Publié il y a 3 ans - Mise à jour le 30.03.2021 - anthony-maurin - 5 min  - vu 2042 fois

FAIT DU JOUR La Maison carrée sera-t-elle la reine de l'Unesco ?

La rue Auguste et la Maison carrée (Photo Archives Anthony Maurin). - Anthony MAURIN

Mary Bourgade (Photo Anthony Maurin).

Si le maire de Nîmes a célébré cette année ses vingt ans à la tête de la mairie, il y a aussi vingt ans que la cité des Antonin essaie d'intégrer la prestigieuse liste du patrimoine mondial de l'Unesco.

Pour la troisième fois, Nîmes va soumettre un dossier pour être labellisée Unesco. Après la via Domitia, un essai en lien avec le Pont du Gard et l'Antiquité au présent, c'est au tour de la Maison carrée d'être l'égérie de la cité. Mary Bourgade, adjointe déléguée à la Labellisation Unesco et au Patrimoine antique, fait le point sur le dossier nîmois. " Dans le dernier Vivre Nîmes en date, nous avons tenu à parler de la Maison carrée car tout le monde ne connaît pas toujours son histoire. "

Et l'histoire est faite pour évoluer, comme les labellisations. Hélas pour Nîmes ! " Avant, et chaque année, deux dossiers de candidatures étaient retenus par l'État pour être soutenus à l'Unesco. Maintenant, la France ne peut en soutenir qu'un, qu'il soit culturel ou naturel. Ça complique les choses et allonge les délais mais ça permet aussi à d'autres pays d'intégrer les sites labellisés par l'Unesco. La France aide beaucoup les autres nations à y parvenir. " Il est certain que si le patrimoine mondial n'est pas représenté à travers la totalité du globe, ça fausse l'idée que l'on se fait de la chose. Maintenant il faut rattraper des décennies d'européanisme souverain.

La Maison carrée dans les années 1950 (Photo : archives municipales fonds Hervé Collignon).

Mary Bourgade sait que Nîmes a de bonnes chances d'y parvenir malgré les embûches. " L'Unesco considère qu'il y a déjà beaucoup de monuments antiques classés donc après une réunion provoquée par le maire et l'analyse complète de l'Icomos, il est ressorti que la Maison carrée était un édifice exceptionnel dans sa conservation. Il n'en existe que deux dans le monde dont un à Rome.

C'était reparti pour un tour. La Maison carrée s'imposait, majestueusement. "Le fait que nous prenions soin de nos monuments est une bonne chose et tous les Nîmois aiment ce bijou. Nous ne doutons pas de la valeur universelle et exceptionnelle de la Maison carrée mais tout cela se mesure selon dix critères. Nous devons donc le prouver une nouvelle fois, mais c'est un plaisir de le faire ! "

Un dossier de 300 pages

Il faut dire que Nîmes a gagné en expérience au fil des vingt années d'essais. En 2021, l'équipe est meilleure que jamais. "Notre plan de gestion est très bien avancé et nous aidons une ville libanaise qui est un peu en difficulté sur cette question. C'est une coopération décentralisée. Nous en faisons régulièrement comme par exemple en Croatie ou en Tunisie il y a deux ans." Une expertise à la nîmoise qui est forcément positive pour son aura " unescosien ".

Des fouilles devant la Maison carrée le 15 mars 1991 (Photo René André/archives Municipales de Nîmes).

Nîmes se positionne aussi bien sur le respect de son patrimoine et sur les travaux qu'elle engage en sa faveur. "Les monuments doivent être restaurés, protégés. Nous devons penser à nos enfants. Il faut qu'ils puissent connaître ce patrimoine. Nous nous devons de le préserver. C'est la démarche patrimoniale du maire, insiste l'élue. Il nous faut persévérer en cela car les Nîmois sont attachés à la valeur de leur histoire. Notre patrimoine est Nîmois mais il appartiendra aussi au monde entier grâce à l'Unesco. La passion, la patience et la persévérance caractérisent notre démarche. Nous devons déposer notre dossier à la fin de l'année. Il sera en expertise en 2022 et nous serons peut-être inscrits en 2023... Notre dossier fait environ 300 pages !"

