Publié il y a 5 ans - Mise à jour le 05.10.2018 - thierry-allard - 2 min  - vu 1212 fois

LE 7H50 d’Hocine Louanchi : « les camps de Harkis, c’était l’univers carcéral »

Le président de la Confédération française des musulmans rapatriés d’Algérie, Hocine Louanchi, réagit à la décision du Conseil d’État tombée cette semaine de condamner l’État à indemniser le fils d’un Harki pour les conditions jugées « indignes » réservées aux Harkis à leur retour dans l’Hexagone.
Hocine Louanchi, un des meneurs de la révolte de 1975, combat toujours pour la cause des Harkis (Photo d'archives : Thierry Allard / Objectif Gard)

Et si pour l’Arlésien, qui a vécu dans les camps de Rivesaltes (Pyrénées-Orientales) et de Saint-Maurice-l’Ardoise, à Saint-Laurent-des-Arbres, le combat pour la reconnaissance et l’indemnisation des Harkis se poursuit, la décision du Conseil d’État n’en est pas moins « historique » et constitue une avancée.

Objectif Gard : cette décision du Conseil d’État de condamner l’État à verser 15 000 euros à un fils de Harki pour « préjudices matériels et moraux » subis dans les camps de transit et de reclassement est-elle historique ?

Hocine Louanchi : oui, c’est une décision historique. C’est la première fois que l’État est condamné par le Conseil d’État qui reconnait le vécu traumatisant des camps. D’abord il y a eu un déficit scolaire. Me concernant, j’étais à l’école à Rivesaltes et à Saint-Maurice et j’ai simplement un niveau CM1. Je suis arrivé à m’insérer car j’étais bon en sport. Je suis rentré à l’hôpital où j’ai fait une carrière d’aide-soignant alors que j’aurais pu devenir infirmier ou psychiatre. Nous avons eu un handicap terrible à l’école, qui se trouvait dans le camp. On avait vue sur des barbelés. Et encore, grâce à mon niveau en sport, je sortais et je voyais autre chose. Les autres, leur univers ce n’était que le camp. Quand ils en sont sortis, ça a été dur pour eux de s’insérer.

15 000 euros, est-ce suffisant ?

Non, non. C’est un départ. Une proposition de loi chiffrait à 100 000 euros pour les parents Harkis et 30 000 pour les enfants. Ce qui représente un budget de cinq milliards d’euros. Je rappelle que Macron a donné 25 milliards aux riches, et qu’en 1962, le budget pour les rapatriés était de 5 % du budget de l’État. Ceux qui sont arrivés après n’ont rien eu et ont subi de nombreuses souffrances. Ces camps, c’était l’univers carcéral. Jusqu’en 1975, les Harkis ont été traités comme des Français de seconde zone.

Et les 40 millions sur 4 ans annoncées par le président Emmanuel Macron ?

Ce n’est pas sérieux, c’est un coup de communication ! L’argent existait déjà. C’était le complément de retraite des anciens qui avaient de faibles ressources. Cette mesure existe depuis Martine Aubry.

Quelles suites voyez-vous à cette décision du Conseil d’État ? Ça ouvre la voie ?

Oui, je pense que les politiques, tôt ou tard, vont passer à une loi pour réparer et tourner la page sans la déchirer. Le vécu des camps, il faut le réparer. Je pense qu’il y a une prise de conscience et qu’on va vers une réparation.

Et la remise de la Légion d’honneur à plusieurs Harkis ?

La Légion d’honneur c’est bien, mais on est toujours refoulés quand on arrive en Algérie. La guerre, cinquante ans après, elle continue. À un moment, il faut avancer.

Propos recueillis par Thierry Allard

Thierry Allard

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