Publié il y a 4 ans - Mise à jour le 15.04.2020 - marie-meunier - 6 min  - vu 16246 fois

FAIT DU JOUR Le covid-19 menace la saison touristique du Gard

En sus des annulations déjà actées, des inquiétudes planent au-dessus des festivités d'été organisées dans le Gard.
Certains événements ont déjà été annulés et d’autres sont menacés de l’être (Photo : Droits réservés)

En pleine épidémie de covid-19, plusieurs manifestations marquant le début de la saison estivale sont annulées ou en passe de l’être. Un drame pour l’économie gardoise. 

Confinement jusqu'au 11 mai... Annoncée hier par le président Emmanuel Macron, la décision a eu l'effet d'une bombe. Cela fait déjà un mois que la Français sont confinés. Un long mois au cours duquel, en temps normal, les Gardois et touristes étrangers auraient arpenter nos rues à la recherche d'un café, d'un restaurant, d'un monument où de l'un de nos événements emblématiques. Depuis plusieurs jours, les annonces d'annulation de manifestations pleuvent : feria, festivals, journées taurines...

Les conséquences économiques de la crise sanitaire se font sentir. Touché dans sa chair, le Gard l'est aussi au portefeuille. Car plus que d'autres, notre département touristique est impacté par les conséquences du covid-19. Le week-end de Pâques marquant traditionnellement le début de la saison estivale, les acteurs touristiques font grise mise. Les élus tentent d'anticiper l'avenir en imaginant des solutions pour limiter la casse. Nul doute que l'économie sera cet autre malade à guérir pour éradiquer l'épidémie.

Pas de feria de Nîmes... Celle d'Alès reportée ?

Feria de Nîmes (Photo d'illustration : Tony Duret / Objectif Gard

Le couperet est tombé mercredi dernier. Par décision du maire, Jean-Paul Fournier, la 68e feria de Pentecôte à Nîmes est annulée. « Ça parait très compliqué d’imaginer réunir des dizaines de milliers de spectateurs dans les arènes et des milliers de festaïres dans les rues fin mai », regrette l'édile qui, même s’il est attaché à l’événement, préfère penser à « la sécurité et la santé des Nîmois. »

L'élu a ainsi anticipé les annonces d'Emmanuel Macron, qui a précisé ce lundi soir, que les événements rassemblant des foules ne pourraient se tenir avant la mi-juillet. Il n'empêche que cette annonce est un coup de canif portée à l’économie nîmoise. Chaque année, la feria de Pentecôte rassemble près de 800 000 personnes, selon la municipalité. Ce sont autant de consommateurs dans les bodegas, les restaurants… D’ailleurs, nombreuses sont les entreprises qui comptent sur l’événement pour compléter ou faire leur chiffre d’affaires.

À Alès, décision a également été prise d’annuler la feria : « Il n’est pas question de la maintenir fin mai. Même si nous sommes déconfinés, il y a fort à parier qu’il sera compliqué de se réunir nombreux dans des espaces contraints », a expliqué l'élu à la ville d'Alès, Christophe Rivenq, qui espère pouvoir repousser la feria pendant la dernière semaine d’août. 

Le Grau-du-Roi en première ligne

Au Grau-du-Roi, les feux d'artifice sont des temps forts de la saison estivale (Photo d'archive Élodie Boschet/Objectif Gard)

Cité balnéaire, le Grau-du-Roi fait aussi les frais du confinement. Pâques marquant le début de la saison touristique, plusieurs événements ont d'ores et déjà été annulés, comme les Nautiques qui rassemblent chaque année 45 000 visiteurs sur un week-end. Il en va de même pour les Graulinades reportées à l’automne. « Ça signifie des quais, des terrasses vides… », regrette le maire, Robert Crauste, qui a également annulé le festival Fest’in zone, en juillet, « pour lequel il était trop compliqué d’assurer un équilibre financier. »

Concernant d'autres événements, la municipalité est toujours en réflexion, comme la fête de la Saint-Pierre, mi-juin : « À l’heure où je vous parle, je ne sais pas quand et comment nous sortirons du confinement », poursuit l’édile. Idem pour les tant appréciés feux d’artifice. « Le 14 juillet pourra-t-on rassembler 30 000 personnes sur le front de mer ? », s'interroge-t-il. Au Grau-du-Roi et plus largement en Petite Camargue, le doute plane sur le maintien des courses camarguaises. « On a discuté avec le gestionnaire des arènes, la société Ribera. C’est évident que les animations seront largement amputées », poursuit Robert Crauste.

Face à ces inquiétudes, la municipalité tente d'anticiper en imaginant plusieurs scénarios d’animations pendant les grandes vacances ainsi qu'un « plan de soutien à l’économie » pour aider les acteurs du territoire impactés par la crise sanitaire.

