Publié il y a 6 ans - Mise à jour le 21.02.2018 - coralie-mollaret - 4 min  - vu 1012 fois

FAIT DU JOUR La députée Chapelier confrontée aux réalités de l’immigration

Le gouvernement présente demain son projet de loi asile et immigration. La députée En Marche de la 4e circonscription a visité le centre de rétention administrative de Nîmes où sont retenus les étrangers en situation irrégulière.
Ouvert en 2007, le centre de Nîmes dispose aujourd'hui d'une soixantaine de places. Il est d'une capacité totale de 128 chambres, celles du rez-de-chaussée ne sont plus utilisées, ayant besoin de travaux (Photo : Coralie Mollaret)

Annie Chapelier est pragmatique. Élue pour la première fois sous les couleurs d’En Marche ! aux législatives, l’Alésienne n’est pas imprégnée d'idéologie politique. Son expérience et sa sensibilité en bandoulière, l’infirmière de métier examine les problématiques pour établir son diagnostic.

Hier matin, la députée a visité le CRA (Centre de rétention administrative) de Nîmes. Une immersion avant la présentation, ce mercredi en conseil des ministres, du projet de loi asile et immigration. Un enjeu auquel notre société fait face : « l’immigration ne cessera pas, en raison des difficultés économiques mais aussi du changement climatique qui pousse les populations à se déplacer », relève la parlementaire.

La chambre type d'un retenu du centre de rétention. Ces migrants ont l'autorisation d'avoir un téléphone portable (sans appareil photo). "Le mobilier est vissé au sol afin d'éviter les dégâts matériels. Un cadre sécurisant", justifient les responsables du centre. (Photo : Coralie Mollaret)

Le nouveau profil des retenus 

Créé en 2007, l’établissement nîmois est un petit centre d’une soixantaine de places. Arrêtés après un contrôle d’identité, les étrangers en situation irrégulière y sont enfermés, sur décision du préfet. Deux jours après leur placement, un juge des libertés peut allonger le délai de leur rétention à 45 jours maximum.

Depuis le Printemps arabe (*), le profil des retenus a changé : « ce sont des jeunes et plus trop des ouvriers agricoles », remarque l’un des policiers. « La plupart sont originaires du Maghreb mais certains arrivent aussi d’Afrique équatoriale », ajoute le fonctionnaire. Leur comportement aussi a évolué : « ils sont plus revendicatifs, virulents et parfois même violents », témoigne l’un des agents, justifiant les bancs fixés au sol et les néons protégés par des grilles.

« Cette attitude témoigne de leur parcours de vie difficile. De plus en plus de retenus présentent des problèmes psychologiques, des syndromes post-traumatiques. Des pathologies parfois exacerbées par la prise de stupéfiants ou d’autres substances, comme la benzodiazepine », confie le médecin du centre qui demande l’embauche d’un psychologue.

À l'intérieur du CRA, on retrouve un service médical, l'Office français de l'immigration et de l'intégration et une assistance juridique (Photo : Coralie Mollaret)

L’espoir d’un avenir meilleur

Le CRA de Nîmes regroupe des migrants arrêtés aussi bien à Paris qu’à Clermont-Ferrand. C’est le cas de Frédéric, un Camerounais qui prétend n'avoir que 19 ans. Joueur de football, le jeune homme dit avoir quitté son pays « à cause des conflits entre les Camerounais francophones et anglophones dans la région de Bouya. » Sa mère décédée et son petit frère à l'orphelinat, Frédéric a traversé le Cameroun, le  Nigeria, le Niger, le Bénin, l’Algérie et la Libye avant d’arriver en Italie. Un long périple, guidé par l’espoir d’un avenir meilleur.

Pour l’heure, le migrant n’a pas tenté de demande d’asile. « Lorsque c’est une petite région et pas un pays entier qui est en conflit, les demandes sont rarement acceptées », explique l’association France Réfugiés qui s’occupe des migrants au CRA.

De l’immigration à l’errance

Sans papier, Frédéric pourra être libéré après sa rétention. Pour pouvoir le reconduire à la frontière, la France doit s’assurer de l’identité de l’étranger en situation irrégulière et obtenir un laissez-passer du pays d’origine. Un enjeu qui relèvent souvent de la coopération entre la France et les pays d’où sont issus les migrants.

Sans ce laissez-passer, l'étranger est libéré, la durée de rétention ne pouvant pas excéder 45 jours. Une libération dans l’attente d’une potentielle nouvelle arrestation. L’année dernière à Nîmes, 285 sur les 924 étrangers enfermés ont été expulsés.

Coralie Mollaret

coralie.mollaret@objectifgard.com

*Le « Printemps arabe » est un ensemble de contestations populaires, d'ampleur et d'intensité très variable, qui se produisent dans de nombreux pays du monde arabe à partir de décembre 2010

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Centre de rétention et prison : quelle différence ? Le placement en rétention des étrangers en situation irrégulière se fait sur décision administrative. Ce n’est qu’au bout de 48h de rétention qu’un juge des libertés et de la détention se prononce sur le sort des migrants. S’ils sont enfermés, les conditions sont moins strictes que celles des établissements pénitentiaires. Pour un pensionnaires de centre de rétention, on n'évoquera pas un détenu mais un retenu. Concernant les personnes qui y sont "accueillies" on ne dira pas non plus qu'elles sont en détention mais rétention. Des subtilités linguistiques pour distinguer les deux établissements fermés.

La procédure. Arrêté, le contrôle d’identité d’un étranger ne peut excéder les 16 heures. S'il est en situation irrégulière, il peut être placé en rétention au CRA par le préfet. Après 48 heures de rétention, un juge des libertés et de la détention se prononce sur sa situation. La durée maximale de rétention ne peut excéder 45 jours.

Le tournant marseillais. Depuis les attentats de Marseille, l’administration a durci les placements en rétention : « si certains pouvaient avant ça être assignés à résidence, tous les étrangers en situation irrégulière sont désormais arrêtés puis placés dans un centre de rétention », confie un policier.

Nouvelle loi pour les « dublinés. » L’Assemblée nationale a adopté, jeudi dernier, une proposition de loi visant à faciliter le placement en rétention des migrants relevant du règlement de Dublin. Pour rappel celui-ci prévoit de confier le traitement d’une demande d’asile au premier pays où le migrant a été enregistré.

Assistance juridique. Depuis 2014, l'assistance juridique est assuré par l'association Forum réfugiés qui a été retenue dans le cadre d'un marché public. Elle était auparavant assuré par la Cimade.

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