Publié il y a 47 min - Mise à jour le 24.11.2025 - Stéphanie Marin - 6 min  - vu 81 fois

FAIT DU SOIR Guilaine Londez : itinéraire d’une comédienne, de Saint-Gilles au grand écran

Tout un week-end sera consacré à l'actrice saint-gilloise, Guilaine Londez.

- ©FRANCK CASTEL/MAXPPP

La comédienne, Guilaine Londez, sera mise à l'honneur ce week-end dans sa ville natale. Fille de commerçants spécialisés dans la vente de chaussures, cette Saint-Gilloise s’est construit une carrière au cinéma, à la télévision et au théâtre. Un rêve qu’elle a poursuivi avec ténacité, malgré les obstacles rencontrés en chemin.

Guilaine Londez, 60 ans, est une figure bien connue du cinéma français. "Je ne m'appelle pas Catherine Deneuve ou Isabelle Huppert ! Je ne suis pas une vedette, mais je suis quand même dans le paysage, et je peux le constater tous les jours...", avait-t-elle confié à nos confrères d'AlloCiné, en 2022. Des mots qui reflètent la relation délicate et sincère qu'elle entretient avec le public. Elle la raconte avec douceur, tout en témoignant de la ténacité dont elle a dû faire preuve pour accéder aux plateaux de tournage et, au-delà, pour s’imposer durablement.

Guilaine Londez a grandi à Saint-Gilles, dans une maison située sur la route de Montpellier, tout près de l’actuel Intermarché. "À l’époque, il n’y avait pas grand chose, on était pratiquement les seuls sur cette colline", rembobine-t-elle. Ses parents tenaient un magasin de chaussures, sur la place de l'Abbatiale. « Je me souviens qu’ils aimaient les gens qu’ils servaient, ils n'hésitaient pas à les aider. Ils nous ont transmis cette grande humanité à mon frère, à ma soeur et à moi-même. » Ils travaillaient beaucoup, Guilaine Londez se réfugiait régulièrement chez sa grand-mère maternelle d'origine italienne, laquelle élevait des poules, des dindes, des canards...

"Rêver plutôt que vivre une réalité qui ne me plaisait pas"

La petite Gardoise n'était pas mauvaise élève, mais c'était une enfant rêveuse, déconnectée de la réalité. "Elle ne m'intéressait pas, explique-t-elle. Enfant, je mentais beaucoup. Comme beaucoup d'acteurs - je l'ai appris plus tard - très jeune, je me suis mise à raconter des histoires aux autres, mais aussi à moi-même." L'expression d'une relation au monde bien particulière : "Rêver plutôt que vivre une réalité qui ne me plaisait pas."

Le cinéma a été une échappatoire. Elle le doit aussi, en grande partie, à sa maman. "Elle regardait l'émission Le Cinéma de minuit - lancée en 1976, NDLR - diffusée le dimanche soir. Très tôt, j'ai vu les oeuvres de grands réalisateurs dont je ne connaissais pas les noms, évidemment. Je me souviens que ma mère s'était endormie devant M le Maudit de Fritz Lang. Moi, je l'avais regardé jusqu'au bout." Eisenstein, John Ford, Rossellini... Sans le savoir, la jeune fille se forge une solide culture cinématographique, et peut-être même un destin.

Il n'y avait aucune évidence, ou une seule, "le besoin de m'exprimer." À travers la peinture, l'opéra, le 7e art... Guilaine Londez avait effacé cette anecdote de sa mémoire, mais dès la maternelle, son choix était fait. "Des copines m'ont raconté que je disais vouloir être comédienne." Comme beaucoup de petites filles, direz-vous. Combien ont réalisé ce rêve d'enfant ? La Saint-Gilloise ne pensait pas l'atteindre, en tout cas. "C’était une autre époque que celle-ci. Internet, les réseaux sociaux n’existaient pas. On n’avait pas accès aussi facilement à toutes les informations qu’on peut avoir aujourd’hui. Ne serait-ce que pour prendre des cours de théâtre, vers où se diriger ? Les moyens étaient très différents."

