Publié il y a 2 ans - Mise à jour le 08.03.2022 - marie-meunier - 6 min  - vu 1008 fois

FAIT DU JOUR Ces femmes qui brillent dans des métiers où on ne les attend pas

anais vandamme (Photo Yannick Pons/Objectif Gard) - Yannick Pons

Depuis l'entrée progressive des femmes sur le marché du travail, les différents secteurs se sont progressivement féminisés. Demeurent encore des corps de métiers très investis par les hommes, peinant à s'ouvrir aux femmes. Tandis que celles-ci ont tendance à être associées aux métiers de la santé, du social, de l'administration.

Certaines femmes ont fait le choix de sortir de ces cases genrées, de casser les codes édictés par la société et de faire leur place dans ces "niches masculines". Nous avons décidé de vous parler de trois d'entre elles en ce 8 mars, Journée internationale des droits de la femme. Des femmes du Gard qui exercent leur métier avec passion et qui ont prouvé qu'elles le faisaient aussi bien que les hommes.

Anaïs Perin, 30 ans, à la tête de deux agences de pompes funèbres à Jonquières (Vaucluse) et à Connaux (Gard) : "Je vis pour la mort"

Anaïs Perin à la tête de deux agences de pompes funèbres, avec son employée, Dorothée Oustrière. (Marie Meunier / Objectif Gard)

Fine monture dorée posée sur le nez, manches de blaser retroussées et grand sourire, Anaïs Perin est loin de la caricature que l'on peut se faire du croque-mort. La jeune femme de 30 ans a ouvert depuis juillet 2021 sa deuxième agence de pompes funèbres à Connaux, en plus de celle de Jonquières, dans le Vaucluse. Le métier de conseiller funéraire s'ouvre de plus en plus aux femmes mais il reste rare que l'une d'elles se lance à son compte dans ce secteur. "Je vis pour la mort", lance-t-elle en plaisantant. Sa vocation a suscité des interrogations chez ses proches au départ mais a été très bien acceptée.

Alors qu'elle était en licence psychologie, Anaïs Perin se rend compte que le système de la faculté ne lui convient pas. Elle écume sur Internet les différentes fiches métiers et tombe sur une profession qu'elle ne connaît pas du tout : conseiller funéraire. Elle en rencontre un dans le Vaucluse qui l'embauche de suite : "Il m'a directement mis le nez dessus en m'envoyant en salle de soins des corps pour assister au procédé de conservation. Si j'arrivais à rester dans la pièce, c'est que c'était un métier pour moi."

Et elle y est restée. À 20 ans, Anaïs Perin a trouvé sa voie. Une voie qui avait déjà fait écho chez elle trois ans plus tôt lorsqu'elle a assisté à l'enterrement d'une de ses camarades de lycée : "J'avais trouvé les obsèques géniales dans le sens où je trouvais ça beau de rendre hommage à la personne. Il y avait des bracelets sur les poignées du cercueil, j'avais moi-même organisé une collecte..." Anaïs Perin restera huit ans chez celui qui l'a formée avant de prendre son envol et d'ouvrir sa propre entreprise où elle emploie une personne désormais.

Elle a dû se faire sa place dans ce monde très masculin : "J'ai toujours eu conscience qu'une femme n'a pas les mêmes chances qu'un homme. Un homme on l'écoute, une femme elle doit répéter." Son esprit combattif qu'elle a développé deux ans à l'Armée et en 17 ans de volley-ball en compétition l'aide à passer au-dessus d'une atmosphère parfois machiste. De temps en temps, elle a encore affaire avec des clients dubitatifs, lui posant plusieurs fois les mêmes questions pour la tester. À l'issue de la cérémonie, ce sont souvent ceux là qui viennent la remercier. "Je veux casser les codes et prouver qu'une femme peut aussi bien faire qu'un homme. C'est même un avantage dans ce métier car on a un côté plus doux, moins froid", estime-t-elle.

Que ce soit pour les rendez-vous des familles, l'administratif, le transport, la cérémonie ou la réduction de corps, Anaïs Perin s'occupe de tout. C'est aussi ce qui noue la confiance avec les clients. Elle oeuvre aussi à ce que les métiers de la mort soient moins tabous : "Le jour où je ne ressentirai plus rien, j'arrêterai. On reste un métier humain et j'espère l'exercer jusqu'à la fin de ma vie."

