Publié il y a 1 an - Mise à jour le 13.10.2023 - Boris de la Cruz - 3 min  - vu 2016 fois

NÎMES Le tyran familial nie en bloc... et part directement en prison

Photo B.DLC. Maître Alexandre Zwertvaegher, avocat du prévenu, et Me Frédéric Mansat-Jaffre au tribunal correctionnel dans un dossier de tyran domestique, incarcéré hier 

Une audience avec un prévenu qui estime être victime d'un complot orchestré par toute sa famille. 

La justice lui repoche des "violences habituelles sur son épouse" pendant cinq ans, de début 2016 à fin 2020. Même si son épouse et ses enfants parlent eux "d'habitudes malsaines" depuis plusieurs décennies. Une litanie de reproches contre cet homme, Simon, qui abaisse, frappe et détruit psychologiquement. Pourtant, à l'écouter, ses enfants "ont eu une vie dorée", et son épouse invente tout, "car je n'ai jamais été violent ni avec elle, ni avec les enfants, ni avec personne d'ailleurs", affirme le prévenu devant le tribunal correctionnel de Nîmes ce jeudi 12 octobre.

"Vous indiquez en procédure que vous êtes un père modèle, résume le président Reynes, et vous niez l'ensemble des faits reprochés". On y évoque des scènes où la tête de la mère de famille est plongée dans l'eau jusqu'à suffocation, "des claques banalisées", "une fuite dans la forêt" pour échapper à son agresseur de mari une nuit d'hiver. Des actes qui auraient duré 25 ans. 

"Ma maison était une prison à domicile", témoigne l'ancienne épouse qui commence à se libérer de l'emprise de son compagnon. Si l'affaire a été dévoilée, ce n'est pas dû à une prise conscience de la mère de famille... Ce sont les enfants qui ont poussé la porte de la gendarmerie fin août 2020 pour effectuer un signalement de danger pour leur mère et le petit frère. 

Le frère et la soeur, enfants du couple âgés respectivement de 22 ans et 23 ans, sont partis de la maison et se rendent compte, avec le recul, du huis clos familial irrespirable dans lequel ils ont grandi. Ils dénoncent un père tyranique, un homme passionné d'arts martiaux et de boxe, face à une mère abusée.

"Ma rigueur et la discipline éducative ont été perçus comme un désamour. Et puis le conflit est arrivé lorsque mes enfants ont réclamé de l'argent", avance Simon qui se présente comme un spécialiste de la finance, mais qui officiellement ne travaille plus depuis 1999. S'il nie tout, il rejette aussi la responsabilité vers ses proches : "Elle me doit 100 000 euros, mes émoluments en tant que gestionnaire de la succession". La succession de sa femme qui avait hérité d'une belle somme. "C'est lui qui a décidé de devenir le gestionnaire, il a décidé tout seul comme d'habitude", corrige son épouse qui revient aussi sur un épisode de violences avec une béquille, ce que nie l'accusé. Ce jour-là, elle a fini aux urgences avec des fractures des côtes, un pneumothorax avec un décollement de la plèvre et des jours d'hospitalisation. Simon, âgé de 58 ans, prétend que son épouse s'est fracassée sur la béquille...

Pendant son contrôle judiciaire, il a encore fait parler de lui bien qu'il n'était pas connu de la justice avant ce dossier délictuel. Son frère a a voulu lui tendre la main en l'accueillant à son domicile. Une expérience qui va durer quatre petits jours... Elle se termine par une lettre à la Justice dénonçant "un véritable enfer". Une frère qui explique qu'il est celui qui connaît le mieux Simon dont "la vie entière est l'oisiveté et la confrontation". "Je ne veux plus voir cet individu !" Un témoignage accablant pour le prévenu.

Il est pervers narcissique

"Elle a subi tous les sévices physiques, psychiques et moraux possibles", dénonce maître Frédéric Mansat-Jaffre. "C'est un dossier glauque, il est pathologiquement pervers narcissique et il a l'art de dévier le projecteur sur autrui. Avec lui, c'est toujours la faute des autres. Les autres lui en veulent. Si son fils va mal, c'est à cause de son ex-femme", ajoute l'avocat nîmois de la victime. "Et madame a besoin de vous, elle a besoin d'être protégée car il est dans la toute puissance", complète Me Mansat-Jaffre. 

"118, c'est le nombre de femmes tuées en 2022. À plonger dans ce dossier, on se dit qu'il y aurait pu y avoir un drame de plus", souligne la procureure Adélaïde Galtier. "C'est un récit glaçant des années de supplices de cette dame et de cette famille. Et pourtant, aujourd'hui encore, elle ne l'accable pas", ajoute la représentante du parquet de Nîmes qui réclame cinq ans de prison avec un mandat d'arrêt à l'audience. 

Un prévenu dont l'attitude à l'audience a mis son avocat dans une très mauvaise situation avant de plaider. "On est dans un huis clos familial, il y a très peu d'élements qui sortent, estime Maître Alexandre Zwertvaegher. Ce qui importe dans ce dossier, c'est que malgré les comportements excessifs il y a une évolution", enchaîne le conseil du prévenu faisant référence au travail trouvé par son client. 

Une évolution qui ne permettra pas de sauver le mis en cause qui écope de cinq ans de prison, dont deux ans avec un sursis probatoire de trois ans l'obligeant à travailler et à l'interdiction d'approcher son épouse et son domicile. Il est puni d'un retrait de l'autorité parentale et à une interdiction d'éligibilité et des droits civiques et civils. Il a été emmené après l'audience directement en prison. 

Boris de la Cruz

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