Publié il y a 5 ans - Mise à jour le 22.02.2019 - anthony-maurin - 7 min  - vu 849 fois

FAIT DU JOUR Un permis de conduire ubérisé ou repensé ?

La loi mobilités va être présentée au Sénat. Françoise Dumas, députée gardoise LREM a présenté ses propositions concernant le permis de conduire au Premier ministre la semaine dernière.
(Photo Anthony Maurin).

(Photo Anthony Maurin).

Le passage du permis de conduire est bien souvent un moment charnière dans la vie des Français. Avec le bac, il est devenu le rite de passage dans l'univers des adultes mobiles. Sans lui moins de possibilités de transport, moins de réactivité professionnelle. La loi mobilités va-t-elle " ubériser " le permis de conduire ?

Onéreux quand on débute dans la vie active, hors de prix quand on est encore étudiant, le permis de conduire est pourtant signifiant dans un monde où la mobilité règne et a l'avenir devant elle. Car les Français devront être toujours plus mobiles et ils devront prendre plus souvent leur véhicule pour aller au travail quand ils seront éloignés des villes. Mais les Français auront probablement toujours du mal à se faire aux réformes. Les Gardois aussi, réboussiers que nous sommes !

(Photo Anthony Maurin).

Pourtant, la réforme en question est portée par une gardoise, la députée LREM Françoise Dumas. " Là n'est pas la question ! Qu'elle soit Gardoise n'apporte rien au Gard. Il n'y a qu'à regarder les chiffres des morts sur les routes du département..., lâche Samuel, un étudiant nîmois. J'imagine qu'on va payer moins cher, qu'on sera moins bien formé et que les accidents repartiront à la hausse. Et là, je prends le Gard en exemple. L'insécurité routière y est catastrophique. Je suis natif d'Alsace et je peux vous dire qu'ici, on part de loin, avec ou sans réforme ! "

Remis au Premier ministre, son rapport " vers un permis de conduire plus accessible et une éducation routière renforcée " n'est pas forcément apprécié de tout le monde mais le gouvernement semble en apprécier quelques idées. L’intégration du permis de conduire au Service national universel, le développement de nouveaux modes d’apprentissage, tels que le simulateur, la possibilité de pouvoir comparer de façon plus transparente les tarifs et les taux de réussite, l’expérimentation de la possibilité donnée aux candidats de s’inscrire à l’épreuve pratique directement en ligne ou encore l’augmentation du nombre de créneaux d’examen.

Vers une ubérisation de la formation ?

Pour la réduction du coût, tout le monde semble être en accord sous condition mais en tout ce sont 23 propositions qui sont actuellement à l'étude. " C'est un peu facile... Macron va baisser drastiquement les prix parce qu'il ne veut plus d'humains pour enseigner, affirme un gérant d'auto-école. Ça coûte cher mais c'est nécessaire. Les machines ne feront pas tout et des élèves vont devenir de vraies bombes humaines. Ça ne sera plus un permis de conduire mais un permis de tuer si ça continue ! "  Car les simulateurs de conduites font peur aux professionnels. Les écoles de conduite en ligne aussi.

Pour une autre professionnelle nîmoise relate, " je sais que les nouvelles technologies sont peut-être au point mais on ne peut pas confier des gamins à des écrans sans les mettre dans les meilleures dispositions avant qu'ils ne prennent la route. Les voitures sont de plus en plus sécurisées mais les piétons de plus en plus vulnérables. Des problèmes se poseront aussi sur les réflexes à adopter en cas de secousses violentes, de peur panique, de stress non détectable dans une salle... "

Plus d'1,5 millions de Français ont passé le permis l'an passé. Avoir le permis à 17 ans sous certaines conditions, le passer gratuitement sous les couleurs tricolores ou y voir plus clair dans la tarification plait aux jeunes, moins aux autres.

