Publié il y a 4 ans - Mise à jour le 06.03.2020 - anthony-maurin - 5 min  - vu 5031 fois

NÎMES Gens du voyage, entreprises et politiques se font face au Mas des Rosiers

Photo d'illustration (Photo Archives Anthony Maurin)

Mas des Rosiers devant l'ancienne Maison de la literie (Photo Anthony Maurin).

Selon la légende, les gens du voyage sont ceux qui font tourner la Terre. Pour d'autres ils font tourner la tête et pour certains encore, ils font tourner ce qu'ils dérobent sur leur passage. Quoi qu'il en soit, Nîmes connaît depuis quelques temps une situation délicate qui oppose gens du voyage et propriétaires de sociétés d'une zone commerciale.

C'est au Mas des Rosiers, face au Marché gare, au bout de la route de Montpellier et à la sortie de Nîmes, que le problème est né, encore une fois. La ZAC, et ces parcelles considérées comme privées et dont la gestion est attribuée à Nîmes métropole, a vu de grosses enseignes baisser le rideau. On pense notamment à Tati, à la Maison de la literie et à Ueda mais le fond de la ZAC est extrêmement sinistré.

Depuis, la loi qui y règne est aléatoire et n'a rien à voir avec celle de la République. Le stationnement est bien souvent anarchique, les voitures louches sont légion et depuis la fin de l'année dernière, des caravanes sont venues se positionner sur les parkings du côté droit de la zone.

Un peu plus loin dans la ZAC (Photo Anthony Maurin).

Au milieu du campement de fortune, une femme sort tranquillement et avoue. " Nous nous sommes mis ici car le terrain, l'aire d'accueil, est fermée. En tout cas, l'accès est bloqué et on n'a pas pu y entrer mais nous voyons qu'il y a déjà des caravanes sur place. Ici, les terrains, c'est constamment un problème, on nous dit qu'il y a des travaux sur l'aire d'accueil mais j'en doute... "

Une aire d'accueil digne de ce nom ?

Les caravanes se sont étalées sur des parkings dont les accès étaient bloqués pour éviter, justement, que les gens du voyage viennent s'y poser. Malgré ces précautions, pourquoi sont-ils tout de même en place ? " Il faudrait une capacité plus importante d'une quarantaine ou cinquantaine de stationnements pour caravanes ! On nous dit qu'il y a des travaux depuis un an mais ce sont des menteurs ! Nous, nous n'aimons pas être là, sur un parking, au milieu de ces bâtiments... ", lance un autre pensionnaire des lieux.

L'aire d'accueil de Nîmes, dont la compétence est acquise à Nîmes métropole, a fermé en juillet 2019 pour quelques mois de travaux de réhabilitation. Rien ne semble avoir été fait pour compenser les places d'accueil depuis cette date.

Aux abords de l'ancien Tati (Photo Anthony Maurin).

Et la femme de reprendre : " Tous les jours la police vient nous voir et prend nos immatriculations. Ils font leur travail et ils ne sont pas méchants. Je les comprends mais comprenez-nous aussi. Nous sommes des gitans, des tziganes français, et on aimerait bien s'installer ailleurs qu'ici car il n'y a ni toilettes ni de douches et ça fait quatre mois que ça dure... Qu'on nous laisse en paix ! "

Étonnée de la situation, elle affirme être soucieuse d'autre chose. Des dégradations ont été commises depuis les fermetures de certaines grandes enseignes. En pointant du doigt Tati, elle dit : " On va nous faire porter le chapeau ! Le propriétaire est à Paris mais quand il va venir et voir ce qu'il y a à l'intérieur il risque d'être surpris. Ça a été squatté après la fermeture... "

Le passage a été ouvert (Photo Anthony Maurin).

