Publié il y a 4 h - Mise à jour le 10.05.2025 - Thierry Allard - 3 min  - vu 37 fois

CARSAN La Compagnie de la côte du Rhône gardoise lance le millésime dans un contexte morose

Vendredi soir, lors de la sortie du millésime 2025 de la Compagnie de la Côte du Rhône gardoise, à Carsan

- Thierry Allard

C’est un moment important dans l’année de la compagnie bachique, à la fois pour le symbole, mais aussi pour faire le point, en présence de nombreux élus locaux, sur l’état de la viticulture locale : la sortie du millésime de Compagnie de la côte du Rhône gardoise s’est tenue vendredi soir à Carsan, et personne n’avait le coeur à rire.

« Je ne m’étais malheureusement pas trompé », commence le président de la Compagnie, Géry Delbecque en évoquant son discours il y a un an à Orsan. Un discours « alarmiste et pessimiste », admet-il, qui s’est malheureusement vérifié : la viticulture est en crise, et l’arrachage de nombreux hectares de vigne a débuté, mitant le vignoble. « D’autres vignes vont être arrachées, et certaines sont d’ores et déjà à l’abandon », poursuit-il, parlant d’une « bombe à retardement », ces vignes à l’abandon pouvant devenir des foyers à maladies et ravageurs, comme le black rot ou la flavescence dorée.

Les solutions ne coulent pas de source. Obliger les propriétaires des parcelles abandonnées à arracher ? « Ils sont déjà exsangues », balaie Géry Delbecque. Y implanter d’autres cultures ? « Sans irrigation, difficile de l’envisager », estime-t-il, notamment pour l’olive, qui peut passer pour une planche de salut. Alors « aujourd’hui plus qu’hier, je suis très pessimiste pour l’avenir de la viticulture et de l’agriculture dans notre pays », lâche le président, avant que Sébastien Lacroix, d’Inter Rhône, ne donne des chiffres qui n’incitent guère plus à l’optimisme.

Car la production de vin, comme sa consommation, est en recul partout dans le monde. Quand on sait que la France est le deuxième producteur mondial, et que la vallée du Rhône le deuxième vignoble de France, on comprend que l’impact de ces reculs ne peut pas ne pas se faire sentir. Notamment dans le Gard, qui représente à lui seul un quart de la production de la vallée du Rhône. Une production qui a le plus grand mal à se vendre à des tarifs satisfaisants, les cours étant plus bas que le coût de production. En clair : les vignerons travaillent à perte.

Alors même si quelques indicateurs ont repris des couleurs, comme les stocks en baisse ou un frémissement sur les sorties de chais, le compte n’y est pas. « Les cours se tiennent désormais, mais ne sont pas satisfaisants », pose Sébastien Lacroix. L’hémorragie est stoppée, mais à quel prix ?

« Dans le Gard, nous allons perdre 800 hectares de Côtes du Rhône »

Et il ne fallait pas compter sur Damien Gilles, président du Syndicat général des vignerons des Côtes du Rhône, pour tenir un discours plus optimiste. Lui voit comme cause à cette « situation inédite » le résultat de « plus de trente ans de matraquage contre l’agriculture française, et notamment la viticulture. Toutes les campagnes contre l’alcoolisme ne font référence qu’au vin », avant de rappeler que l’année dernière, l’alcool « le plus vendu dans la grande distribution en France était une bouteille d’apéritif anisé venant de Marseille au format 1 litre. »

Le vigneron pointe aussi « la concurrence déloyale de produits étrangers » bien moins chers, et une grande distribution qui a tendance à casser les prix, « avec chez un grand hard discounter des bouteilles de Côtes du Rhône à moins de 2 euros. » Un prix loin d’assurer une rémunération convenable au vigneron, cela va sans dire.

La conséquence de cette crise se voit donc avec les arrachages. « Dans le Gard, nous allons perdre 800 hectares de Côtes du Rhône, c’est énorme, jamais vu », affirme Damien Gilles, avant de prévenir les nombreux élus présents : « vous allez faire face à une gestion anarchique du paysage et, avec le non-entretien, des risques de départs de feux, soyez attentifs. » Et le président du Syndicat d’enjoindre les élus à « porter la parole de la viticulture » devant un État « qui ne soutient pas l’agriculture ni la viticulture française. »

La Compagnie a tout de même tenu un chapitre, et a intronisé la maire de Saint-Marcel-de-Careiret et conseillère départementale Carole Bergeri. Une ambassadrice de plus pour les vins de la rive droite du Rhône, qui ont plus que jamais besoin de soutien.

Thierry Allard

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