Publié il y a 2 ans - Mise à jour le 24.12.2021 - thierry-allard - 4 min  - vu 619 fois

CÈZE CÉVENNES La préfète vient débattre des enjeux forestiers

La préfète Marie-Françoise Lecaillon et le président de la CC de Cèze Cévennes et maire de Gagnières Olivier Martin (Photo : Thierry Allard / Objectif Gard)

La préfète est venue à la rencontre des élus et des acteurs impliqués sur la question forestière à Gagnières, ce jeudi (Photo : Thierry Allard / Objectif Gard)

C’est un bout de Gard aux confins de l’Ardèche où la forêt gagne chaque année un peu plus de terrain. Une forêt de pins maritimes, héritage des mines, source aujourd’hui plus de risques que de richesses pour un territoire qui en aurait bien besoin. 

Ce territoire, c’est la Communauté de commune de Cèze Cévennes, une collectivité rurale bâtie autour de Saint-Ambroix et Barjac, présidée par le maire de Gagnières Olivier Martin. Alors pour accueillir la préfète Marie-Françoise Lecaillon ce jeudi, ainsi qu’un aréopage de spécialistes de la question forestière, il a choisi Gagnières, commune concernée au premier chef par cette question, qui traverse la frontière administrative toute proche avec l’Ardèche. 

« Ce sujet doit nous mobiliser, pour faire d’un risque, à travers les feux de forêts, une chance, une perspective pour ce territoire », avance Olivier Martin en introduction. Une idée commune avec la collectivité voisine de la Communauté de communes Pays des Vans en Cévennes, « car les feux ne connaissent pas de frontières. » 

Tout le monde est d’accord : il y a urgence à agir. Olivier Martin se dit carrément « inquiet » face à cette bombe à retardement potentielle en cas d’incendie. « À court terme, la question est de savoir comment on entretient les dispositifs de DFCI », pose la préfète. Justement : il y a du pain sur la planche. « La problématique des DFCI est de pouvoir intervenir en sécurité et accéder aux massifs, explique le colonel Thierry Carret, directeur adjoint du SDIS du Gard. Nous avons fait un inventaire des DFCI du Gard, sur les 2 100 kilomètres de pistes, 45 % ne sont pas utilisables. » Un constat terrible, d’autant que « dans les massifs, si on n’intervient pas rapidement, le feu devient incontrôlable », ajoute le colonel.

Cette piste, à la frontière du Gard et de l'Ardèche, n'est plus praticable pour les pompiers (Photo : Thierry Allard / Objectif Gard)

Idem pour les citernes, dont 45 % sont également inutilisables. La gestion de ces équipements, DFCI et citernes, est tantôt à la charge des communes, des communautés de communes, comme c’est le cas pour celle de Cèze Cévennes, de syndicats, voire, et c’est le cas en Ardèche, du Département. Résultat : des pistes sont entretenues et d’autres non, ce qui entraîne, à terme, leur déclassement, et certaines pistes s’arrêtent aux frontières administratives. 

L’entretien de ces équipements est donc une question épineuse, surtout dans une région régulièrement frappée par des épisodes cévenols qui endommagent les pistes. La préfète demandera donc s’il était envisageable de mettre sur pied des plans d’entretien. Une idée qui fait l’unanimité, mais encore faut-il avoir les financements en face : il faut attendre que les pistes soient dégradées pour obtenir des crédits. Les collectivités qui gèrent ces équipements sont donc condamnées à faire, puis à refaire en permanence. 

Alors « nous avons envisagé de mettre chaque année une provision, affirme Olivier Martin. Mais c’est un débat, le Nord de la communauté de communes est plus concerné que le Sud ou l’Est qui n’ont pas les mêmes priorités. » « Sur ce sujet, l’heure n’est-elle pas venue d’avoir une approche départementale », osera la préfète, avant d’inciter à « regarder comment s’inscrire dans la durée et assurer des cofinancements, si on arrivait à partir de votre communauté de communes à bâtir quelque chose qui tient, on pourrait ensuite voir comment l’étendre. » La préfète évoquera ensuite la piste de conventions de gestion pour les pistes transfrontalières.

Cette piste, sur les hauteurs de Gagnières, a fait l'objet de travaux d'aménagements (Photo : Thierry Allard / Objectif Gard)

Entretenir et valoriser la forêt

Autre sujet : la valorisation de la forêt. Une forêt qui progresse, « c’est aussi dû au manque de sylviculture, et ça provoque une hausse de la masse combustible, c’est un problème », explique Guylaine Archevêque, directrice de l’Office national des forêts Gard/Hérault. Ici, où la forêt est à 75 % privée, le bois sert en bois de feu, en palette ou en papeterie, « mais on est capables de faire mieux en enclenchant de la sylviculture », affirme la directrice de l’ONF. 

Pour y parvenir, il faut convaincre les propriétaires forestiers. « On peut former les propriétaires, mais encore faut-il en avoir les moyens », lancera la vice-présidente du Centre régional de la propriété forestière Jeannine Bourelly, avant de préciser que, contrairement à une idée reçue, « les propriétaires forestiers ne sont pas des nantis, 30 % sont sous le seuil de pauvreté. » Difficile dans ces conditions d’envisager d’entretenir et valoriser les parcelles. 

Car la forêt a besoin d’être entretenue, « les gens l'ont beaucoup oublié, il ne faut pas croire que quand on abat un arbre, on fait du mal à la forêt », martèle Guylaine Archevêque, qui milite pour une communication auprès du grand public sur ces questions. Reste un sujet, et non des moindres, développer une filière bois sur le territoire. Car « le pin maritime, dans l’Aquitaine, c’est le premier produit intérieur brut, on peut faire beaucoup mieux », affirme Francis Mathieu, président des Forestiers du Gard. 

La préfète insistera sur « la recherche de l’équilibre économique », en étendant la réflexion aux professionnels de la filière bois. « On ne part pas de rien, il y a trois entreprises à Bessèges », soulignera Francis Mathieu. Une bonne base pour aller plus loin. En attendant, il faut fédérer. Le Pays Cévennes, qui porte déjà la charte forestière territoriale, aurait le profil pour la préfète. 

Reste un constat, résumé par Marie-Françoise Lecaillon : « la forêt doit être exploitée, si elle ne l’est pas, il y a des conséquences en termes d’incendie. Il faut aborder ce sujet de façon globale, avec une conjonction des intérêts. » L’idée étant « d’avoir du monde en forêt, avance le vice-président du Pays Cévennes Patrick Deleuze. Plus on a du monde en forêt, moins on a d’incendies. » 

Thierry ALLARD

thierry.allard@objectifgard.com

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