CONFINEMENT JOUR 1 Recommandation culturelle : « La conjuration des imbéciles » de John Kennedy Toole
Puisqu’il faut rester chez soi, en confinement, pour endiguer l’épidémie de coronavirus, Objectif Gard a décidé de vous aider à rendre cette période, qui va faire de nous des casaniers forcés, un peu plus supportable. Nous vous proposerons donc, tous les soirs à 17 heures, une recommandation culturelle qui n’implique pas de sortir de votre salon. Un livre pour démarrer, et non des moindres : La Conjuration des imbéciles, de John Kennedy Toole (éd. 10-18).
Pour parler confinement, qui de mieux qu’Ignatius, le « héros » de ce chef d’oeuvre de la littérature américaine ? À trente ans passés, l’homme à l’épaisse silhouette et à l’inamovible casquette de chasseur vit encore chez son acariâtre mère à la Nouvelle-Orléans, cloîtré dans sa chambre où il pratique avec assiduité l’onanisme et l’écriture d’un ouvrage qu’il considère comme un chef-d’oeuvre.
Seulement voilà : le foyer bat de l’aile, et les comptes sont dans le rouge. Sa mère lui ordonne de trouver un travail, et voici notre héros lancé dans une quête qui le verra occuper des petits boulots prétextes à de grandes péripéties. Le tout avec une galerie de personnages hétéroclite, d’Ignatius et sa mère à Gus Lévy, patron d’une fabrique de blue-jeans au bord du divorce, en passant par la complètement barrée Myrna Minkoff, peut-être la seule amie de notre héros.
Ignatius est un héros inclassable, incompris, à l’étroit autant dans sa chambre que dans son époque. Un isolement qu’il combat avec un humour désespéré mais irrésistible et un sens de la désobéissance devant l’autorité qui confine à l’anarchisme. Un personnage complexe et terriblement attachant, comme très peu dans la littérature moderne.
Un roman précurseur et maudit
La Conjuration des imbéciles n’est pas qu’un excellent roman, dont les 534 pages se lisent avec délectation et sans aucune difficulté, c’est aussi un roman précurseur et maudit. Écrit dans les années 1960, il présente un style cinématographique avant-gardiste pour son époque. Trop : malgré ses efforts, Toole ne parvient pas à le faire publier. Il se suicide de dépit le 26 mars 1969 à l’âge de 31 ans seulement.
Finalement, c’est sa mère qui parviendra à faire publier cet ouvrage. Ne ménageant pas ses efforts, elle réussit à faire lire le manuscrit à l’écrivain à succès Walker Percy en 1976. Celui-ci comprend dès les premières pages qu’il a affaire à un chef-d’oeuvre et convainc son éditeur de le publier en 1980.
Depuis, La Conjuration des imbéciles a été traduit en dix-huit langues et s’est écoulé à plus d’un million et demi d’exemplaires. On ne saurait trop conseiller de vous en procurer un. Le site des Librairies indépendantes sera votre allié, pour une dizaine d’euros chez l’éditeur 10-18.
Thierry ALLARD
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