NÎMES Future prison : les questionnements des associations des Droits de l'Homme
Le groupe local de l’OIP, l'Observatoire international des prisons, participait à la réunion de concertation concernant la construction de la nouvelle prison au Sud de Nîmes.
Une concertation a été organisée par le ministère de la Justice et elle se terminait jeudi 20 janvier par une séance publique à Générac. Les militants des Droits de l'Homme en faisaient partie. C'est d'ailleurs les sept associations de leur réseau nîmois qui étaient au rendez-vous.
"Le groupe local de l'OIP à Nîmes existe depuis 25 ans et a toujours dénoncé les mauvaises conditions d'incarcération ainsi que les problèmes de surpopulation de la Maison d'arrêt de Nîmes, pose Bernadette Jonquet. Nous faisons partie de ceux qui sont opposés à la construction de cette nouvelle prison." Suzen, de l'ACAT, est du même avis : "Ce projet m'interpelle, surtout quand on pense au problème de surpopulation carcérale."
La Cimade, via Françoise, prend elle aussi part au débat. "Nous avons un correspondant à la prison de Nîmes et beaucoup de gens qui y sont sont en situation irrégulière alors nous les accompagnons. Je ne suis pas sûre que d'avoir des places en plus va changer le problème sur le fond."
De son côté, Roger parle pour l'APTI : "Dans les murs de la maison d'arrêt de Nîmes il y a des personnes migrantes qui ont droit à ce que l'on appelle la double peine. Ils font leur temps en prison puis on les expulse dans leur pays d'origine..." Pour la Ligue des droits de l'Homme, Jean est clair : "Le réseau nîmois réunit sept associations qui mènent les mêmes combats et qui ont souvent les mêmes valeurs. Nous ne voulons pas de prison au sud de Nîmes car ce projet met la prison au centre des questionnements... C'est à la justice civile ou pénale de réguler les conflits. La prison ne peut pas être la seule réponse ! Enfermer des gens ne résout pas tout. Quid de la peine de probation ? Tout cela, c'est de la politique publique ! On a vu, depuis 2000 un accroissement de 30 % de la population carcérale quand il n'est que de 10 % pour la population française."
Un projet en adéquation avec la tendance ?
Le projet de construction de cette nouvelle prison de 700 places sur les communes de Nîmes, Milhaud et Générac, sur un terrain de 60 hectares, a un coût estimé à 120 millions d'euros. Prune, de l'OIP national rappelle quelques évidences. "La France a été condamnée pour sa gestion des prisons et leur surpopulation carcérale. Cette réponse ne doit pas passer par la construction de nouvelles prisons. Nous sommes à 70 000 personnes en prison avec une moyenne de 135 % de surpopulation. C'est un échec car la population carcérale n'a cessé de croître à un rythme très soutenu. Il n'y a aucune corrélation avec la croissance démographique ou même avec l'évolution de la délinquance... Par contre, c'est le sentiment d'insécurité qui semble augmenter chez les Français. La politique pénale est juste de plus en plus répressive et ces budgets de construction pourraient servir à mettre en place d'autres alternatives à la prison. Nous devons changer de paradigme car c'est un cercle vicieux." On parle de près d'un milliard d'euros pour 2022 et de la création de 15 000 places supplémentaires.
Actuellement, la Maison d'Arrêt de Nîmes compte 196 places pour 420 détenus. 150 places supplémentaires devraient y voir le jour. Vous l'aurez compris, les blocs s'opposent et vont tenter de se comprendre, de discuter, d'affronter leurs arguments mais le contexte est complexe. Bernadette Jonquet reprend : "Pourquoi créer un centre pénitentiaire de 700 places ? De plus, le terrain sur lequel il serait construit est plus propice à la relégation sociale. Nous sommes au début de la concertation et nous espérons qu'ils vont au moins écouter, prendre en comptes ce que nous disons. On pourrait inverser la tendance comme cela a été fait du côté de Fournès pour le dossier de l'implantation d'Amazon." L'éloignement de cette future prison par rapport au centre-ville de Nîmes un autre problème. Quid des visites familiales ?
Le réseau gardois prend en exemple les pays du Nord de l'Europe, les Pays-Bas, les pays scandinaves, l'Allemagne, même l'Espagne. "Nous sommes le cinquième pays en termes de densité carcérale en Europe...", ajoute Prune. Pour Jean, "la première liberté c'est la sécurité. C'est ce qu'on entend depuis plus de 30 ans mais c'est faux ! Il est encore possible de penser autrement. La répression, c'est facile. On construit des murs et on met des gens à l'intérieur. Ce sont nos politiques d'insertion et d'intégration qui sont un échec."