Morgane Alberti, 37 ans, gérante d’un centre automobile Vulco à Aigues-Mortes : "Le management d’une femme est plus doux que celui d’un homme"

Morgane Alberti est passionnée par l'automobile (Photo Vulco)

C’est en visitant un lycée professionnel à 16 ans que Morgane s’est prise de passion pour l’automobile et décida d’en faire son métier. Dans une promotion comptant seulement trois filles pour 30 élèves, "pendant deux ans, j’ai mis les mains dans le cambouis et j’ai appris à démonter des joints de culasse pour comprendre comment fonctionne chaque pièce", raconte-t-elle . Pourtant, c’est bien dans la vente de pièces détachées que cette Gardoise d’adoption préfère se spécialiser. Recrutée dans un garage à Lunel, elle approfondit ses compétences en intégrant en parallèle un bac professionnel en commerce.

Après trois d’expérience, elle arrête pour monter sa propre entreprise mais abandonne son projet au dernier moment : "J’avais 20 ans, je n’étais pas suffisamment mature", avoue-t-elle. Après une parenthèse de six ans dans l’imprimerie, elle est revenue à ses premières amours en rejoignant le centre automobile Vulco à Aigues-Mortes en 2012 aux côtés de son mari, Didier. D’abord à l’accueil, Morgane s’est accrochée et a fait ses preuves jusqu’à devenir la responsable du garage spécialisé principalement dans les pneus et les vidanges. "Le management d’une femme est plus doux que celui d’un homme, ça se passe très bien", confie la maman de Deva (12 ans) pour évoquer sa relation avec les trois mécaniciens qu’elle dirige.

C’est surtout avec les clients qu’elle a connu quelques déboires notamment pour une histoire de bougies et une remarque déplacée à la clé : "Qu’est-ce que vous faites ici ?" Malgré son statut, Morgane sent que le fait d’être une femme n’inspire pas toujours confiance : "Certaines personnes ont du mal et vont avoir besoin de l’avis du technicien masculin pour être sûr de ce que je leur ai dit."

Épanouie dans son travail et fière de son parcours, elle espère que l’automobile va se féminiser dans les années à venir. "Il faut dédiaboliser cette image qu’ont les femmes de se dire sous le capot ce n’est pas pour moi. Quand on prend la peine de s’y intéresser, c’est abordable." En attendant d’embaucher peut-être un jour une mécanicienne, Morgane veut consolider la réputation de son centre auto avant pourquoi pas d’en ouvrir un second du côté du Grau-du-Roi.

Anaïs Vandamme, 22 ans, agent de maintenance des bâtiments : "Je sais ce que je veux mais surtout ce que je ne veux pas"

Anaïs a appris la soudure dans les ateliers de l'Afpa de Nîmes (Photo Yannick Pons/Objectif Gard) • Yannick Pons

À peine 22 ans et un mental d'acier, cette jeune femme originaire de Ganges a subi un début de vie difficile et a dû se prendre en main très rapidement. "J'ai géré ma carrière très tôt, à partir de 15 ans", explique t-elle. Elle comprend très vite que la théorie ne l'intéresse pas et qu'elle veut du concret, du manuel et des grands espaces.

Elle s'oriente donc très tôt vers un bac professionnel de paysagiste sur le secteur d'Uzès, en alternance à la pépinière des bords de l'Avèze à Brissac. L'année de ses 18 ans, elle réussit son baccalauréat, son permis, son CACES (permis cariste et engins de levages) et son brevet d'études professionnelles agricole (BEPA). Après avoir essayé les métiers de la restauration, de maraîchage et d'aide à la personne, elle confirme son premier choix d'orientation scolaire en travaillant à la reconstruction d'un camping qui a subi des inondations à Corconne.

Elle veut aller plus loin, être plus autonome en élargissant sa palette de compétences. "J'aime bien avoir des grosses machines entre les bras, mini-pelles ou tracteurs", raconte t-elle. Ainsi c'est à l'Afpa de Nîmes qu'elle trouve sa voie. L'organisme de formation l'accueille en pension dès le 18 Octobre 2021. Elle suit un stage d'agent de maintenance en bâtiments lors duquel elle apprendra les métiers de plaquiste, peintre, carreleuse, etc.

Les ateliers de l'Afpa sont parfaits pour un apprentissage concret. Elle se retrouve bien entendu avec des stagiaires en majorité masculins. "Une femme dans un groupe d'hommes ça motive l'équipe. Ça pousse tout le monde à être meilleur. Les filles en général sont plus douées, plus minutieuses." explique Cédrick Fayada, son formateur.

Et Anaïs est douée, volontaire, elle sait ce qu'elle veut et surtout "ce qu'elle ne veut pas" lance t-elle. Elle est doté d'un fort caractère. "Elle a confiance en elle de par son expérience de la vie, donc elle ose demander ou expérimenter", explique Cédrick Fayada. Sa formation se termine le 20 mai, elle a déjà un contrat de plusieurs mois avec le camping de Corconne. Elle souhaite monter sa société dans la rénovation de bâtiments extérieur et intérieur.

Marie Meunier, Corentin Corger et Yannick Pons

Marie Meunier

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