Publié il y a 10 jours - Mise à jour le 08.06.2025 - Yannick Pons - 2 min  - vu 147 fois

CULTURE Avignon Off : Solitude d’un ange gardien, chronique d'un effondrement

Pierre Forest

- Photo Yannick Pons

Seul sur scène, Pierre Forest, incarne un personnage touchant, ce gardien d'immeuble à la veille de la retraite qui refuse de céder sa place, de quitter ses "locataires". Qui refuse de partir, une fois de plus, longtemps après son exil forcé d’Algérie.

Ancré au cœur du quotidien des autres, cet ange gardien perçoit tout. Comme une araignée au centre de sa toile qui regarde les fils se délier.

Chronique d’un effondrement

Bienvenue dans l’univers de Tony, gardien d’immeuble, mais surtout ange gardien d’humanité. Dans un huis clos minimaliste, c’est toute une société qui s’invite dans sa loge. Écrit par Aude de Tocqueville à partir de dizaines de témoignages de gardiens d’immeubles, le texte tisse les fils d’une mémoire collective, personnelle et sociale.

Le début de la pièce met en scène Tony qui place le courrier dans des boîtes aux lettres, observe, se souvient. Il parle de Luna sa femme partie, qu’il a aimée, des enfants de l’immeuble, de la vieille Héléna et ses plans de carottes, de son frère disparu. Et puis de son Algérie natale, vers laquelle il revient en pensées, comme on retourne à une blessure ancienne. Comme on revoit le film de sa vie avant sa mort. Deux exils pour un seul homme chassé de son pays, et désormais poussé hors de sa loge.

Pierre Forest, Solitude d'un ange gardien • Photo Yannick Pons

La loge devient alors théâtre de la mémoire et des émotions. Lieu clos mais vibrant, presque un ventre protecteur, un utérus où la parole fera éclater les murs. Tony tourne comme un poisson dans un bocal, comme son propre poisson rouge qu’il regarde frétiller dans sa cage jusqu’à ce qu’il le place dans une boîte d’allumettes, sa dernière demeure.

Pudique

Ses seuls rêves d’évasion prennent la forme d’oiseaux en cocotte de papier. C’est un homme seul, qui regarde sa vie en arrière, entre effondrement et résistance, humour feutré et mélancolie. Il a tout perdu, sauf sa loge. Mais bientôt il sera remplacé, là aussi.

Une fin dans la pudeur et l’émotion. • Photo Yannick Pons

Ce spectacle poignant, à la fois chronique sociale et poème de fin de vie, interroge sur la solitude, le déracinement et la dignité silencieuse. La mise en scène semble volontairement dépouillée afin de laisser toute la place à l’interprétation sensible de Pierre Forest, récompensé par Molière en 2017. Même si le texte manque un peu de rythme, l’acteur porte ce one-man-show jusqu’à la fin, dans la pudeur et l’émotion.

>> Relire ici le programme du théâtre de l'Oriflamme

Festival Off d’Avignon, du 5 au 26 juillet à 13h (relâches les 9, 16 et 23). Théâtre de l’Oriflamme. Durée : 1h10.

Yannick Pons

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