" J'ai un peu peur. Je ne sais pas si mes enfants le voudront mais 17 ans, c'est jeune quand même. Par contre, actuellement on n'a pas le droit à l'erreur sous peine d'attente et de prix exorbitants alors je me dis que ça vaut peut-être le coup ", lance une maman qui sera peut-être bientôt concernée par la question.

C'est au terme du grand débat national que l'on connaîtra le sort de ce rapport. À présent, les lobbies se mettent en place. Matignon souhaite que le débat s'élargisse sur la base du rapport de la députée Françoise Dumas. Outre les cinq propositions qui séduisent d'emblée l'exécutif, pour l'heure, tout est possible. Si vous voulez faire entendre votre voix, vous le pouvez.

(Photo Anthony Maurin).

Les 23 propositions :

N° 1 : supprimer l’obligation, pour obtenir un premier permis de conduire avant 21 ans, de détenir une attestation de sécurité routière (ASR) pour les jeunes déscolarisés ou non scolarisés en France, pendant la période d’enseignement secondaire, afin de ne pas créer une contrainte supplémentaire pour l’accès au permis de conduire.

N° 2 : enrichir le contenu pédagogique de l’ASSR 2 et mettre en place un accompagnement des apprentissages des règles de circulation, en sécurité, sur l’espace public. Expertiser l’inscription de l’ASSR2 au programme de la classe de 4e afin de garantir que tous les jeunes de 14 ans aient bénéficié de cet enseignement

N° 3 : renforcer le continuum éducatif tout au long de la scolarité en développant les contenus, en ouvrant la formation des élèves aux professionnels de la conduite et en tenant compte des nouvelles mobilités pour permettre aux élèves d’avoir une connaissance approfondie du code des mobilités.

N° 4 : favoriser les expérimentations pour adapter les messages de prévention aux territoires, notamment dans les DROM-COM.

N° 5 : prévoir un temps collectif d’échange pour l’apprentissage du code de la route et donner la possibilité à tous les jeunes de présenter l’épreuve théorique générale lors de la phase obligatoire du Service national universel.

N° 6 : donner la possibilité à tous les jeunes accomplissant le Service national universel volontaire de longue durée, la réserve nationale et le service civique de passer l’épreuve pratique du permis de conduire, pendant cette période, à titre gratuit.

N° 7 : revoir l’épreuve théorique générale et y introduire des épreuves concernant le code de la route, notamment la maîtrise de la signalisation en utilisant les outils d’analyse de données et les retours des plateformes internet. Clarifier et simplifier les questions afin de favoriser l’accessibilité de cet examen.

N° 8 : développer un vivier d’accompagnateurs pour encadrer les conduites accompagnées et supervisées afin que chaque candidat puisse bénéficier de ces dispositifs.

N° 9 : expertiser l’abaissement à 17 ans de la limite d’âge pour la délivrance d’un permis B, valable uniquement sur le territoire national. Cette faculté serait ouverte aux élèves en conduite accompagnée qui ont satisfait les obligations minimales (3 000 kilomètres, rendez–vous pédagogiques) et réussi l’épreuve pratique du permis de conduire. À 18 ans, le jeune disposerait d’un permis de conduire de droit commun.

N° 10 : L’article R. 213-1 du code de la route prévoit que : « Les agréments visés à l’article L. 213-1 sont délivrés pour une durée de cinq ans par le préfet du lieu d’implantation de l’établissement ». La mission propose de le compléter par les mots « Cet agrément a une portée nationale ».

N° 11 : compléter le livret d’apprentissage par la précision de l’identité du moniteur et le numéro de son autorisation d’exercer ou de l’accompagnateur bénévole et de son numéro de permis de conduire et rendre la présentation de ce livret obligatoire lors de l’épreuve pratique.

N° 12 : examiner une baisse de la taxe sur la valeur ajoutée pour les prestations relatives au permis de conduire dès lors que la directive en projet proposée par la Commission européenne sera adoptée.