Si ce n’est que… La comédienne se souvient du Club des jeunes à Saint-Gilles. Sa soeur y participait avec d’autres copains. Un jour deux professeurs décident de monter une pièce de théâtre. "J’avais 11 ans, ma soeur en avait 3 de plus. La troupe cherchait une petite fille, elle a demandé à mes parents si je pouvais jouer dans cette pièce." Une révélation pour l'enfant pourtant timide, inhibée. "C’est devenu important tout de suite, j’étais viscéralement passionnée." Adolescente, Guilaine Londez rejoint le Conservatoire de Nîmes, puis celui de Montpellier, le baccalauréat en poche. Elle n’y restera qu’un an, direction Saint-Étienne (Loire) pour intégrer l'École de la Comédie. L’expérience - encore une fois - ne sera que de courte durée. Gagnée par l’ennui, la jeune femme plaque tout, pour suivre une amie à Paris.

"Chantal Akerman m’a ouvert les portes du cinéma"

Elle enchaîne les petits boulots : vendeuse de fromages en hypermarché, de chaussures aussi, ainsi que serveuse. Dans un restaurant grec notamment, puis le grand tournant. "Un garçon avec qui je travaillais donnait la réplique à des jeunes filles qui passaient un casting pour le film de Chantal Akerman. Plus jeune, j’avais vu un documentaire avec cette réalisatrice, je savais très bien qui elle était, j’avais eu un coup de coeur pour cette femme. Mon coeur s’est alors emballé, ç'a été une des plus grandes intuitions de ma vie. Je n’avais pas d’agent, j’avais dix kilos de plus parce que je mangeais toute la journée du tzatzíki et du tarama…", précise-t-elle, rieuse. La Parisienne d'adoption réussit à obtenir l'adresse du casting, s'y rend et laisse ses photos. Quinze jours plus tard, elle rencontre Chantal Akerman, passe le casting quatre mois plus tard. Mais le producteur met son veto. "Parce que je n’étais pas connue, parce que j’étais ronde, parce que j’avais l’accent du sud…" C'était sans compter sur la détermination de la cinéaste. "Chantal Akerman m’a ouvert les portes du cinéma, j’avais 26 ans". C'était pour le film Nuit et Jour.

"Vivre et être ce qu’on a choisi d’être, demande un courage énorme"

Cette rencontre peut-elle se résumer au simple fait du hasard ? Guilaine Londez ne peut l’imaginer. "J’ai cru en ce rêve, ce métier qui semblait si éloigné de moi. Ce n’est pas du hasard, c’est à la fois le destin et la foi très enfantine que j’ai toujours eu, que j’ai toujours d’ailleurs. Et je pense que si je suis toujours là, c’est parce que j’ai quelque chose de très enfantin en moi, qui croit en sa bonne étoile."

Ses parents quant à eux, étaient plus réticents, sans pour autant dénigrer le talent de leur fille, mais de là à faire carrière… Le départ à la capitale s’est fait avec froideur, son père ne lui donnait pas plus de six mois avant son retour au cocon familial. « Je ne suis jamais revenue, lâche Guilaine Londez. En tout cas, pas pour m'y installer. J'ai toujours des attaches à Saint-Gilles. Mais ma mère le savait, si j'étais restée à Saint-Gilles, j'en serais morte. Il fallait que je parte, il y avait quelque chose qui, malgré moi, me poussait à aller là où je suis allée alors que je n’avais rien pour moi, a priori, c’était ce que les gens me renvoyaient. Et pourtant, quand quelqu'un a quelque chose chevillé au corps, le courage et la folie douce sont salvateurs. »

Il y a eu des hauts et des bas, des années de solitude, sans un sou, à vivre dans un appartement de 10 m2 équipé grâce à la générosité d’Amor, le cuisinier du restaurant grec où elle travaillait… Des boulots alimentaires, alors que sa carrière au cinéma avait démarré… Mais la comédienne n'est pas femme à se plaindre. Ce courage, si Guilaine Londez en parle aujourd’hui, ce n’est pas pour l’inscrire dans sa seule histoire, mais de le faire reconnaître dans chaque parcours dont le but est de viser son ou ses rêve(s). "Et on est nombreux. Vivre et être ce qu’on a choisi d’être, demande un courage énorme."

