Publié il y a 5 ans - Mise à jour le 15.07.2018 - thierry-allard - 4 min  - vu 4799 fois

POLITIQUE Les débuts de… Jean-Luc Chapon

L’entrée en politique de nos élus éclaire sur leur façon d’exercer le pouvoir et laisse parfois présager de leur avenir.
Le maire d'Uzès et président de la CCPU Jean-Luc Chapon (Photo d'archives : Thierry Allard / Objectif Gard)

Indéboulonnable maire d’Uzès depuis 36 ans, Jean-Luc Chapon revient sur sa longue et riche carrière, lui qui a attrapé le virus politique de son père.

Né en janvier 1942 à Alès, Jean-Luc Chapon baigne très vite dans la politique et l’associatif. « Mon père était conseiller général et président de plusieurs associations à Alès », pose-t-il. Après ses études au lycée Jean-Baptiste Dumas, chez les frères Maristes à Aubenas, puis au lycée Gide d’Uzès, il réussit un concours de la fonction publique mais ne désirant pas quitter le Gard pour Paris, il devient brièvement représentant en machines à écrire et machines comptables.

Il monte son auto-école en 1966 à seulement 24 ans et vient s’installer à Uzès, jugeant la ville propice au développement de son entreprise. Les affaires marchent : il crée deux portefeuilles d’assurance et se diversifie dans la location de voitures et finira en 1978 par compter 55 salariés et quatre implantations sur des circuits prestigieux comme Magny-Cours.

« Je serre la main du maire et je lui dit qu’en 1983 je gagnerais les municipales »

La politique se rapproche et comme souvent, elle part de l’associatif. Jean-Luc Chapon devient président des auto-écoles du Gard et participe au bureau national du syndicat avant- de prendre la présidence du club de football d’Uzès, qu’il mènera jusqu’à la 4e division nationale. La politique arrive en 1979, à la faveur des élections cantonales. « Je me suis présenté à la demande du député Jean Poudevigne (UDF, soutien de Valéry Giscard-d’Estaing). On a décidé ça quinze jours avant les élections », raconte-t-il. Difficile dans ces conditions d’être élu et Jean-Luc Chapon perd logiquement son premier scrutin.

Il lui permet cependant de prendre date : « en 1981, quand Mitterrand est élu, pour plaisanter je serre la main du maire de l’époque (André Rancel, ndlr) et je lui dis qu’en 1983 je gagnerai les municipales », relate celui qui n’est donc pas encore élu mais qui a déjà compris une chose : à savoir que « les gens sont habitués à voter contre le gouvernement aux élections locales. »

Effectivement, deux ans plus tard il vire en tête au premier tour des municipales et dans la nuit son équipe passe un accord avec deux autres listes. Il devient maire de sa ville d’adoption à 41 ans. « Le soir de mon élection, je me suis promené dans Uzès une partie de la nuit et je me suis dit : "mon vieux, tu n’es pas sorti de l’auberge !’"»

C’est qu’à l’époque, Uzès est loin d’être l’écrin touristique actuel. « La ville tombait en ruine, tout restait à faire », estime Jean-Luc Chapon, tout en dégonflant la légende qui veut qu’il a été élu parce que son prédécesseur a eu la bonne idée de passer au stationnement payant avant l’élection. « Oui, il avait mis des parcmètres, mais on ne gagne pas une élection avec des parcmètres. C’est un tout, la politique menée n’était pas la bonne. C’était désolant. »

« Uzès a été un challenge, mais ce n’est pas acquis »

Jean-Luc Chapon prend alors conscience qu’Uzès va demander la majeure partie de son temps et ses affaires souffrent, comme il l’admet 36 ans après. Qu’à cela ne tienne, le nouveau maire décide de donner la priorité à la politique et en 1985 il devient conseiller général. Et ce pour trois mandats d’affilée, « dont une fois où je suis passé à une voix. On a dû revoter et j’ai gagné avec 580 voix d’écart », précise-t-il. Un avertissement sans frais pour ce scrutin. Galvanisé par ses soutiens qui lui affirmaient qu’il n’avait plus besoin de faire campagne pour être élu, il a bien failli perdre son mandat avant de reprendre ses habitudes pour le deuxième vote et de l’emporter.

À Uzès, il crée des zones commerciales, piétonnise le centre-ville qu’il fait paver sans aucune subvention (« on ne vous en donne pas pour paver une rue, même si vous refaites les réseaux », précise-t-il), instaure le marché du mercredi, construit des logements sociaux « pour dégager le coeur de ville », construit un parking sous-terrain… « Uzès a été un challenge. Mais ce n’est pas acquis. Il faut surveiller tous les jours », tempère-t-il. Uzès, sa ville où il revient toujours et qu’il veut toujours plus belle, lui qui a vu, dans les années 1960-70, le centre-ville d’Alès détruit, laissant la place à une architecture plus moderne. « Ça m’a frappé », explique-t-il. Alors à Uzès, hors de question d’utiliser les mêmes méthodes, même si le patrimoine bâti avait parfois été laissé dans un état préoccupant et les tours, la mairie ou encore l’ancien évêché sont restaurés.

« Tant que j’ai l’énergie, ça va »

Pendant ce temps, il prend la présidence d’une association de santé mentale gérant 150 majeurs protégés, puis de l’UDF du Gard, puis du Parti radical valoisien départemental dont il intègre le bureau national. Puis fonde l’Association des villes à secteur sauvegardé du Languedoc-Roussillon. En 2002, il devient président de la Communauté de communes de l’Uzège, puis en 2012 de la communauté de communes du Pays d’Uzès, tout en étant systématiquement réélu maire d’Uzès, les trois dernières fois dès le premier tour, la dernière, an 2014, à 72 printemps.

Alors, usé Jean-Luc Chapon ? « C’est une passion et un sacerdoce car ça bouffe tout votre temps et votre énergie, reconnaît-il. Il faut aimer les gens et il faut que le conjoint suive, sinon vous ne pouvez pas avancer. » À 76 ans, Jean-Luc Chapon n’est pas encore décidé à raccrocher même si celles et ceux qui veulent prendre sa place sont nombreux. « Ça fait longtemps que d’autres veulent la place, et je les comprends. Mais je ne crois pas qu’ils arriveront à la prendre en 2020 », lâche-t-il, avant de préciser : « tant que j’ai l’énergie, ça va. »

Thierry ALLARD

thierry.allard@objectifgard.com

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