Publié il y a 2 ans - Mise à jour le 20.02.2022 - anthony-maurin - 3 min  - vu 338 fois

NÎMES Suspension/Stillness Carré d'Art, l'art contemporain décolle

Le Carré d'Art (Photo Archives Anthony Maurin).

Étel Adnan (Photo Etel Adnan). • Agop Kanledjian

Cette exposition rassemble les œuvres d’artistes qui chacune à leur façon permettent de créer un moment suspendu. Elles sont pour la plupart très peu exposées en France, alors qu’elles ont une grande visibilité internationale.

L’exposition présente cinq artistes de différentes générations qui nous amènent à suspendre le temps et inclinent à la contemplation. Elle réunit des œuvres importantes récemment entrées dans la collection. Une installation de Lili Dujourie (née en 1941 en Belgique), des sculptures de Charlotte Posenenske (née en 1930 à Wiesbaden, décédée en 1985), Etel Adan (née en 1925 à Beyrouth) ou Trisha Donnelly (née en 1974 à San Francisco) associée à d’autres de leurs œuvres. Les grandes peintures de Suzan Frecon (née en 1941 à Mexico en Pennsylvanie), très rarement présentées en France, dialoguent avec les paysages d’Etel Adnan.

Lili Dujourie et Charlotte Posenenske répondent à la fin des années 1960, chacune à leur façon, à l’orthodoxie du Minimalisme. Côté Couleurs, Côté Douleurs (1969) reprend l’approche phénoménologique et la littéralité des formes minimalistes tout en les déjouant avec des références directes à l’histoire de l’art mais aussi au corps et aux sensations. Parallèlement à sa pratique sculpturale elle s’intéressera très tôt à la performance.

Lili Dujourie (Photo Lili Dujourie).

Entre 1966 et 1968, Charlotte Posenenske conçoit et expose 6 séries de sculptures (A B C D E DW). Elle reprend le processus de fabrication industriel de l’Art Minimal mais en abordant les questions socio-économiques du moment en contournant le marché de l’art. Le prix de vente des œuvres correspond à leur prix de production. Elle expose avec Sol LeWitt, Carl André, Donald Judd et Hanne Darboven mais elle se retire du monde de l’art en 1968 pour poursuivre une thèse de sociologie et s’engager dans le domaine social.

Depuis cinq décennies, Suzan Frecon réalise de grandes peintures abstraites et des œuvres sur papier qui sont à la fois minimalistes et expressives. Réalisées au cours de longues périodes de temps, les tableaux témoignent de l’activité de peindre. Les mélanges de pigments révèlent un usage sensible, tactile de la couleur où apparaissent des contrastes entre les surfaces mates et brillantes. Ses compositions sont caractérisées par la présence de formes courbes souvent asymétriques. Ces surfaces colorées sont reprises dans les différentes compositions et évoluent de tableaux en tableaux, se répondent rythmiquement les unes aux autres.

Les peintures d’Étel Adnan, le plus souvent de petit format, sont également des variations chromatiques sur les mêmes motifs. Ses compositions abstraites révèlent l’horizon, le soleil, des paysages maritimes ou le Mont Tamalpais près de San Francisco. La palette colorée, d’une intense luminosité, nous fait entrer dans un monde élégiaque. Marquée par l’exil et le traumatisme de la guerre au Liban elle n’a de cesse de créer en traversant les langues et les continents pour être aujourd’hui une des voix essentielles du Moyen Orient.

De la performance à la projection vidéo en passant par le dessin et l’installation sonore, Trisha Donnelly emploie l’ensemble ces techniques pour créer ce qu’elle appelle une sculpture ou "une situation sculpturale." Réduisant l'information issue de conventions visuelles et linguistiques, elle invite le spectateur à attiser son intuition, sa mémoire, laisser libre cours à de libres associations d'idées. L’image numérique projetée en grand format, Sans titre, 2014, est à la fois une image hermétique et sensible qui résiste à l’appropriation. A l’opposé de la consommation des images elle invite le spectateur à s’arrêter, succomber à la magie, perdre ses repères.

À voir à Carré d'Art jusqu'au 13 mars.

Anthony Maurin

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