Publié il y a 5 ans - Mise à jour le 30.11.2018 - abdel-samari - 6 min  - vu 2736 fois

FAIT DU JOUR Ludovic Martin, directeur du réseau Transdev à Nîmes : "Nous avons proposé nos services au bon prix"

Spécialiste des transports publics, il a 44 ans et travaille pour le groupe Transdev depuis 18 ans. Ludovic Martin, le directeur régional de l'opérateur des transports de l'Agglo nîmoise a accepté de répondre à Objectif Gard sur les raisons de son arrivée à Nîmes.
Photo : Corentin Corger

Objectif Gard : Vous vous livrez une bataille avec Keolis. Vous avez remporté Nîmes. Mais c’est l’inverse qui vient de se dérouler à Nancy puisque l'ancien opérateur nîmois vous a mis dehors. C’est quoi fondamentalement vos différences ? On a un peu l'impression que vous vous partagez le marché national ?

Ludovic Martin : On ne peut pas parler de partage sur un marché aussi concurrentiel. C'est à chaque fois une compétition, une lutte. Chaque groupe fait valoir ses atouts. Et pour évoquer l'appel d'offre de Nîmes métropole, c'est notre proposition technique, notre offre qualitative, notre engagement de qualité qui ont fait la différence. Peut-être également notre expertise. Nous connaissons bien les offres de transports périurbains. Et l'enjeu de cette délégation de service public est de proposer un service homogène partout sur le territoire.

Ce marché a fait l’actualité en particulier en raison de la baisse conséquente de son coût estimé à 10M par an. Comment allez-vous faire face à ce marché à bas prix ?

Il y a indéniablement un vrai gain de Nîmes métropole avec cette mise en concurrence. Mais je vous l’assure : notre offre était conforme aux attentes exprimées par l'Agglo. Nous avons proposé nos services au bon prix. La preuve c'est qu'à part Kéolis, tous les concurrents avaient une offre de prix assez proche.

Quels sont les leviers pour offrir un meilleur service aux usagers ?

Comme a pu le dire précédemment notre PDG, Tango c'est avant tout des hommes et des femmes tournés vers la mobilité et la qualité de service. Techniquement, pour répondre aux attentes de Nîmes métropole, nous allons travailler efficacement d'abord sur le prolongement de la T1 et la mise en service de la T2. Ensuite, notre engagement porte sur le critère qualité. Nous allons faire en sorte d'améliorer la ponctualité, l'accueil clientèle en agence et dans les bus. Enfin, toujours sur l'aspect technique, sur la maintenance sans faille du parc de véhicules.

Vous avez évoqué également un accent important mis sur la digitalisation des services ?

Effectivement, la composante numérique sera très forte car de ce point de vue là, le réseau nîmois est très en retard. Nous souhaitons donc atteindre rapidement un cap qualitatif à travers trois actions : la création d'un nouveau site Internet plus convivial et efficace avec une version en langue anglaise et espagnole. Le lancement d'une application mobile dédiée aux voyageurs qui permettra à chacun d'avoir en temps réel les informations du réseau mais aussi, dans une stratégie multimodale, les mises à jour du réseau départemental LiO. Enfin, à l'horizon 2020, nous lancerons le M Ticket qui permettra avec son mobile d'acheter et de valider son titre de transport dématérialisé. C'est le sens et la plus-value apportée par Transdev, un ancrage très fort dans la modernité.

En ce qui concerne l'accessibilité ?

Nous nous sommes penchés sur des solutions pérennes pour les personnes en mobilité réduite. Nous souhaitons faciliter l'accès au réseau. Pour cela, nous proposons dès la fin du mois de janvier 2019, un élargissement de l'offre à l'ensemble des territoires de Nîmes métropole du service de transport à la demande et du service Handigo à travers une centrale de réservation unique. Plus besoin de réserver la veille, les usagers pourront bénéficier d'une navette jusqu'à deux heures avant.

Nous souhaitons plus de réactivité, de la souplesse car rien ne doit être un frein à l'utilisation du service. Enfin, un mot sur les annonces de l'Agglomération de Nîmes sur les prix. Le Pass solidaire connaît une diminution de son prix de façon significative à 90 euros par an au lieu de 120 euros environ jusque-là. Et le Pass jeunes à destination des scolaires et étudiants connaîtra une baisse à la rentrée prochaine.

La transition énergétique est aussi au cœur des préoccupations de cette DSP (Délégation de service public)...

Il y a une vraie volonté politique. Un plan de rénovation de la flotte est engagé sur la durée du marché avec des remplacements par des véhicules plus respectueux de l’environnement. La ligne T2 sera entièrement équipée de bus hybride. Nous anticipons donc les obligations de la Loi de transition énergétique qui entreront en vigueur prochainement. Démarrer maintenant c’est anticiper. C’est une réelle tendance chez Transdev.

Vous avez essuyé dès les premiers jours de l'annonce de votre arrivée une grève d'une partie du personnel, inquiet au sujet de ses futures conditions de travail. Tout est réglé ?

