa carrière politique.
Système de corruption tentaculaire
Sa chute débute avec l'arrivée de la CRC (Chambre régionale des comptes) qui entend passer au peigne fin les comptes de la structure. Le 29 mars, il ressortira des expertises des magistrats un rapport accablant sur le système de corruption mis en place par Claude Pradille.
Parmi les "exploits" du socialiste, une explosion des effectifs de l'Office Public HLM : 281 en 1986 (soit trois ans avant l'arrivée du socialiste) contre 398 en 1993. "Ces emplois servaient surtout à s'occuper de ses activités de sénateur à sa permanence Rue Cart. Employés à l'Office, ils étaient devenus ses chauffeurs, secrétaires ou attachés parlementaires", se rappelle l'une de nos sources. Claude Pradille, s'est également illustré dans les marchés publics bidons, en offrant, par exemple, à son beau-frère, toute une cargaison de matériel informatique, destinée sur le papier, à l'Office.
Quatre ans de prison ferme et 1,5 millions d'euros d'amende
Le 5 janvier 1995, Claude Pradille est mis en examen pour abus de confiance et corruption. Comme le rappelle La Gazette, son immunité parlementaire lui est retirée, fait rarissime à l'époque. Avec plusieurs autres de ses comparses, il est incarcéré, jugé et condamné en mai 1995 pour abus de confiance, corruption passive et recel de biens. Claude Pradille qui soutiendra mordicus devant les juges : "J'ai toujours honoré les intérêts du service public, en toute honnêteté", décide de faire appel de cette décision. Le 12 décembre 2006, le socialiste est définitivement condamné à quatre ans de prison, cinq ans d’interdiction d’exercer une fonction publique et 1,5 millions d’euros de dommages et intérêts à Habitat du Gard.
Mais l'histoire ne s'arrête pas là. Trois mois après le jugement, le conseil d’administration d'Habitat du Gard décide de suspendre l'émission du titre de recette relatif aux condamnations. La raison ? Claude Pradille joue le tout pour le tout en se pourvoyant en cassation. "Au départ, nous avons voulu régler les choses à l'amiable. Mon avocat m'a conseillé d'attendre la fin des procédures judiciaires", se défend le président d'Habitat du Gard, Denis Bouad.
Toutefois, dans un nouveau rapport, la CRC est perplexe sur la réelle volonté de la structure de récupérer ses billes : "le pourvoi en cassation n’emportait nullement suspension de l’exécution de l’arrêt d’appel, ce que l’office ne pouvait ignorer". Plus encore : "après même que la Cour de cassation (2007) ait confirmé les droits à indemnisation, nul titre n’a été émis à l’encontre du débiteur durant trois ans et demi et ce, malgré les observations de la MIILOS et les rappels des autorités de l’Etat".
Et maintenant ?
Habitat du Gard a-t-il fait preuve de complaisance à l'égard de leur ancien camarade Claude Pradille ? "Pas du tout", répond Denis Bouad, "dans un même temps, j'ai changé de directeur général. Habitat du Gard a changé de statut en devenant un office public et un projet de renouvellement urbain a été mis en route. L'affaire Pradille n'était pas notre première préoccupation".
En 2013, l'Office public HLM se décide à porter plainte contre Claude Pradille pour savoir si le condamné a organisé son insolvabilité. De nouveau entre les mains de la justice, le SRPJ de Montpellier, sous l'autorité du parquet, a auditionné Denis Bouad ainsi que Claude Pradille. Une saisie des biens de Claude Pradille, a titre conservatoire, a également été effectuée. Le socialiste de nouveau devant les tribunaux ? Voilà une scène qui pourrait se jouer plus vite que prévue.
Coralie Mollaret
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