Publié il y a 5 ans - Mise à jour le 05.03.2019 - abdel-samari - 3 min  - vu 1342 fois

LE 7H50 de l'avocate Khadija Aoudia : "Porter haut le sujet du viol, ce crime universel"

Photo ObjectifGard

Les rencontres Charles Peguy proposent ce mardi 5 mars 2019, à 18h au Musée de la Romanité à Nîmes, un débat après l'intervention de l'avocate Nîmoise Khadija Aoudia sur la thématique suivante : "Le viol, un crime sociologiquement et historiquement contesté. Pourquoi ?" Elle est l'invitée du 7H50.

ObjectifGard : Pourquoi avez-vous choisi ce thème pour le colloque de ce soir ?

Khadija Aoudia : Il intervient dans le cadre de la semaine de la femme. Je voulais donc porter haut ce sujet du viol qui est malheureusement un crime universel. Je veux apporter à travers ce colloque tout notre soutien symbolique aux femmes du monde entier qui subissent ce crime.

Le thème de ce colloque fait référence à un crime sociologiquement et historiquement contesté. Pourquoi ce titre ?

Il me semblait important lors de mon intervention de mettre en corrélation le constat suivant : en période de trouble social, de guerre ou de grande crise économique d'observer la hausse vertigineuse des viols. Ensuite, je vais plus loin en identifiant des zones géographiques sur la planète particulièrement exposées à ce fléau... À l'heure actuelle, toute la zone du Proche-Orient est concernée, certains pays africains également : Iran, Libye, Liban, Israël, Palestine, Jordanie, Inde... Dans ces pays les exemples de viols collectifs pendant des manifestations sont nombreux.

Autre observation : la pratique du viol est très ancienne...

En effet, les études et les recherches que j'ai pu faire permettent d'observer que les viols étaient déjà répandus 4000 ans avant JC. Cela doit nous interroger. Je pourrais ajouter que dans la bible hébraïque, dans le Coran, des possibilités existent de réparer le viol par le mariage. Le violeur pouvait donc échapper à sa responsabilité pénale en épousant sa victime. Cette possibilité a été supprimée par le Maroc en 2014, par la Tunisie et la Jordanie seulement en 2017. Mais elle existe encore dans plusieurs pays.

Et en France ?

Sur les affaires jugées pénalement en France, savez-vous que 50% de celles qui concernent les crimes sont liées à des faits de viols ? Une fois que l'on a posé ce constat, il faut s’interroger sur ce phénomène, c'est la raison qui m'a poussée à accepter de participer au colloque de ce soir.

Un colloque qui vous tient particulièrement à cœur, pourquoi ?

Je veux sensibiliser et fédérer pour réfléchir autour de ce crime universel. Que chacun puisse s’interroger sur les causes, pourquoi ce crime ? Pourquoi une recrudescence pendant les périodes troublées ? Nous avons aujourd'hui suffisamment de recul sur les conséquences traumatiques des victimes, mais il est absolument nécessaire d'avoir plus d'éléments sur les motivations des violeurs. On nous dit que cela ne relève pas de la psychiatrie, hormis des cas marginaux. Il faut donc pousser la réflexion pour comprendre.

Est-ce que l'arsenal juridique est suffisant aujourd'hui ?

Le texte juridique est plus que complet et permet d'appréhender toutes les situations y compris en tenant compte des spécificités et des sexes. C'est, à mon sens, suffisamment répressif et large dans sa compréhension. Entendons-nous bien, la difficulté n'est pas d'ordre législatif mais sociétal. Il faut que tous les citoyens s'emparent de ce sujet pour trouver les causes à ce mal.

On vous sent très émue...

J'ai toujours été sensible à ces questions qui font appel au respect de la dignité humaine, à la dignité de la femme. Dans mon rôle d'avocate, j'ai été témoin des confidences de mes clients. J'ai défendu une soixantaine de personnes qui ont subi ces atrocités. Tout cela marque votre quotidien de femme.

Propos recueillis par Abdel Samari

Abdel Samari

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