Je voudrais d'abord vous dire que j'ai été interpellé lors de mon arrivée à Nîmes par la mauvaise qualité du dialogue social. J'ai écouté les salariés, j'ai entendu de la souffrance, du manque de considération, d'une absence de proximité avec la direction. Une forme de mal-être du personnel. L'enjeu majeur de cette délégation de service public est donc de retrouver chez notre personnel le plaisir de travailler. Nous allons appuyer sur ce point pour trouver les solutions du retour au bien-être, à la qualité, au confort.

Les salariés étaient surtout inquiets de votre arrivée...

L'inquiétude était là bien entendu car le changement d'opérateur n'est pas un acte anodin. J'ai rencontré les salariés, les syndicats... dans l'objectif d'exposer le nouveau pacte social que nous souhaitons mettre en œuvre. Il repose en partie sur un constat : depuis quatre ans, les salaires sont bloqués. Il faut donc trouver les ressorts pour améliorer cet aspect. J’ai donc sollicité un effort des salariés avec un retour progressif aux 35h par semaine (au lieu des 32h actuellement en place). L'idée est de se mettre autour d'une table pour définir un calendrier social dans les premiers mois de 2019 dans un état d'esprit positif. Je ne veux pas quelque chose de brutal. Je souhaite opérer dans un esprit gagnant-gagnant.

Est-ce que la négociation qui va s'ouvrir pourrait aller jusqu'à une remise en cause des acquis sociaux des salariés ?

Il n'est pas question de revenir là-dessus. Notre souhait est de travailler efficacement sur la productivité. Un effort sera demandé aux salariés mais je vous le répète sans remise en cause des acquis. Prenons un exemple. Nous avons sur Nîmes un taux d’absentéisme important de l'ordre de 10%. Quand je suis arrivé à Valence pour diriger le réseau de transport de l'Agglomération il y a quelques années (réseau comparable à celui de la métropole de Nîmes), le taux était aussi important. Lors de mon départ, il y a quelques semaines, nous sommes parvenus collectivement à le ramener autour de 6%. Nous devons appliquer les mêmes recettes pour obtenir le même résultat.

Sous quelles conditions les prochaines embauches au sein du réseau de transport se feront-elles ?

Ce sont des discussions qui se feront en lien avec Nîmes métropole. Nous débattrons avec les syndicats le moment voulu. Sachez que de toute façon, sur la durée du marché, il n’y aura aucune nouvelle embauche.

Y compris pour les remplacements de départ à la retraite ?

Tout à fait. Nous devons travailler d’abord à une meilleure productivité avant d’envisager quoi que ce soit. Un exemple : lors de l’étude par Transdev de l’appel d’offre, nous avons été frappé par les disparités de temps de parcours. Il faut retrouver une homogénéité. Pareil pour les temps longs lors des heures creuses. Il faut repenser le modèle, réguler plus efficacement. En la matière, Transdev a une vraie expertise.

Vous avez décidé de faire appel à une nouvelle sous-traitance via le regroupement des transporteurs Coop’voyageurs 30. Pourquoi ne pas avoir fait le choix de votre filiale STDG ?

STDG est notre filiale qui travaille pour Tango mais aussi pour le réseau régional LiO. Il est indispensable face au marché des transports de plus en plus concurrentiel de transformer notre modèle d’activité. Le coût unitaire de STDG était incompatible avec le marché de Nîmes métropole. Nous avons donc fait un autre choix qui privilégie le transport local via des PME du territoire. Pour autant, nous sommes attachés au respect du personnel STDG.

Nous allons donc accompagner les salariés dans cette transition et même au-delà. Notre accord de sortie de crise en témoigne avec des primes attribuées pour les salariés transférés et la garantie du maintien d’activité pour ceux qui ne souhaitent pas rejoindre la coopération. Que les choses soient claires : STDG n’a pas vocation a disparaître. Elle pourra tout à fait s’inscrire dans le marché régional.

Est-ce que le réseau de transport de Nîmes va changer de nom ?

Le nom Tango reste, il est ancré localement, il n’y a pas de raison d’en changer. Cependant, nous allons retravailler la charte graphique.

Un dernier mot sur la sécurité. Envisagez-vous de faire appel à la sous-traitance au détriment des salariés en place aujourd’hui ?

Le programme de lutte contre la fraude et les incivilités chez Transdev est assuré par l’ancien député de la Gironde Gilles Savary qui s’est reconverti en consultant dans le domaine des transports. En matière de contrôle, de médiation et de sûreté, nous avons donc de vrais atouts et des méthodes efficaces. Nous allons les mettre en place sur le réseau nîmois, et partout sur le réseau, ce qui n’était pas le cas jusque-là.

Nous allons travailler à des partenariats avec l’enseignement scolaire, l’école de police de Nîmes, les quartiers sensibles pour travailler en profondeur et anticiper le risque dans le cadre des contacts entre la population et nos conducteurs. Sur les médiateurs, au nombre de sept aujourd’hui, trois étaient sous contrat à durée déterminé jusqu'au 31 décembre. Nous venons de prolonger leur contrat jusqu’au 30 juin 2019.

Dans le même temps, nous envisageons effectivement un recours à la sous-traitance pour professionnaliser encore davantage nos contacts avec les usagers et les contrôles. Mais pas au détriment du personnel. Comme je vous l'ai dit, chez Transdev, la priorité c'est le bien-être des salariés pour assurer une qualité de service optimale.

Propos recueillis par Abdel Samari

Abdel Samari

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