ST-ANDRÉ-DE-MAJENCOULES L'apiculteur de Pont-d'Hérault et la municipalité en conflit autour d'un permis de construire
À la sortie de Pont-d'Hérault, sur la route de Valleraugue, "Miel surfin" vend sa production apicole, dans un bâtiment entouré de ruches, bidons de miels et outils nécessaires à la production. Alors qu'il souhaite stocker ces matériaux dans une extension et construire une miellerie, la municipalité refuse. Selon elle, la parcelle est inconstructible. Le tribunal administratif doit trancher, pas avant mi-2025. Trop long pour l'apiculteur, qui a mené ce lundi matin une action de protestation, soutenue par la Confédération paysanne.
Vers 10h15, avec un camion-plateau et un pick-up avec remorque, ils ont investi le parking du château, qui accueille notamment les services de la mairie. Quelques ruches ont été déposées devant l'entrée et sur le parking, tandis que la Confédération paysanne sortait hauts-parleurs, micro et table pour grignoter et boire un coup.
"J'ai déménagé de Roquedur à Pont-d'Hérault en 2021, avec 1 000 ruches. On a demandé un permis pour une extension de hangar et créer une miellerie mais cela nous a été refusé parce qu'on ne serait pas exploitant agricole", explique l'apiculteur Gilles Dupas. "On", c'est lui et sa compagne, Alexandra Gheorghita, qui fait de l'élevage de reines. "La DDTM (direction départementale des territoires et de la mer) nous dit qu'elle n'a pas reçu notre dossier. Le maire habite juste au-dessus de chez nous. Je pense que le problème vient de là", accuse Gilles Dupas.
Deux requêtes devant le tribunal administratif
La commune est soumise à la carte communale, en matière d'urbanisme. L'article L 124-2, du code de l'urbanisme, stipule : "Les cartes communales délimitent les secteurs où les constructions sont autorisées et les secteurs où les constructions ne sont pas admises, à l'exception du changement de destination, de la réfection ou de l'extension de construction existantes ou des constructions et installatons nécessaires à des équipements collectifs, à l'exploitation agricole ou forestière et à la mise en valeur des ressources naturelles." Pour une activité agricole donc, il semble n'y avoir aucune barrière réglementaire à la construction.
Sauf que... La requête introductive d'instance devant le tribunal administratif de Nîmes, déposée par Gilles Dupas, reprend les termes du refus municipal. "Le projet méconnaîtrait les dispositions de l'article L 161-4 du code de l'urbanisme en ce qu'il ne correspondrait à aucune des exceptions autorisées en dehors du périmètre de la carte communale. En effet, la commune considère que "les éléments du dossier n'apportent pas la démonstration de la réalité et du caractère significatif de l'exploitation agricole existante, ni de la nécessité fonctionnelle du projet pour les besoins liés à cette exploitation". La mairie excluerait ainsi l'activité apicole du champ agricole, ou l'estimerait insuffisamment caractérisée, alors que Gilles Dupas cotise à la MSA et est soutenu par la Chambre d'agriculture du Gard, en plus du syndicat Confédération paysanne.
Autre sujet, la création d'un accès à l'arrière de la miellerie, sur la départementale 986. "Le gestionnaire de la voirie n'autorise pas le nouvel accès", écrit la commune. Gilles Dupas affirme, lui, que l'Unité territoriale des routes a validé cette sortie mais que la commune serait propriétaire de quelques mètres, ce qui bloquerait la légitimation de l'accès déjà existant. Enfin, la municpalité reproche également à l'exploitation d'avoir effectué un décaissement du sol de plus de deux mètres, quand Gilles Dupas soutient qu'il ne faisait qu'1,54m, au plus profond, et n'était donc pas soumis à autorisation.
"M. Dupas avait été renseigné de la non-constructibilité à proximité du cimetière"
Christophe Boisson, maire de Saint-André-de-Majencoules
À Pont-d'Hérault, Gilles Dupas démontre, à la vue de matériel entreposé à l'extérieur, que c'est insuffisant pour son activité. "Ici, il fait chaud, on a besoin de lieu de stockage. Cet été, on a perdu 17 fûts de 300 kilos de miel. On demande une extension de 90 m2. Si on attend le tribunal administratif, l'audience n'aura sans doute pas lieu avant juin 2025, trop tard pour passer l'été. On perd de la marchandise !"
Le maire, Christophe Boisson, est sorti de la mairie, ce lundi matin, au-devant des manifestants, mais sans avoir le temps de les recevoir. Après un court échange, un peu tendu mais cordial, il a accepté de caler un rendez-vous ce jeudi avec deux représentants de la Confédération paysanne, pour jouer les médiateurs sur ce dossier. "La procédure est en cours, je ne veux pas dire quoi que ce soit et s'il se plaint d'une décision tardive, sachez que les contentieux ont été déposés par M. Dupas, a expliqué Christophe Boisson dans une courte conférence de presse improvisée. On a effectivement répondu par la négative à la demande de permis de construire. M. Dupas avait été renseigné de la non-constructibilité à proximité du cimetière." Le maire de Saint-André-de-Majencoules évoque une distance minimale de 100 mètres, Gilles Dupas affirme qu'elle serait de 13 mètres. Une différence qui changerait tout, le cimetière étant séparé de l'exploitation par un chemin.
Enfin, Christophe Boisson rejette l'intérêt personnel qu'il aurait à refuser un permis au bas de sa propre maison. Tout en blâmant la "déchèterie" que représente, à ses yeux, les pourtours de la miellerie actuelle et la nécessité pour l'exploitant de refaire son toit. Gilles Dupas plaide lui, justement, le besoin de stocker les outils nécessaires à sa production dans un hangar, hors de la vue des passants et voisins. Et espère dans une résolution à l'amiable de ce qui handicape actuellement son activité professionnelle.