Mais le problème est encore plus dense quand on sait que parmi ces caravanes installées, on trouve deux typologies de familles. " Eux (les plus proches de la route de Montpellier, NDLR), se sont des voyageurs et nous des Roms. Nous sommes arrivés là avant eux mais nous sommes ici pour les mêmes raisons qu'eux. Nous ne nous parlons pas. Nous restons chacun de notre côté de la zone sans avoir d'échanges. "

Des frais de nettoyage supplémentaires

De l'autre côté de la barrière, les chefs d'entreprise de la ZAC. " Ces caravanes se sont mises ici sans demander quoi que ce soit. Ces gens ont tout cassé, se sont frayés un passage et depuis, c'est le bordel. On voit passer de drôles de choses. Des gens viennent dans nos locaux pour regarder ce que nous avons à l'intérieur et nous ne sommes pas rassurés ", avoue timidement au téléphone l'un d'entre eux.

Direction l'aire d'accueil qui a des problèmes de travaux... (Photo Anthony Maurin).

Pour un autre, " déjà que cette zone n'était franchement plus attractive pour nos clients, avec les caravanes, la saleté et le désordre régnant, ça n'arrange pas la sinistrose locale ! En même temps, l'Agglo refait trottoirs et voirie donc ça fait un peu bizarre... "

En effet, l'Agglo fait le job. Ses équipes sont bien sur le terrain et échangent avec les entreprises tout en les incitant à porter plainte. Nîmes métropole a mis à disposition quatre conteneurs de 660 litres pour alléger la dispersion des déchets et a débauché la société de nettoyage Océan pour deux prestations supplémentaires (pour un coût d'au moins 2 500 euros, NDLR ). L'agglo a déposé une plainte au motif de "trouble à l'ordre public" et a demandé une réunion en préfecture qui se serait déroulée jeudi 5 mars dernier, en soirée.

En effet, les gens du voyage ne peuvent pas accéder à l'aire d'accueil située à Saint-Césaire (Photo Anthony Maurin).

" J'ai une flotte de véhicules au Mas des Rosiers et nous avons eu des vols de batterie sur nos poids lourds, explique un responsable d'agence d'une société de transport. Un salarié a eu droit à un jet de parpaing sur son véhicule... Nous travaillons 7j/7j dans le secteur de la santé et des déchets infectieux... Ce n'est pas le moment d'avoir du retard ! "

La peur aux tripes

Et le même de reprendre : " La nuit, nous sommes confrontés à des personnes qui ne nous blessent pas mais jusqu'à quand ? La situation est compliquée. Mon groupe s'inquiète pour la sécurité de nos salariés. C'est le plus important et nous risquons de déménager à cause de cela. Pourtant, cette zone est stratégiquement très bien située pour nous. Nous sommes inquiets. "

Retour au Mas des Rosiers (Photo Anthony Maurin).

Après une entrevue avec le maire de Nîmes, Jean-Paul Fournier, qui a botté en touche en direction de l'Agglo gérée par Yvan Lachaud, le responsable en question est en train de rédiger une plainte qui viendra s'ajouter à celle plus collective qui sera déposée. " Nous devons faire une plainte collective avec les copropriétaires et les locataires. " La préfecture aura-t-elle la solution au problème ? En tout cas le préfet est allé sur le site.Et Nîmes Métropole aussi. À deux reprises même et a encouragé les chefs d'entreprise à déposer une plainte collective.

"Nous avons pris nos responsabilités et même au-delà", explique Yvan Lachaud contacté par notre rédaction. On a discuté, fait un état des lieux sur place, porté plainte au nom de la collectivité. Et j'ai appelé le préfet et nous avons rapidement organisé une réunion en préfecture. Maintenant, la balle est dans le camp de l'État et de la justice. J'espère que les choses vont rapidement rentrer dans l'ordre."

Le maire de Nîmes, qui lui a répondu par courrier au président de l'Agglo, assure que si la situation le nécessite il fera respecter l'ordre public. Il faut dire qu'on parle ni plus ni moins de carabines et de fusils exhibés, de piratage d'électricité et d'eau, de jets de pierres sur des véhicules, de destruction de boites aux lettres, de vol avec effraction, de racket sur clientèle, de vol de véhicule, d'agressions...

Anthony Maurin

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