Publié il y a 1 an - Mise à jour le 25.10.2022 - stephanie-marin - 5 min  - vu 1339 fois

FAIT DU SOIR Ukraine : tout juste de retour d'un convoi humanitaire, ce Beaucairois pense déjà à repartir

Vincent Sanchis et Mélissa Ravier ont mené un convoi humanitaire vers l'hôpital de Lutsk en Ukraine, pour le compte des Rotary clubs de Nîmes. (Photo : V.S.)

Mélissa Ravier et Vincent Sanchis ont parcouru près de 2 500 km pour relier Marguerittes à Lutsk, ville ukrainienne, capitale administrative de l'oblat de Volhynie. Leur mission : mener un convoi humanitaire pour acheminer du matériel médical - entre autres - destiné aux victimes de la guerre.

Ils sont tous deux âgés de 27 ans. Elle, Mélissa Ravier, est ambulancière à Nîmes et très engagée dans le milieu humanitaire. Sa prochaine mission débutera au mois de janvier 2023 au Togo en Afrique. Lui, Vincent Sanchis est à la tête de l'agence beaucairoise Pompes funèbres générales (PFG) et conseiller municipal. Deux casquettes laissées sur une étagère, le temps d'accomplir une action pour laquelle il s'est porté volontaire auprès du Rotary club Pont du Gard, lui-même associé à d'autres Rotary clubs de Nîmes et sa région pour venir en aide aux Ukrainiens. Depuis le début de la guerre, ces associations lancent des appels aux dons, organisent des points de collecte ainsi que des convois.

Au mois de mars dernier, Vincent Sanchis, avait déjà participé à l'un d'eux composé de trois fourgons chargés de marchandises de première nécessité. Le résultat au niveau départemental d'une collecte lancée au niveau national par le groupe OGF dont font partie les agences PFG. La confrérie Sainte Marie-Madeleine, l'association Courir à Beaucaire et les Rotary clubs gardois - une cinquantaine de bénévoles - avaient alors aidé le Beaucairois à collecter les dons matériels mais aussi financiers, soit 5 000€. Les camions avaient fait la route jusqu'à Košice en Slovaquie, où les colis avaient été distribués aux réfugiés. Il ne pensait pas vouloir, ni même pouvoir mener de nouveau cette opération, mais : "Comment rester insensible face à ce qui se passe, à la situation de cette population ?"

Vincent et Mélissa ont acheminé 1,4 tonne de matériel vers l'Ukraine dont une partie était réservée pour l'hôpital militaire de Lutsk. (Photo : V.S.)

C'est ainsi que le samedi 15 octobre dernier, Vincent, cette fois-ci accompagné de Mélissa Ravier, embarque dans un nouveau camion chargé d'1,4 tonne de matériel. Un premier arrêt a été effectué à Plauen en Allemagne. "Puis, nous avions pour mission de nous rendre à Lublin en Pologne où nous étions attendus par le professeur Tomasz Zubilevich, très impliqué depuis le début de la guerre dans l'acheminement de matériel médical", explique-t-il.

Arrivés le dimanche, les deux compères déchargent leur cargaison : "Les bombardements avaient repris, nous avions pour consigne de ne pas aller en Ukraine." Mais le professeur Tomasz Zubilevich indique au duo que Wolodymyr Weremko, président de l'association Help for you, est prêt à organiser un convoi exceptionnel pour transporter leur matériel jusqu'à l'hôpital militaire de sa ville natale. "À 40 ans, Wolodymyr Weremko est un homme d'affaires important à Lublin, né à Lutsk en Ukraine. À travers son association, il organise des convois humanitaires. Nous avons contacté le Rotary club qui nous a donnés son feu vert."

"Ni surhumains, ni soldats"

L'occasion pour Mélissa et Vincent d'aller jusqu'au bout de leur mission, de pouvoir "rencontrer des équipes médicales, les soldats, les blessés". Non pas pour satisfaire une curiosité mal placée, mais pour se rendre compte des besoins humanitaires urgents. "Ni surhumains, ni soldats", les deux Gardois ont été briefés pour des raisons de sécurité - tout au long de leur périple ils ont été géolocalisés - avant de rejoindre Sergii Pisachuk, chef de l'hôpital militaire de Lutsk.

Puis ils ont chargé dans le 4X4 de Wolodymyr Weremko le matériel entre autres, nécessaire au bon fonctionnement des deux machines de dernière génération de dialyse offertes par les Rotary clubs nîmois et le CHU de Nîmes. "Ils ont pu les utiliser pendant quelques mois, mais là ça commençait à être difficile. Il manquait le matériel qui va avec ces machines introuvable en Ukraine", précise le Beaucairois.

L'hôpital militaire de Lutsk en Ukraine. (Photo : V.S.)