Pont-du-Gard : la garrigue n’est pas en fête…

Garrigues en fête (Photo : Norman Jardin)

Au Pont du Gard c'est aussi la soupe à la grimace. Depuis le confinement, le site tourne au ralenti. Sur les 107 employés, seuls sept sont en télétravail « pour la gestion des paies, des ressources humaines ou le suivi des marchés. Les autres sont au chômage technique », indique Sébastien Arnaux, directeur de l’EPCC (Établissement public de coopération culturelle) Pont du Gard. S'y ajoutent « deux agents de sécurité qui surveillent les installations et rappellent aux gens qu’ils ne peuvent pas venir sur les berges du Gardon, en accord avec l’interdiction du préfet. »

 Dans ces conditions, la manifestation Garrigues en fête qui se déroule d'ordinaire à Pâques a été annulée. « Ça représente entre 15 000 à 20 000 personnes », expose le directeur, même si l'annulation de « l’événement n’a pas de grandes conséquences économiques puisque il est gratuit. » Les concerts Live au Pont ayant été abandonnés, le site ne présentait plus d’événements majeurs. Toutefois, « nous sommes inquiets pour la saison touristique et la capacité de notre clientèle étrangère à venir sur le site », poursuit Sébastien Arnaux, incitant « les acteurs du territoire à réfléchir ensemble à des solutions à la fin du confinement. » 

Pas de reggae à Bagnols ?

Bagnols-sur-Cèze, capitale du reggae ? Pas sûr que la ville porte haut et fort son titre cet été. Les deux festivals de reggae semblent menacés par un confinement qui s'allonge et aussi par l'annonce du président hier soir, écartant tous les événements drainant les foules jusqu'à mi-juillet. Le Zion Garden devait fêter son 10e anniversaire du 15 au 19 juillet avec des artistes européens. Au total : 2 000 personnes étaient attendues sur quatre jours.

L'organisateur doute que le festival puisse se dérouler dans sa forme prévue initialement : « On n'a pas pris de décision ferme. On a plusieurs pistes de réflexion à ce jour. Soit on arrive à organiser sous la forme initiale - mais elle me semble fortement compromise -, soit on opte pour d'autres petits formats qui sont à l'étude », expose Paul Guillaud. Une soirée ou un week-end à 500 personnes, en se concentrant sur le public de Bagnols et les alentours, par exemple.

Paul Guillaud se fixe jusqu'à fin avril pour prendre une décision pour le Zion Garden qui doit se dérouler à Bagnols du 15 au 19 juillet. (Marie Meunier / Objectif Gard)

« On ne peut pas payer les acomptes des artistes sans savoir si cela va être organisé » , poursuit l'organisateur, qui a tout mis en suspens. En temps normal, la billetterie ouvre à la mi ou fin-avril. Mais lui aussi ne préfère pas vendre de places s'il faut les rembourser quelques temps après.

Contrairement à certains gros festivals, l'association bagnolaise n'a encore engagé aucun frais sur le Zion Garden. « Au pire des cas, on fait une année à zéro mais cela ne met pas l'association en danger » , précise Paul Guillaud. Il s'est fixé jusqu'à fin-avril pour décider du maintien ou non du festival. Mais il n'exclut pas de compenser en proposant un autre événement en septembre ou en octobre s'il le fallait.

Du côté du Bagnols Reggae festival, prévu du 23 au 26 juillet, « on est très pessimiste ». L'organisateur, Jérôme Levasseur, attendait fermement l'allocution d'Emmanuel Macron hier soir pour lever le flou artistique autour du sort des festivals. Mais le confinement a déjà des répercussions : « L'identification du festival commençait à être bien ancrée. On avançait dans une bonne dynamique pour cette 3e édition mais là, elle est brisée », déplore-t-il. 20 000 personnes sont normalement attendues sur les quatre jours de festival. Mais depuis l'annonce du confinement, la billetterie est à l'arrêt. Alors qu'elle est ouverte depuis décembre, un peu moins de 1 000 pass ont été vendus.

20 000 personnes sont normalement attendues sur 4 jours pour cette 3e édition du Bagnols reggae festival du 23 au 26 juillet. (Photo Archives / Hugo Roche / Service communication) • SERVICE COMMUNICATION MAIRIE DE BAGNOLS-SUR-CEZE

L'autre interrogation c'est : est-ce que les liaisons à l'étranger seront toutes rétablies ? « 95% de nos artistes viennent d'Angleterre, des États-Unis », relate Jérôme Levasseur. De plus, le public est composé à 50% de festivaliers venant de la région et à 50% venant du reste de la France voire d'Espagne, d'Italie, de Hongrie, d'Angleterre...

Pour l'organisateur, impossible de faire « un demi festival » qui ne serait pas rentable et continuerait de creuser les dettes de l'association. Mieux vaut financièrement le reporter à l'année suivante. Rien n'est acté pour l'heure, il communiquera au moment venu sur les réseaux sociaux sur la décision qui sera prise.

Heureusement, peu de frais ont été engagés pour payer les avances des artistes mais c'est une partie du tissu local qui serait impacté si le Bagnols reggae festival n'avait pas lieu. Il ne faut pas oublier que pendant quatre jours, l'événement fait travailler les campings, les restaurateurs, les commerces... En tout 85 % d'acteurs locaux.

Saint-Gilles : la Feria de la Pêche et de l’abricot menacée 

Enfin, comme à Nîmes et Alès, Saint-Gilles devra certainement annuler plusieurs de ses manifestations. Certaines sont prévues pendant la période de confinement comme la journée camarguaise en mémoire d’Émile Bilhau, organisée fin avril ainsi que la « Concentration saint-gilloise de voitures anciennes et de prestige », en mai. 

Quant à la Feria de la pêche et de l’abricot, prévue en août, « on ne sait pas si, après la période de confinement, il sera encore autorisé de réunir plusieurs centaines ou milliers de personnes dans un même lieu », regrette le maire Eddy Valadier. Confinement ou plus, la crise du covid-19 est encore loin d’être derrière nous. 

Marie Meunier et Coralie Mollaret 

Marie Meunier

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