ALLÈGRE-LES-FUMADES L’irascible voisin règle ses problèmes à coup de fusil
« Je vais en prendre pour 20 ans mais toi tu ne seras pas là pour voir ! » Michel, 62 ans, vient de tirer un coup de fusil en direction de son voisin. Nous sommes le 21 juillet 2017.
Retraité du bâtiment, Michel vit dans sa propriété d’Allègre-les-Fumades depuis l’âge de 17 ans. En quarante ans, ce passionné de chasse a vu son quartier évoluer avec la construction de nouvelles habitations et l’arrivée de voisins. Des voisins qui, manifestement, dérangent le sexagénaire. « Je suis le plus ancien ! J’étais tranquille, pourquoi on est venu m’emmerder ? On me prend pour un con », vocifère le prévu à la barre du tribunal.
Ce 21 juillet, un camion de 3,5 tonnes passe dans le chemin communal qui jouxte le terrain de Michel pour charger des palettes chez son voisin, Lionel. Sur son passage, le véhicule envoie de la poussière. Pour Michel, c’en est trop. Courroucé, il s’empare de l’un de ses 20 fusils et tire au-dessus de la tête de Lionel. « Je vais en prendre pour 20 ans mais toi tu ne seras pas là pour voir ! », hurle-t-il. Interpellé par les gendarmes, le chasseur ne manifeste aucun regret, au contraire : « Cela devait arriver depuis le temps que ça dure. Et si rien ne change, ça va s’empirer ! Je n’ai pas peur d’aller en prison. »
Depuis cet épisode, Lionel et son épouse vivent désormais dans la peur : « Je passe mon temps à regarder ce qui se passe dans le chemin et je prends des calmants pour dormir ». Le regard dans le vide, Michel, assis à côté de son avocat, reste impassible. « Il ne se rend manifestement pas compte de la gravité des faits ! », s’agace l’avocate de la victime, Valérie Soulié.
« Je suis très bien dans ma tête »
Interrogé par la présidente Annabelle Ledrapier, le prévenu répond à quelques questions de manière peu compréhensible. « Quand vous êtes quelque part et qu’il y en a qui arrivent, qui prennent et qui demandent rien… La mayonnaise elle monte (…) Ce n’est pas que la poussière qui me gêne, c’est le vis-à-vis. Moi, ça fait des années que je suis là ! ». Devant la mine interrogatrice de la présidente du tribunal, il ajoute : « Je suis très bien dans ma tête. »
- Comment comptez-vous agir si une nouvelle altercation se produit ?, l’interroge Annabelle Ledrapier.
- Je me casse et je vais au restaurant, rétorque l’accusé.
La procureure demande le déménagement de l’accusé
Pour lui faire prendre conscience de ses actes, le substitut du procureur, Mélodie Fabre, dresse une longue liste de réquisitions : deux ans de prison avec huit mois de sursis, obligations de soins et d’indemniser les victimes, interdictions d’entrer en contact avec les victimes, de port d’arme pendant cinq ans et de paraître sur la commune d’Allègre-les-Fumades, obligeant ainsi le sexagénaire à déménager. « Vous demandez l’exil à un homme dont le casier est vierge ? Depuis 40 ans, aucun voisin n’a porté plainte ! », s’indigne son avocat. Le prévenu sera finalement condamné à un an de prison totalement assorti d’un sursis avec mise à l’épreuve pendant trois ans. Il devra indemniser les victimes, ne pas entrer en contact avec elles, et se soigner. Il lui est interdit de détenir une arme pendant dix ans. Mais il peut, pour l’instant en tout cas, rester chez lui.
Élodie Boschet