N° 13 : définir et diffuser un contrat type (proposé par la DGCCRF) afin de garantir au candidat la transparence dans son parcours d’apprentissage de la conduite.

N° 14 : mettre en place (Délégation à la sécurité routière – DSR) un portail internet national permettant : d’accéder à l’inscription gratuite auprès de l’agence nationale des titres sécurisés (ANTS) à l’examen théorique général et à l’épreuve 2 pratique ; d’identifier les acteurs qui proposent un accompagnement personnalisé et notamment le vivier d’accompagnateurs bénévoles pour chaque territoire en coordination avec les Régions ; de connaitre le niveau de prestations offertes par chaque école de conduite, par exemple la durée précise d’un cours de conduite ; de publier les taux de réussite médians aux épreuves pratiques par école de conduite (assorti, si l’école le souhaite, d’un tableau présentant les taux de réussite en fonction d’un nombre d’heure de pratique, par profil type) ; d’accéder à l’information sur les modalités d’accompagnement financier.

N° 15 : parallèlement à la mise en place du label, il conviendra d’organiser une concertation de l’ensemble des acteurs du secteur, sous l’égide d’une personnalité qualifiée, pour définir la liste des prestations réalisées par les écoles de conduite qui seront portées à la connaissance du public sur le portail internet (proposition n° 14) notamment sur toutes les dimensions qualitatives et pédagogiques des prestations. Cette liste de critères remplacera le label actuel. Les conditions pour bénéficier des aides publiques ne seront pas liées au respect de tous les critères de cette liste. Cette dernière devra être mise en place dans un délai de six (6) mois à compter de la remise de ce rapport. Les contrats de labellisation déjà conclus ne seront pas remis en question.

N° 16 : étendre le dispositif de suramortissement voté en première lecture du Projet de Loi de Finances 2019 par l’Assemblée nationale au simulateur de conduite.

N° 17: promouvoir des modalités innovantes d’apprentissage de la conduite comme le recours à des simulateurs pour appréhender les manœuvres et les « mises en situation » au regard de certaines situations d’urgence (freinage d’urgence, conduite de nuit, sous la pluie / ou la neige) et augmenter le nombre d’heures d’apprentissage sur simulateur à dix heures ; promouvoir le permis de conduire sur les véhicules à boîte automatique et réduire à trois (3) mois le délai permettant sa transformation en permis « classique ».

N° 18 : développer un portail internet qui permette au candidat d’accéder facilement aux aides au financement du permis de conduire. Présenter ce portail lors des journées du service national universel. Expertiser la mise en place d’un guichet numérique, décliné au niveau régional, afin d’orienter et d’accompagner les demandeurs d’un financement du permis de conduire. Ce dispositif national serait piloté par les régions, au plus près des territoires.

N° 19 : désintermédier l’attribution des places de l’examen pratique en mettant en place un calendrier en ligne pour l’intégralité du territoire national, à l’instar de l’expérimentation en cours pour les candidats libres.

N° 20 : afin d’éviter que les candidats ne se présentent plusieurs fois et dans des délais très courts : facturer la seconde inscription à l’examen pratique et limiter le passage à une fois tous les quinze jours.

N° 21 : garantir l’homologation du véhicule à double commande présenté à l’examen pour permettre à tous les candidats d’être traités de la même façon. Si l’école de conduite dispose d’un véhicule disponible le jour de l’examen, elle pourrait d’ailleurs accompagner le candidat comme dans le système actuel.

N° 22 : faire évaluer par le ministère de l’Intérieur les mesures complémentaires de recrutement d’inspecteurs du permis (détachement de militaires ou policiers ; réduction de la durée de formation de certains inspecteurs ; organisation de concours d’inspecteurs locaux –Ile de France par exemple).

N° 23 : étendre l’expérimentation du groupe La Poste à d’autres entreprises assurant des missions de service public.

Anthony Maurin

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