GARD Gendarmerie: le meilleur enquêteur part en retraite
Photo Objectif Gard/ Boris De la Cruz. Le célèbre enquêteur Hugo, un chien Saint-Hubert (à droite sur la photo) part à la retraite. Son maître l'adjudant chef Bruno Mourier fera dorénavant équipe avec Jupiter (à gauche photo)
Sa carrière se termine au bout de 7 ans de bons et loyaux services. Sa réputation n'est plus à faire, son seul nom permettait de rassurer les familles qui avaient perdu un proche. C'était l'enquêteur de la dernière chance, celui que l'on appelait à la rescousse à chaque disparition inquiétante. Son flair a permis de retrouver des personnes, des enfants disparus en Corse, dans tout le Sud et jusqu'à Orléans. Hugo a marqué la gendarmerie du Gard. Il nous a réservé une interview exclusive en guise d'au revoir.
Hugo, pourquoi décider de partir à la retraite?
Il est important de partir au sommet de son art. Mon flair est toujours excellent, mais avec l'âge, j'ai bientôt 9 ans, je souffre de rhumatismes et ma vue est défaillante. J'ai décidé avec mon maître adoré l'adjudant chef Bruno Mourier de quitter la scène et de former un petit jeune, il s'appelle Jupiter. Il est encore en formation, mais c'est un cousin à moi, un Saint-Hubert, ça reste en famille c'est important pour moi... J'ai exigé du colonel Lacroix, que ma dynastie règne sur la caserne de Nîmes. Jupiter est un chien formidable, il va devenir très bon, bien qu'il soit encore un peu tendre à mon avis.
En 7 ans d'activité, combien d'opérations avez-vous effectuées ?
Je suis sorti près de 514 fois en opération. Des recherches de personnes qui ont duré parfois quelques minutes, parfois plusieurs jours. J'ai découvert des personnes décédées, mais j'ai aussi retrouvé et sauvé des gens bloqués, blessés. Par exemple, je me souviens bien d'un mamie de 83 ans qui était bloquée depuis 4 jours au fond d'un fossé. Elle ne pouvait pas crier, on ne l'entendait pas, et elle ne pouvait pas bouger. Dès que je suis arrivé dans ce village de l'Aude, j'ai fait 500 mètres vers un centre de vacances où les gens s'éclataient dans une piscine. Près d'elles, personne n'avait vu cette mamie au fond du trou, recouverte de ronces. Elle était vivante.
Vous souvenez vous d'une autre intervention marquante?
En Corse par exemple lorsque j'ai retrouvé un enfant de 3 ans1/2. Je me souviens très bien c'était à Levie en Corse du Sud en juillet 2013. Des jumeaux avaient échappé à la vigilance d'une famille dans une ferme isolée et ils s'étaient perdus dans le maquis. Un enfant a été retrouvé mais l'autre était introuvable. On est venu me chercher à Nîmes en hélicoptère, je suis arrivé par les airs, j'étais attendu comme le Messie. Arrivé sur place j'ai commencé par bouder. Il y avait trop de monde sur place, trop de bruits, je ne pouvais pas travailler. J'ai dit à Bruno (son maître), "on roupille au pied d'un olivier". à 4h du matin, on est parti avec Bruno dans le maquis, on a descendu un ravin. Je me disais qu'on allait retrouver cet enfant mort, et bien non je l'ai aperçu, il a crié "je suis là, je suis là". Il avait perdu ses vêtements, il était griffé partout. Bruno pleurait, emporté par ses émotions. Il a d'ailleurs oublié de me donner ma récompense : une petite balle.
Est-ce que vous réussissez à tous les coups ?
Parfois je pars sur de mauvaises pistes. Lorsque l'on n'a pas été bon, c'est toujours moi qui remonte le moral de Bruno Mourier. Mon maître a parfois du mal à vivre les échecs, je lui répète souvent que l'on fait tout ce que l'on peut. L'échec fait partie aussi de notre vie, de notre métier.
Après tant de recherches, avez-vous reçu des cadeaux, perçu de la gratitude?
Il y a quelques mois je promenais tranquillement au Grau du Roi, lorsqu'un fan a commencé à crier, "c'est Hugo, c'est Hugo..". Un jeune homme se dirigeait vers moi, je me suis dit il veut encore un autographe celui-là. Mais non, il venait me remercier de l'avoir retrouvé il y a quelques années... Il avait fugué lorsqu'il était adolescent et c'est moi qui l'ai retrouvé. Pour une fois que l'on ne me demande pas un autographe, mais que l'on me remercie de vive voix, j'étais très heureux. Je lui ai fait une léchouille.
Puisque vous n'êtes plus chien militaire, où allez vous vivre maintenant et surtout avec qui?
Pendant toutes ces années de service je vivais avec l'adjudant chef Bruno Mourier et sa famille. J'étais disponible 7/7. Et la bonne nouvelle de Noël c'est que le gendarmerie m'a autorisé à rester chez Bruno. Je pourrai veiller sur mon cousin Jupiter, lui donner quelques conseils, lui raconter lors des veillées d'hiver mes grands exploits. En récompense de ma longue carrière, j'ai reçu une médaille et le colonel a promis de boire un coup avec moi.
Boris De la Cruz