Publié il y a 1 an - Mise à jour le 11.10.2022 - anthony-maurin - 6 min  - vu 529 fois

NÎMES Daniel Villanova : rire anticrise

Avec Molière, Daniel Villanova ne plaisante pas ! Enfin... Daniel Villanova (Photo Daniel Villanova). - Paul-AMOUROUX

Daniel Villanova (Photo Daniel Villanova).

Daniel Villanova, humoriste qui part de l'exceptionnel pour atteindre l'universel, se produira sur la scène de l'Atria le 23 octobre prochain. Avec lui, "Bourougnan speaks Molière" et rend hommage au grand homme dont on célèbre les 400 ans dans une comédie en cinq actes et douze personnages incarnée par Daniel Villanova lui-même.

Objectif Gard : Qui est Daniel Villanova ?

Daniel Villanova : C'est un sujet fort long à expliquer ! C'est un acteur-humoriste qui atteint bientôt sa septième décennie et qui écume le Midi avec ses comédies et les personnages issus de son village imaginaire Bourougnan depuis bien 40 ans.

Le rire, chez vous, est vivace. Comme la notion de territoire et votre fameux village imaginaire Bourougnan !

Oui, mon inspiration est basée sur l'observation et la reconstitution des gens que je connais, des gens du Midi. Je fais des fables humoristiques qui sont comprises par tout le monde, mais qui sont très ancrées. On ne parle bien que de ce qu'on connaît parfaitement. J'essaie de m'adresser à tout le monde en me basant sur ce qui m'entoure, la méridionalité. Elle n'est pas refermée sur elle-même comme une cage et à travers de laquelle nous regardons le monde, non. À partir de ce microcosme j'essaie de parler de tout, Bourougnan a un côté universel, réaliste. Nous ne sommes pas des extraterrestres ! L'universel est forcément ancré.

Daniel Villanova (Photo Daniel Villanova). • Paul-AMOUROUX

Comment trouvez-vous l'Homme aujourd'hui ?

Je ne l'ai ni connu hier, ni avant-hier et je ne sais pas ce qu'il deviendra demain. C'est difficile de parler de l'Homme. Ce que je peux juger, c'est le chemin que prend la société mais est-ce aussi le chemin que prend l'Homme ? Je ne le sais pas. Le domine-t-elle ? Le fait-elle aller dans des voies qui ne sont pas les siennes ? Mais humainement parlant on ne va pas dans le bon sens. L'Homme n'a jamais changé, il recherche le bien-être, il peut se tromper, ou pas. Comme on dit, "a vista de nas" on ne va pas dans un sens fraternel, humain.

Que viennent chercher les spectateurs quand vous êtes sur scène ?

Une espèce de communion dans le rire, d'abord un moment d'oubli de cette société un peu trop égoïste, éclatée et individualiste, de la convivialité, de la fraternité. On se rassemble dans une salle et on communie dans l'union du rire. Ensuite, ils viennent aussi et peut-être pour entendre des points de vues originaux, qu'on n'a pas l'habitude d'entendre. Ils viennent aussi chercher la nostalgie du vocabulaire, même si ce n'est pas l'essentiel du spectacle. Les expressions anciennes ont été broyées par la société de l'hyper technologie.

Molière fête ses 400 ans. Pézenas compte pour vous autant que pour lui ! Vous y êtes né, il y a grandi en tant que créateur.

Il est omniprésent à Pézénas par son histoire car il y a passé plusieurs années alors qu'il était sous la protection du Prince de Conti. Il a marqué la Ville et Pagnol disait que Poquelin était né à Paris mais que Molière était né à Pézénas. Bon, c'est un Marseillais qui a dit ça, mais quand même il y a un fond de vérité. Molière, c'est encore plus dans les circonstances actuelles, un appel à la liberté de penser, d'esprit. La moquerie, le rire qui libère, qui dénonce et énonce des vérités. Ces 400 ans tombent à point nommé, le rire permet de dire des choses, il ne suffit pas de rire bêtement, il faut aller plus loin. Le rire peut avoir une force critique, satirique. Molière, comme d'autres, sont à l'origine de cette ironie bien française mais très humaine. L'amour des gens, mais l'amour de manière sévère tout en étant fraternel.

Vous êtes un des héritiers de cela n'est-ce-pas ?

Tout à fait ! Les humoristes dont je fais partie ont cette manière de dire amicalement à travers le rire, de souligner les choses qui ne vont pas, d'évoquer comment elles pourraient aller mieux. Cet héritage est important et c'est pour cela que j'ai rendu cet hommage, une comédie en cinq actes, en prose et en vers, où on écoute des choses et où l'on s'aperçoit que les gens sont capables de rire aux éclats et dans la foulée d'écouter quelque chose de plus sérieux. Il faut introduire le doute chez le spectateur, la certitude ne nous intéresse pas ! Il faut l'interroger, le faire penser et surtout lui faire confiance. Pour les solutions, ils n'ont pas besoin de nous !

