Publié il y a 4 h - Mise à jour le 05.08.2025 - © Sabrina Ranvier - 3 min  - vu 38 fois

LE DOSSIER Le pillage sous-marin

Ces objets exposés au premier étage du musée des saintes Maries de la mer proviennent de saisies judiciaires. Ces instruments de navigation ont été pillés sur un navire de la fin XVIIIe, début XXe siècle. 

- © Sabrina Ranvier

En quelques clics, on peut trouver des annonces pour des amphores « authentiques ». Ce genre de vente est un délit. Les découvertes maritimes sont régies par le Code du patrimoine, le Code des transports, le Code pénal et la Convention Unesco de 2001.

« Exceptionnel et rare… Lot d’amphores romaines authentiques… À saisir pour collectionneurs… Provenance succession… » Le 22 juillet, un particulier des Bouches-du-Rhône met à prix à 500 euros des amphores sur le site Leboncoin. Une autre annonce propose une « ancienne amphore romaine trouvée dans la mer Méditerranée ». Le vendeur précise qu’il « manque le fond », qu’il y a un « dépôt de coquillages ». Il vend 250 euros cet objet haut de 17,5 cm. Ceux qui vendent ou qui achètent l’ignorent, mais ils risquent jusqu’à deux ans de prison et une amende du double du prix de la vente du bien.

« Tout appartient à l’État. Quand on découvre quelque chose, on a 48h pour aller à la gendarmerie ou à la capitainerie pour faire une déclaration », prévient Giogio Spada. En France, les découvertes maritimes sont régies à la fois par le Code du patrimoine, le Code des transports, le Code pénal ou la Convention Unesco de 2001. La personne qui découvre un objet doit le laisser en place et ne pas y porter atteinte. L’autorité administrative est ensuite obligée de mettre en place des mesures de protection ou d’éventuellement organiser des fouilles avec les organismes compétents.

Délits

Si on ne déclare pas le bien trouvé, on encourt 3 750 euros d’amende. Pour le prélèvement sans autorisation de ce genre de bien, on risque 7 500 euros d’amende. C’est l’État qui prescrit et autorise les opérations d’archéologie. Il en assure le contrôle scientifique et technique. Au musée des Saintes-Maries-de-la-Mer, des panneaux expliquent aux enfants les risques du pillage. Un gouvernail, des instruments de mesures et même un téléphone à cornet, massifs et dorés, sont exposés pile devant la baie vitrée qui surplombe le port. Ces vestiges d’un bateau de la fin XIXe-début XXe siècle proviennent de saisies judiciaires. « Ces objets ont été pillés dans des épaves au large des Saintes », souligne Giorgio Spada.

Pour éviter les pillages, les musées misent sur l'éducation. Celui des Saintes a notamment fait des affiches destinées aux enfants. Le Musée départemental Arles antique a consacré une exposition au patrimoine archéologique en danger en 2023. • © Sabrina Ranvier

Patrimoine archéologique en danger

Le phénomène est-il répandu ? En 2023, le musée départemental Arles antique avait consacré une exposition sur « Trésors des fonds des mers, un patrimoine archéologique en danger ». Il évoquait les menaces naturelles, environnementales, mais aussi humaines pesant sur les trésors sous-marins. Le catalogue évoque le « chapardage » commis par des plongeurs, « fréquemment par sottise » mais aussi le « fléau des chasseurs d’épaves » qui y voient « un moyen de s’enrichir promptement ».

À la fin des années 1940, grâce au détendeur Cousteau, la plongée se démocratise. Certains organisent même des concours de pêche aux amphores. En 1961, une première loi protège les épaves maritimes. En 1966, André Malraux crée la Drasm, direction des recherches archéologiques sous-marines. Elle deviendra Drassm, direction des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines en 1996. La loi se durcit en France en 1989. En 2001, l’Unesco adopte une convention pour la protection du patrimoine culturel subaquatique. Elle est ratifiée par 70 pays.

Le catalogue de l’exposition évoque des procès de pilleurs d’épaves jugés en 2015 et 2016, à Montpellier. Ils étaient poursuivis pour avoir notamment pillé un navire marchand du XVIIe siècle au large de Palavas. Midi Libre relate, qu’en appel, l’un d’entre eux a écopé de quatre ans de prison dont deux avec sursis. Les quatre autres, ont reçu une peine de prison avec sursis pour complicité. Les cinq prévenus ont aussi été condamnés à verser 1,08 million d'euros à l’État pour les dégâts sur l’épave et 20 000 euros de préjudice moral.

« Depuis Arles Rhône 3, les habitants sont sensibilisés, estime Sabrina Marlier. Il y a trois ans, des Arlésiens ont appelé le musée pour dire qu’ils avaient vu des activités de plongeurs dans le Rhône ». Pas de panique, c’était tout simplement l’équipe de fouille archéologique

Pour aller plus loin, on peut lire Trésors du fond des mers, un patrimoine archéologique en danger sous la direction de Sabrina Marlier, Michel Lhour, Alain Charron et David Djaoui. 30 euros.

© Sabrina Ranvier

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