FAIT DU JOUR Le spritz gardois pour sortir la tête de l'eau ?

Un bitter local a été réalisé par la coopérative Grap'Sud
- Thierry AllardOn le sait, la filière viticole va mal. Face à la crise qui touche le secteur, le Conseil départemental et la Fédération gardoise des vins à Indication géographique protégée ont signé une convention de partenariat ce vendredi matin. Dans le même temps, les vignerons ont présenté leur stratégie pour sortir la tête de l’eau, qui passe notamment par l’innovation.
Avec cette nouvelle convention, il s’agit de « donner un nouvel élan à une collaboration essentielle », pose la vice-présidente du Conseil départemental Cathy Chaulet. Une collaboration qui voit la collectivité soutenir les vignerons IGP à hauteur de 28 000 euros, « témoignage de notre volonté inébranlable de soutenir la filière », rajoute l’élue.
De quoi permettre aux vignerons de la Fédération IGP de proposer de nombreuses animations, à commencer par la 10ᵉ édition des soirées « Les Vignerons sur le Pont », qui verront 18 caves faire déguster leurs vins au cours de six soirées festives du 16 juillet au 20 août. Un rendez-vous devenu un incontournable de l’été au Pont du Gard, avec 2 000 personnes par soirée revendiquées par les organisateurs. « Un travail extraordinaire, nous avons besoin de votre engagement et de votre détermination », souligne le président de l’Établissement public du Pont du Gard, Patrick Malavieille, en s’adressant aux vignerons présents.
D’autant plus l’année des quarante ans du classement au Patrimoine mondial de l’Unesco de l’aqueduc romain, marquée notamment par l’exposition événement en cours, « Regards sur le Pont », avec une carte blanche au célèbre photographe Raymond Depardon et « les plus grands peintres et écrivains qui ont peint et écrit sur le pont, ainsi que des témoignages de gens du coin », précise l’élu.
« Jouer à fond l’œnotourisme »
Autant de rendez-vous festifs et légers qui ne doivent pas faire oublier le fond de l’affaire : « La souffrance qui existe dans nos vignobles », pose Denis Verdier, le président de la Fédération gardoise des vins IGP. La crise actuelle, causée principalement par « une baisse drastique de la consommation de vin rouge », précise-t-il, laisse nombre de vignerons dans le désarroi, contraints d’arracher des vignes, quand ce n’est pas de mettre la clé sous la porte.
Alors l’heure de la mobilisation a sonné : « Nous sommes là pour sceller un lien encore plus fort avec le Conseil départemental, pour mobiliser des moyens encore plus importants vu l’ampleur des actions à mener », développe Denis Verdier. Ainsi, et les soirées vigneronnes, comme les fêtes du vin d’Anduze et de Saint-Ambroix ainsi que la mise en lumière des vins locaux lors des soirées Candlelight du Pont du Gard et L’Agglo en lumière de Nîmes Métropole le démontrent, « il nous faut jouer à fond l’œnotourisme », pose Denis Verdier. La présence des vins du Gard à des manifestations et l’organisation de manifestations autour du vin sont un moyen de « faire avancer la production », estime-t-il.
Autre point important, « la mobilisation des moyens de tous », avance-t-il. Ça passe donc par ce nouveau partenariat avec le Département, mais aussi par des démarches avec la Chambre d’agriculture, « qui va favoriser l’émergence d’un consommer gardois des produits agricoles », explique le président de la Fédération.
Le spritz gardois débarque
Enfin, dernier point mais non des moindres : l’innovation. « Nous entrons dans une phase forte d’innovation pour correspondre aux voeux des consommateurs », affirme Denis Verdier. La Fédération a déjà lancé sa marque commune, les Bullicieuses, pour favoriser le développement localement des vins effervescents, qui ont le vent en poupe. « On voit du Prosecco partout, et on ne serait pas capable dans notre département de faire un produit de ce niveau-là ? », lance-t-il. Les vignerons qui se sont emparés localement de ce marché tendent à démontrer que les vins effervescents gardois ont leur mot à dire face à leur homologue transalpin.
Et comme le Proescco se boit principalement en cocktail, plus précisément sous forme de spritz, la Fédération s’est rapprochée de la coopérative agricole Grap’Sud, basée à Cruviers-Lascours, spécialisée dans les produits dérivés du raisin, du vin et de l’olive pour qu’elle planche sur un bitter local, un amer en bon français, ingrédient indispensable de tout spritz qui se respecte. « Nous avons travaillé pour en sortir un qui soit 100 % vigneron, un produit premium, avec de l’amertume sur le pissenlit, de l’agrume sur la clémentine, du romarin ou encore du sureau », présente Richard Banton, chargé du développement des produits vignerons chez Grap’Sud.
Un produit « spécifiquement dédié au projet Bullicieuses », précise-t-il, lancé cet été sous le nom de « Bulli’Spritz ». Avec l’idée que les vins effervescents gardois et le bitter local se fassent une place sur un marché florissant : « Il s’ouvre un million de cols par an de Proescco rien que sur l’arc méditerranéen », précise Richard Banton. La Fédération gardoise des vins IGP et Grap’Sud vont en faire une communication croisée pour lancer le nouveau cocktail.
Restera ensuite à le distribuer : ce sera le cas sur les différents événements de l’été, notamment les soirées les Vignerons sur le Pont, et le 12 juillet pour un événement au Mas des agriculteurs. Quant aux bars et restaurants, la Fédération et Grap’Sud comptent sur le réseau des vignerons et leurs connaissances locales dans le secteur pour les inciter à mettre le spritz gardois sur leur carte.
Avec une idée, résumée par Denis Verdier : « Si on veut vendre ailleurs, encore faut-il être reconnu chez soi. » Car, « même si on sait que ce n’est pas avec ça qu’on règlera définitivement les problèmes de la viticulture, c’est un élément vers une forme de solution », affirme-t-il.
L'alcool est à consommer avec modération.