Le lundi 17 octobre, vers 17h30, le trio se présente au poste frontière d'Ostyluh, la première ville ukrainienne depuis la Pologne. "Il y avait une centaine de voitures", se souvient Vincent. Mais parce qu'il s'agissait d'un convoi humanitaire mandaté par l'hôpital militaire dont les douaniers avaient été avertis, "nous avons pu passer en priorité". Une fois la frontière passée, dans l'obscurité de la nuit, "l'atmosphère était très lourde, très pesante, on voyait de la fumée sans trop savoir de quoi il s'agissait". Et il poursuit : "On ne savait pas si c'était dû à un bombardement ou simplement une cheminée. Ce n'est que plus tard que nous avons appris qu'ils se chauffent au charbon donc forcément ça fait de la fumée. Mais l'ambiance était vraiment angoissante."

"C'était de l'anxiété et de l'inquiétude permanentes"

Le Beaucairois se rappelle ces petites routes le long desquelles le 4X4 a dû rouler pour atteindre la ville de Lutsk, située à 1h30 de la frontière, des postes de garde installés au milieu de nulle part, tenus par des militaires "protégés simplement avec des pneus et quelques sacs de sable qui font la circulation avec le flash de leur téléphone portable". Puis Mélissa et Vincent arrivent à Lutsk, s'installent dans leur hôtel, un lieu sans prétention mais qui "ne donne pas l'impression que nous sommes alors dans un pays en guerre".

Une ambulance devant l'hôpital de Lutsk. (Photo : V.S.)

À un détail près, le bunker et les alertes qui ne sont plus des exercices. "C'était de l'anxiété et de l'inquiétude permanentes. Tout est inconnu. Dans ces moments-là, on se dit "normalement". "Normalement" on va aller manger, "normalement" on va aller se coucher. Mais si la sirène retentit, on sera 20 ou 30 rassemblés dans un bunker de 30 m2." Un corridor sous les chambres, avec des étagères le long des murs, un plafond bas.

Mélissa et Vincent aux côtés de Wolodymyr Weremko et Sergii Pisachuk, chef de l'hôpital militaire de Lutsk. (Photo : V.S.)

Après une rencontre avec Sergii Pisachuk lors du dîner et une nuit quelque peu stressante "car chaque bruit devient suspect, c'est comme si l'on attendait que la sirène retentisse", les missionnés des Rotary clubs ont donc visité l'hôpital militaire de Lutz, le plus important de la région. Depuis le début de la guerre, certains jours sont réservés aux civils pour les consultations classiques et le reste du temps aux urgences militaires.

"Nous avons vu beaucoup de soldats dans l'hôpital, j'ai vu sur des radios des balles logées dans la tête de certains. Un autre m'a particulièrement marqué. Il avait une béquille en bois, vous savez comme avant, celle qui se place sous les aisselles. Ils n'ont même pas de vraies béquilles." Le manque de matériel médical est un des points majeurs de précaution du chef de l'hôpital. D'autant que "comme en témoignait Wolodymyr Weremko, ils n'ont qu'une certitude, c'est que cette guerre va être très longue, que ce n'est que le début", rapporte Vincent.

Une partie du matériel acheminé par Mélissa et Vincent a été livré à l'hôpital de Lutsk. (Photo : V.S.)

Les convois comme celui mené par les deux Gardois sont une aide précieuse pour les Ukrainiens. Une main tendue qui s'affaiblit au fil du temps. "Au début de la guerre, ils n'arrivaient pas à gérer les flux de convois qui étaient très importants. Aujourd'hui, sans dire qu'ils sont délaissés, il y a un écart considérable par rapport à il y a quelques mois en arrière." Pour Sergii Pisachuk, l'urgence est de trouver des chariots de réanimation. À l'heure actuelle, l'hôpital militaire de Lutsk en compte quatre, il en faudrait dix de plus. Le Beaucairois s'est donc donné pour mission de trouver ces équipements.

L'hôpital de Lutsk compte quatre chariots de réanimation, il en faudrait dix de plus. (Photo : V.S.)

"Je ne peux pas rester insensible à ce que j'ai vu et entendu. Ils ont des besoins considérables et je suis persuadé qu'il doit y avoir dans tous les garages des hôpitaux ce genre de chariots avec une roulette cassée, un tiroir abîmé. Ça nécessite juste de la mobilisation pour aller démarcher tous ces hôpitaux, ces maisons de retraite. Et avec les Rotary clubs nîmois, nous avons la capacité de pouvoir conduire un nouveau convoi." Revenu le jeudi 20 octobre, Vincent Sanchis pense donc déjà à repartir avant l'hiver si le matériel recherché est disponible, sinon dans le courant du premier trimestre 2023. Les Rotary club nîmois organiseront également un autre convoi au début de ce mois de novembre.

Stéphanie Marin

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