Venons-en au spectacle, comment se déroule-t-il ?

C'est une comédie en cinq actes, avec une partie en vers et un bon moment fait d'alexandrins, une partie où les personnages parlent en prose, comme tous les jours. Je suis seul en scène, j'interprète 12 personnages et nous sommes dans l'esprit d'une comédie moliéresque. Il y a des scènes durant lesquelles j'interprète six personnages ! Le public les connaît mais de nouveaux, comme le maire de Bourougnan où les gendarmes viennent pour la première fois comme le médecin, c'est normal quand on parle de Molière ! Partout, le spectacle fait un triomphe. On y retrouve une gouaille bourougnanaise, villanovesque. Parfois on arrête car les gens n'en peuvent plus.

Ah oui quand même !

C'est le premier spectacle pour lequel spontanément et systématiquement, c'est fou, le public finit debout ! Littéralement, il est levé par ce qu'il vient d'entendre, de vivre. je suis le premier surpris, mais je me suis habitué à voir jaillir ce public de ses sièges pour me signifier qu'il avait trouvé ce qu'il était venu chercher. Il ne s'y attendait peut-être pas.

De quoi parlez-vous durant ce spectacle ?

Nous sommes en 2022, et le gouvernement français impose l'injection d'un produit dont on ne connaît pas la composition et qui va permettre à tout le monde de parler en vers, à la Molière, pendant un an. Dans mon village, il y a une résistance vaccinale ! Une partie de la population trouve le moyen, grâce à un personnage mystérieux dont le surnom est Molière, de parler en vers sans avoir reçu l'injection. C'est un jeu entre alexandrins et prose, le spectacle a de nombreuses facettes, il y a une gaieté enlevée, un dynamisme qui font que le public ne décroche jamais pendant les 1h50. L'intrigue est bien bâtie et amène le spectateur jusqu'à l'expression de son contentement. Il a ri et écouté des choses touchantes sur l'actualité. C'est une comédie débridée avec, par petits moments, un peu de gravité. C'est un spectacle très complet, de loin que le public apprécie le plus de toute ma production.

1h50, cinq actes, douze personnages, des alexandrins et des vers... Dans quel état êtes-vous une fois le rideau tombé et ces remerciements accueillis en bonne et due forme ?

Je suis heureux à vrai dire ! Je suis heureux d'avoir réussi à exprimer des choses importantes pour moi et de trouver le moyen de faire parvenir cela par l'humour et l'empathie au public. Ce que je voulais faire je l'ai réussi avec ce spectacle. Le sujet était délicat, un sujet clivant pour chacun de nous. Il était très difficile d'en parler avec les proches ou les amis sans risquer le dérapage ou la rupture. À travers la comédie je pense y être arrivé. Le spectacle fait parler les gens entre eux, ils viennent me remercier car ils ont débloqué une réflexion bloquée par la peur de choquer. Le rire est un vecteur puissant d'émotion et d'humanité, c'est mon leitmotiv.

Avec ce spectacle vous tournez pas mal, combien de dates ?

Ce spectacle a connu deux périodes. La première, je ne savais pas comment allaient tourner les choses, les villages, les théâtres étaient en sourdine par rapport à leur programmation donc à partir de décembre 2021 j'ai organisé des lectures jouées. Je lisais en interprétant la pièce devant 20 ou 60 personnes. J'ai créé le vrai spectacle en juillet dernier à l'Illustre théâtre de Pézenas donc en tout nous en sommes à une quarantaine de dates. Je vais terminer à l'Opéra comédie de Montpellier. J'aime construire des spectacles qui peuvent s'adapter à tous les lieux. Je n'ai ni décors ni costumes. Si j'ai des moyens techniques je les utilise mais si je n'en ai pas je fais avec quatre bouts de ficelle. L'important, au théâtre, c'est l'acteur, le texte et le public !

Carte blanche à Daniel Villanova !

Étant dans le contexte actuel, pour moi, ce qui m'importe c'est l'indépendance. Je n'exprime que mon point de vue et d'autres peuvent le voir autrement, mais j'attache beaucoup d'importance à l'indépendance d'esprit de l'artiste et à sa liberté de parole. C'est de plus en plus important. J'aime cette indépendance, cette souplesse, cette disponibilité qui me permet de rencontrer des publics nombreux et variés. Dans mon public, il y a les amoureux du théâtre et des grandes scènes, mais il y a aussi, les maçons, les viticulteurs, les bouchers... Ils ne vont jamais au théâtre mais ils sortent quand je suis là. Ils n'y retournent pas après mais ils sont là, tous ensemble ! J'ai la chance d'avoir un public de générations et d'origines sociales diverses, c'est ce qui m'intéresse mais il ne faut pas que je me trompe. Je ne dois pas les prendre pour des imbéciles, je dois être honnête de manière à ce que chacun puisse avoir l'impression d'être un peu tiré vers le haut de manière sensible et compréhensible.

Pour plus d'information et pour acheter vos places, c'est par ici !

Anthony Maurin

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