Suite à son premier film, d'autres rôles ont suivi, souvent secondaires, dans des films comme Le Bonheur est dans le pré, Liberté-Oléron, Jean-Philippe ou Zim and Co.. Dans les années 2010, elle se fait surtout remarquer dans des comédies (Bienvenue à bord, 12 ans d’âge, Photo de famille), tout en multipliant les apparitions à la télévision dans des séries telles que Les Petits meurtres d’Agatha Christie, Vive la colo ! ou Les Bracelets rouges, mais aussi Dix pour Cent où elle joue la "fausse" Isabelle Huppert. Toujours à l’aise dans des registres variés, elle s’illustre également dans des drames et thrillers comme Benedetta (prix d'interprétation féminine au festival Ciné Roman de Nice en 2021), Arrête avec tes mensonges etc, sans jamais s'éloigner de la comédie.

En 2025, elle figurait au casting de Fils de., de Carlos Abascal Peiró et La Fille d’un grand amour d’Agnès de Sacy. Guilaine Londez, c’est aussi une femme de théâtre : L’hiver sous la table, pièce mise en scène par Zabou Breitman, À la Française d’Édouard Baer, Suite française, mise en scène par Virginie Lemoine, et Normal de Jane Anderson, qu’elle joue actuellement aux côtés de Lionel Abelanski, Vincent Deniard, Colombe Ducrot, Jérémy Gillet… La Saint-Gilloise n’a pas à rougir de sa carrière. "J'en suis fière, concède-t-elle. Mais ç'a été et c’est encore un combat."

La médaille de la ville de Saint-Gilles

S’il ne fallait retenir qu’un rôle, lequel serait-il ? "Mme Duru dans le film Primaire d’Hélène Angel", répond-elle, presque sans hésitation. "Je n’avais pourtant que dix phrases à dire, mais ce rôle que j'ai joué, celui d’une auxiliaire de vie scolaire, pauvre, simple, qui s’occupait d’une petite fille autiste, m’a fait beaucoup travailler. Il a exigé de moi l’oubli de plaire pour proposer quelque chose de pur, pauvre dans le fond mais riche dans le coeur. Et puis un autre, dans un film qui sortira l’année prochaine, Sauvons les meubles de Catherine Cosme, où je joue une femme atteinte d’un cancer dans ses derniers instants de vie." Une interprétation qui lui a valu le prix du Meilleur second rôle féminin, mi-octobre, au festival de cinéma Jean-Carmet à Moulins, dans l’Allier. Ce samedi 29 novembre, elle recevra la médaille de la Ville de Saint-Gilles.

Au programme ces vendredi 28 et samedi 29 novembre à Saint-Gilles

  • Vendredi 28 novembre – 20h : Théâtre – "Normal"
    Pièce de Jane Anaderson, mise en scène par Julie Delarme. Avec Lionel Abelanski, Vincent Deniard, Colombe Ducrot, Jérémy Gillet, Guilaine Londez et Hélène Vincent. Une exploration du couple, de la famille et des identités mouvantes, mêlant humour et émotion. Tarifs : adulte 20 € / 5 € pour les – de 16 ans. Au Pavillon de la Culture et du Patrimoine.

  • Samedi 29 novembre – Soirée cinéma (entrée gratuite)
    17h30 : "Dix pour Cent" (Saison 3, épisode 6)
    20h : "Arrête avec tes mensonges" (adapté du roman de Philippe Besson) Entrée gratuite dans la limite des places disponibles. Au Pavillon de la Culture et du Patrimoine.

  • Vendredi 28 novembre – 20h : Théâtre – "Normal"
    Pièce de Jane Anaderson, mise en scène par Julie Delarme. Avec Lionel Abelanski, Vincent Deniard, Colombe Ducrot, Jérémy Gillet, Guilaine Londez et Hélène Vincent. Une exploration du couple, de la famille et des identités mouvantes, mêlant humour et émotion. Tarifs : adulte 20 € / 5 € pour les – de 16 ans. Au Pavillon de la Culture et du Patrimoine.

  • Samedi 29 novembre – Soirée cinéma (entrée gratuite)
    17h30 : "Dix pour Cent" (Saison 3, épisode 6)
    20h : "Arrête avec tes mensonges" (adapté du roman de Philippe Besson) Entrée gratuite dans la limite des places disponibles. Au Pavillon de la Culture et du Patrimoine.

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Stéphanie Marin

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