Publié il y a 7 ans - Mise à jour le 08.10.2022 - anthony-maurin - 3 min  - vu 1251 fois

GARD Le duc Henri II de Montmorency, le fils perdu de la Patrie

A huis clos et dans l'Hôtel de Ville de Toulouse, l'exécution en 1632 du duc de Montmorency a fait couler beaucoup d'encre...

Non, le duc n'est pas Gardois mais une partie de sa baronnie était constituée de notre département. En effet, les terres allant de Bagnols-sur-Cèze à Laudun en passant par Saint-Etienne-des-Sorts, Mornas ou Saint-Médier appartenaient à cet illustre français.

La famille est connue, très connue. A l'époque, nous sommes au début du 16ème siècle, elle est même la première famille de France, la famille la plus puissante du royaume dont sont issues de nombreuses célébrités étatiques! On compte parmi les aïeux du duc Henri II de Montmorency des maréchaux, des connétables, des grands maîtres de France ou plus simplement des gouverneurs de différentes provinces... C'est la famille du premier chrétien et du premier baron, rien que ça!

En 1585, 10 ans avant que naisse le duc qui nous intéresse, sa famille rachète une grande partie du Gard Rhodanien et vient y séjourner assez souvent. Le roi Charles IX et sa maman pas comme les autres, une certaine Catherine de Médicis, y viennent en visite alors qu'ils traversent le Languedoc. Pour dire à quel point la Maison Montmorency est importante, quand le futur duc naîtra en 1595, le roi Henri IV sera son parrain sera prêt à lui donner en épousailles sa fille naturelle. Par héritage, le duc Henri II de Montmorency devient naturellement gouverneur du Languedoc mais c'est à l'âge de 17 ans que le roi Louis XIII, fils d'Henri IV, le nomme Amiral de France.

Cette décision, quoique surprenante, est pourtant d'une logique éclatante. Le duc de Montmorency laisse dans son sillage les plus magistrales éloges. Adoré et adulé de tout le peuple ainsi que des nobles, il est probablement la personnalité la plus aimée du royaume (après le roi). Mais un amiral bien en vue n'est pas une excellente chose pour notre cher cardinal Richelieu qui prépare en douce une grande réforme, entamée de fort belle manière par l'amiral.

Gravure faite en 1654 par Pierre Daret (Photo Norbert Pousseur). • Norbert Pousseur

Perdant son titre d'amiral mais continuant son bonhomme de chemin, les années passent et la légende du duc se forge, les animosités aussi. Henri II de Montmorency est généreux, attachant, courageux, intègre et quand il s'agit de prendre les armes en Italie ou en Espagne, sa témérité n'a d'égale que le bâton de Maréchal qu'il recevra en échange d'une belle série de victoires. Le roi, quand il lui donnera le bâton et les fonctions qui vont avec, lui lâchera ces quelques mots... "Acceptez-le, mon cousin, vous l'honorez plus qu'il ne vous honore", la classe quand même! Nous sommes en novembre 1630 et il ne reste que 2 ans à vivre pour le duc. Et pas les meilleures années!

Car, à l'image de sa famille, les guerres de religions lui feront mal, très mal. Dans la foulée, il entre en conflit avec le roi de France qui défend les protestants. Unique allié de Gaston d'Orléans (frère mutin de Louis XIII), le duc se fourvoie et se trompe de cheval... C'en est fini pour lui et pour sa splendeur d'antan. Dans un ultime élan suicidaire sur le champ de bataille du côté de Castelnaudary, il se fait capturer par les hommes du roi.

Portrait d'Henri II de Montmorency que l'on peut voir au musée du Louvre.

La suite de l'histoire est moins glorieuse. Jugé et condamné à mort pour crime de lèse-majesté, le rebelle demeure fier et courageux durant son procès. Contraint de rendre son bâton de Maréchal et ses titres, Henri II de Montmorency est décapité à huis clos, dans la cour intérieure de l’hôtel de ville de Toulouse. Pas de grâce royale venant de Louis XIII... Les ultimes mots du condamné à mort seront adressés au bourreau: "Frappe hardiment". Mais comme l'exécution se déroule à huis clos, les histoires et scénarios rocambolesques se multiplient. Sabre recourbé en acier damassé ou machine improbable à tuer, on évoque même les prémices de la guillotine (qui serait tombée à plusieurs reprises...)! Quand la foule entre pour voir la dépouille, elle pleure et quelques fanatiques boivent le sang du défunt tant le personnage était apprécié.

Tous les biens du duc lui seront confisqués et iront à la maison de Guise qui devient par conséquent la famille la plus importante de France pour quelques décennies. De son côté, le cardinal Richelieu, dont chaque coup était mesuré, reçoit après la mort du duc ses oeuvres dont Les Esclaves, d'un certain Michel-Ange!

Avec Henri II s’éteint la branche aînée des Montmorency. "Cette mise à mort d'un duc et pair, issu d'une des plus illustres familles de la noblesse, frappa l'opinion et imposa l'image d'une raison d’État terrible, et implacable". Pendant quelques années, le royaume et la noblesse, terrorisés, se tiennent tranquilles.

Anthony Maurin

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