Publié il y a 3 ans - Mise à jour le 16.10.2021 - coralie-mollaret - 4 min  - vu 6715 fois

FAIT DU JOUR À Nîmes, l'opération séduction d'Éric Zemmour passée au crible

Éric Zemmour, un candidat à la Présidentielle qui ne dit pas son nom (Photo : Boris Boutet)

Immigration, identité française, formation des professeurs…  L’essayiste a décliné ses idées fortes devant un parterre de 1 200 personnes avant de dédicacer son dernier livre. Un meeting politique et une campagne présidentielle qui ne disent pas leur nom. 

Éric Zemmour, pas encore candidat à l’élection présidentielle ? Ah bon ? Ce soir au Grand Hôtel de Nîmes, ses partisans en ont décidé autrement, clamant « Zemmour, président ! Zemmour, président ! » Pour plusieurs des spectateurs, notamment des jeunes, « il y a une ferveur que l’on ne retrouve pas ailleurs ». Officiellement, l’essayiste identitaire est venue à Nîmes promouvoir son dernier bouquin "La France n’a pas dit son dernier mot". Officieusement, sa tournée s'apparente volontiers à un meeting politique avec une flopée de t-shirts floqués "Zemmour 2022". 

Une opération-séduction bien rodée

Toulon, Nice, Ajaccio, Paris et Lille... À Nîmes, Éric Zemmour n'en est pas à son coup d'essai. Son opération séduction est bien rodée. Dans une salle comble, les spectateurs attendent la star de la soirée. Les langues se délient. Christophe, marié et père de trois enfants, explique pourquoi il a succombé au charme Zemmour : « C’est une personne nouvelle qui ne s’est jamais reniée. Les autres politiques nous ont trahis ! On ne le sent pas tenu par un discours politique. » Le politiquement correct n'est en effet pas la tasse de thé d'Éric Zemmour, condamné par la justice pour avoir comparé les djellabas aux « uniformes des armées d’occupation ». 

Nouveau et en dehors des partis, l'homme des médias est-il en train de réussir une OPA sur la Droite et son extrême, comme Emmanuel Macron en 2017 avec les partis traditionnels ? La mayonnaise Zemmour ne tient pas uniquement sur la forme. Christophe nous confie sa peur d’une « immigration qui empêche les femmes de se balader le soir sur le boulevard Gambetta. Si on continue comme ça, on perdra tous nos droits ! » Et d'ajouter : « J’ai déjà été victime d’une agression verbale dans un quartier. » D’un cas particulier est-il fait une généralité ? En tous cas, cette peur trouve refuge chez Éric Zemmour.

(Photo :Boris Boutet)

Sur scène, le polémiste abonde, évoquant l’assassinat du professeur Samuel Paty. Habille, l'homme des médias paraît calme, accessible. Il réserve ses excès au fond de son propos : « La France multiculturelle et islamique est un cauchemar ! » Un oxymore à lui seul. « On parle enfin politique ! », se réjouit Lucien qui, avec sa femme, n’a pas voté à la dernière Présidentielle. Éric Zemmour, c'est aussi pléthore de références historiques qui font mouche auprès de ses fans sexagénaires. Originaire de Marseille, Jean n’en espérait pas moins : « Il a commencé par citer Henry IV, forcément moi qui suis royaliste ça me séduit ! »

Comme Christian, une partie de ses partisans se sentent « reconnus » dans l'identité française définie par l'essayiste. Un autre spectateur, plus proche du Rassemblement national balance : « Moi, j’ai eu l’impression d’assister à un cours d’histoire et de littérature ! Mais il a quand même du bagout. » À la fin de son discours, Éric Zemmour se prête à un jeu de questions/réponses.  Ses partisans se sentent pris en considération. L’opération-séduction marche à fond. Micro en main, un élu interroge : « On nous demande des permis de construire pour des mosquées. On a un système urbanistique qui nous contraint à les accorder ! » 

Zemmour, nouveau souffle pour l'Extrême-Droite ?

Éric Zemmour là-aussi abonde : « Depuis 10 ans, il y a une floraison de mosquées. On doit être à 2 000 en France. Ce qui prouve l’explosion de la population musulmane ! » Et de renchérir : « Beaucoup d’élus de Droite comme de Gauche, par clientélisme, ne respectent pas la loi ». Tous les ingrédients du meeting politique sont rassemblés. Des enceintes ont même été installées à l’extérieur pour ceux qui ne pouvaient pas rentrer faute de place. Au fond de la salle, l'ex-adjoint au maire de Nîmes, Marc Taulelle, se frotte les mains. Le nouveau référent d'Éric Zemmour dans le Gard ne regrette pas son soutien qui l'a mené à son éviction de la majorité municipale comme il l’indique dans la vidéo suivante :

Certains partisans interrogent alors sur la politique économique, sur la formation des professeurs. Comme à chaque fois dans ses réunions publiques, l'intéressé rebondit  : « Avec l’Europe, la France dit oui à tout, même quand ça va contre son intérêt. Il faut arrêter ce masochisme français ! » Sur les enseignants : « Il faut changer la formation des professeurs en supprimant les centres actuels. » À la fin de la soirée, un dernier spectateur, malicieux, lance : « Dites-nous pour qui nous devrions voter à la Présidentielle ? » Tout aussi malin, Éric Zemmour rétorque : « On va laisser la salle répondre à ma place ! » Sans surprise, ses partisans hurlent son nom.

La scène se déroule sous l’œil attentif de Gilbert Collard. Le député européen proche de Marine Le Pen et ami d’Éric Zemmour est venu ce soir « créer des ponts » entre les deux candidats d’extrême-Droite. Au lieu d'être le fossoyeur de Marine Le Pen, Zemmour pourrait-il être plutôt le nouveau souffle de l'extrême-Droite ? C'est ce qu'espère en tout cas une partie des frontistes mais pas seulement... Dans la foule, on a pu observer des militants Debout La France et Les Républicains. Le meeting se termine, le polémiste se prépare alors à la séance de dédicace de son livre, "La France n’a pas dit son dernier mot". Les ventes serviront-elles à financer sa campagne présidentielle ? Prochain meeting, demain à Béziers.

CM

coralie.mollaret@objectifgard.com 

Coralie Mollaret

A la une

Voir Plus

En direct

Voir Plus

Studio