FAIT DU JOUR Tauromachie : Nîmes peut-elle mieux faire ?

Simon Casas (Photo Anthony Maurin).
Ce mercredi, la Chambre régionale des comptes a livré les conclusions de son rapport sur « les soutiens publics à la corrida », sur la période 2019 à 2023. Si Nîmes tire son épingle du jeu, la gestion des arènes par Simon Casas pose visiblement question aux magistrats. Les cinq clefs pour comprendre.
1. Nîmes, ville d’exception
Demandée par les citoyens, l’enquête de la Chambre régionale des comptes s’est concentrée sur l’équilibre financier de l’organisation des spectacles taurins. L’Occitanie occupe une place importante dans la tauromachie espagnole : sur 52 villes accueillant des corridas ou des novilladas, 21 sont situées dans notre région. Les gendarmes des finances publiques ont contrôlé spécifiquement six communes occitanes, dont trois dans le Gard : Nîmes, Saint-Gilles et Bellegarde.
En moyenne, les acteurs publics apportent une aide, financière et logistique, d’environ 19 000 €. « C’est quelque chose qui n’est pas très important », commente la présidente de la Chambre, Valérie Renet. Les raisons de ce (léger) déficit ? « Les charges de spectacle (cachets des toreros et achat de toros) en hausse et, a contrario, la fréquentation assez faible de ces spectacles », pointe la Chambre. La ville de Saint-Gilles a pris la décision de porter sa participation à 60 000 € contre 35 000 € pour assurer la pérennité de ses spectacles. Seule commune à sortir du lot : Nîmes, qui enregistre, elle, un bénéfice de 24 000 €.
2. Le « vrai » coût des corridas
La Chambre régionale des comptes attire l’attention sur le « coût réel » des corridas. Au-delà du paiement des toreros, « la corrida n’existe pas sans arène, ni la feria. » Et d'illustrer : « Il y a 20 fois plus de monde dans les rues à Nîmes pendant la feria que dans les arènes. » Du coup, les magistrats ont répertorié les frais d’entretien des infrastructures dans lesquelles se déroulent les corridas. À Bellegarde, « le coût avoisine les 5 000 € par an, sur la période contrôlée, pour des arènes de 1 000 places ».
À Nîmes, les coûts sont plus élevés, certes. Les arènes de Nîmes sont classées aux monuments historiques. La municipalité débourse donc 3 M€ par an en investissement et 600 000 € en fonctionnement. Toutefois, ces sommes ne sont pas intégralement à la charge des communes. D’autres recettes, comme les subventions des collectivités et des redevances d’autres occupants (la Semaine romaine, les visites culturelles, les concerts…), permettent de compenser ces dépenses. Une « diversification des activités », qui fait du bien aux finances de la ville.
3. Achat de places : coup de frein des collectivités
« Le nombre de places achetées par les collectivités est en diminution », constate la présidente. Le conseil régional a arrêté, en 2023, la location d’une loge à 8 500 €. L’achat de places reste néanmoins « une pratique courante pour les partenaires institutionnels qui ont toujours acheté des places de spectacle dans différents spectacles, culturels ou sportifs. Ça fait partie de leur activité de représentation. » Plus largement, le public reste « des seniors de plus de 50 ans, originaires de la région ». Et aux magistrats de relever : « Les organisateurs essaient d’avoir une politique tarifaire plus attractive pour les jeunes. »
4. Cachet « moyen » d’un torero : 47 754 €
Selon la Chambre, l’organisateur d’une corrida rémunère la prestation complète d'un torero 47 754 € en moyenne. À Nîmes, arène de première catégorie, la moyenne n'est pas vraiment représentative : « Les amplitudes sont importantes, selon la réputation du torero, confirmé ou débutant. À Saint-Gilles, ces amplitudes sont plus faibles. » Les bénéfices des organisateurs étant faibles, il est légitime de s’interroger sur l’équilibre économique des sociétés. D'ailleurs, « certaines font faillite, comme on l’a vu à Béziers », relève la présidente. Pour autant, Simon Casas & Co reste un acteur majeur de l'univers taurin. Ce dernier aurait justifié que sa présence dans d’autres pays, comme l’Espagne, « permet d’équilibrer les résultats ».
5. Le cas « Casas » à Nîmes
En juin, l’entreprise de Simon Casas & Co a été visée par une enquête préliminaire pour fraude fiscale et abus de biens sociaux. La Chambre régionale des comptes a-t-elle alerté le procureur de Nîmes ? « On ne communique jamais sur les transmissions à l’autorité judiciaire », lâche la présidente. Le problème concernerait encore une fois le taux de TVA. Les magistrats rappellent : « En 2019, le Conseil d'État a indiqué que les spectacles avec mise à mort du taureau ne peuvent pas être assimilés à un spectacle de variété. » Conséquence : il est impossible de leur appliquer un taux de TVA réduit. La présidente le reconnaît : « La société de Simon Casas s’y est pliée, sauf pour les corridas à cheval. Voilà ce qu’a pointé notre rapport. »
Enfin, la Chambre a alerté le ministère de la Jeunesse et des Sports sur la formation des jeunes dans les écoles taurines. Il en existe quatre en France, dont une à Nîmes, à raison d'une douzaine d’élèves par établissement. « Contrairement à la course camarguaise, la corrida n’est affiliée à aucune fédération. Du coup, il n’y a pas le même degré de protection avec la vérification des dossiers des personnes qui encadrent les mineurs. C'est un vide juridique auquel le ministère pourra ou non remédier. »