L'INTERVIEW Rebecca Roger Cruz aux Suds : « je me suis réveillée en disant : je vais partir en France »

Rebecca Roger Cruz
- Photo Yannick PonsArrivée en France en 2012, la chanteuse, percussionniste et compositrice vénézuélienne Rebecca Roger Cruz donnera un concert aux Alyscamps, à Arles, le 19 juillet, dans le cadre des Moments précieux du festival Les Suds. C’est ici même, dans les jardins arlésiens des Alyscamps, que nous l’avons rencontrée. Entretien.
Objectif Gard. Rebecca, vous êtes arrivée en France en 2012. Pourquoi Lyon ? Pourquoi la France ?
Rebecca Roger Cruz. Oui j’ai débarqué à Lyon en 2012 et je me suis inscrite à la fac et au conservatoire. Dans mon pays, il y a une ambiance bouillonnante, toujours un peu chaotique. Et un jour, à l’âge de 14 ans, je me rappelle que je me suis réveillée en disant : « Je vais partir en France ».
Je fais du chant lyrique, je parle l’opéra. Et en France, il y a cette culture de la musique classique. Je ne voulais pas partir en Espagne, même si ma famille est espagnole. Mais je ne sais pas, j’ai été attirée par la France. J’ai commencé à apprendre le français et je suis venue faire mes études en France.
Comment votre parcours musical s’est-il construit entre le Vénézuela et la France ?
J’ai commencé la musique assez jeune, en autodidacte. Je suis la seule musicienne dans la famille. Ma mère chante très bien, même si elle n’a jamais fait de carrière. Il y a cette culture aussi du flamenco, de la danse. Mon père est vénézuélien, il écoute beaucoup de salsa, de musique brésilienne. Ma mère, elle est plutôt chanson latino-américaine, flamenco.
Ensuite, j’ai développé plutôt un goût pour le rock psychédélique, la musique rock, le blues… Par ce biais-là, j’ai connu aussi les comédies musicales, le rock symphonique et le chant. Et c’est comme ça que j’ai commencé à étudier le chant lyrique au conservatoire à Caracas.
Vos compositions mêlent influences baroques, traditionnelles, jazz et musiques latino-américaines. Comment décririez-vous votre musique ?
Je dirais que ce sont mes compositions qui respirent une langue qui est la mienne, et qui portent une tradition latino-américaine, une influence de flamenco, de musique classique et de jazz. Tout a été écrit pour des cordes, comme une musique de chambre. On n’est pas dans des restitutions d’époque, des instruments… C’est vraiment une proposition moderne. On pourrait dire que c’est la chanson latino-américaine, mais écrite pour des cordes.
Comment s’est formé le quintet qui vous accompagnera à Arles ?
C’est lors d’une résidence d’artistes au monastère de Ségriès, du côté des Gorges du Verdon, que j’ai croisé la route de Sylvain Rabourdin (violon) et de Juri Cainero (percussion). Léonore Grollemund (violoncelle), je l’ai connue à Lyon, dans le cercle des musiques traditionnelles. Quant à Léna Aubert (contrebasse), elle a rejoint l’aventure spécifiquement pour ce projet. L’ensemble réunit les mêmes musiciens sur scène que lors des enregistrements, à l’exception des invités ponctuels. Il ne comprend pas d’artistes vénézuéliens.
Río Abajo est votre premier album solo. Que représente-t-il pour vous ?
Ça fait trois ans que je bosse dessus. J’avais envie de partager mes compositions, de pouvoir m’exprimer plus librement, sans me poser trop de questions sur les styles. Je voulais parler des choses qui me touchent.
C’est la première aventure avec mon nom, mes propres compos. C’est un point de bascule artistique.
Oser… partager des choses très intimes sous ton nom, c’est quelque chose de très différent que lorsqu’on est en groupe. Il y a beaucoup de choses autour de la guérison et du contact avec les éléments qui me touchent beaucoup.
Rio ábájo , ça veut dire quand on se lance en aval de la rivière, quand on se laisse porter par le courant.
Il y a aussi un air baroque de Henry Purcell qui parle des larmes - donc une autre manière aussi de voir l’eau.
Rio ábájo, le premier album de Rebecca Roger Cruz est sorti en mars 2025 chez Airfono
Les Suds à Arles, le 19 juillet