Le nécessaire changement

Un gros et beau dossier. Une fabuleuse Maison carrée. Des travaux de restauration patrimoniale bien engagés. Une vision plus épurée. Des abords de sites plus respectueux de ces lieux d'histoire. Voilà la suite des événements. "Le secteur de la Porte de France sera exclusivement piéton et, avec le Palais des congrès, nous poursuivons l'aménagement du secteur. Nous n'oublions pas le castellum aquae qui n'est pas dans la zone tampon du classement à l'Unesco mais sur lequel nous travaillons pour mieux le mettre en valeur, détaille Mary Bourgade. Nous souhaitons le remettre en lien avec Pont du Gard car c'est le dernier morceau de l'aqueduc et qu'il n'en existe que deux dont l'autre est à Pompéi. Pour la Porte Auguste, j'aimerais qu'on ouvre enfin les grilles pour que le public puisse y descendre. À la manière des Jardins de la Fontaine l'accès serait libre la journée. L'intérieur de la Maison carrée sera déposé. Nous allons procéder à des sondages et retrouver les volumes antiques. Nous voulons montrer l'apparence première des murs. Il faut partager tout cela, c'est essentiel et l'Unesco l'apprécie."

La Maison carrée un émerveillement constant... (Photo archives Anthony Maurin).

Le partage. Cette notion a-t-elle fait défaut à Nîmes par le passé ? Peut-être un peu. Ou était-ce un peu trop de discrétion ? Certainement. À l'heure des réseaux sociaux et du flux médiatique, Nîmes devrait s'emparer toujours plus de la question de sa communication. " J'aimerais que les Nîmois s'emparent encore plus de cette aventure. Nous ne communiquons peut-être pas suffisamment mais leur adhésion au projet est importante ! Chaque siècle, les plus grands personnages de l'Histoire de France sont venus jalonner le coeur de Nîmes de leur passage. Nous avons une chance inouïe ! Si les Romains revenaient 2 000 ans après, je pense qu'ils seraient heureux de voir que nous avons respecté leur travail. Nous faisons encore vivre ces monuments avec les Grands jeux romains, les corridas, les concerts... "

Un sentiment inexplicable

Nîmes y croit et Mary Bourgade la première. Ou en deuxième après Jean-Paul Fournier, le maire de la ville qui suit le dossier depuis ses débuts à la tête de la mairie. Pour l'élue, les choses sont claires. " Ça fait vingt années d'apprentissage ! Il faut bien s'entourer et nous le sommes aujourd'hui. Ce qui nous réunit, c'est la valorisation de notre patrimoine et notre histoire. Nous découvrons toujours des choses nouvelles et les scientifiques avec lesquels nous travaillons ont notre total soutien. En retour, ils apprécient aussi que les élus s'impliquent. Nous avançons ensemble vers le même but. Nous avons un maire qui est présent à tous les comités et ça aussi c'est un plus. "

L'idée que l'on se faisait des vestiges antiques dans les années 1970. Du chemin a été parcouru (Photo Archives municipales de Nîmes fonds Hervé Collignon).

Pour conclure sur une note légère, carte blanche est donnée à Mary Bourgade pour ses derniers mots. " L'inscription est importante, très importante. Pour une ville, un département ou une région, cette reconnaissance mondiale est aussi une reconnaissance culturelle. Ça a 2 000 ans, c'est beau, c'est intemporel et ça procure encore des sensations que l'on ne s'explique pas. Pourquoi prend-on la Maison carrée en photo quand nous passons devant ? Quelque chose se passe, c'est spécial. "

Anthony Maurin

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