PONT DU GARD Le chef d’orchestre Gabriel Garrido : "la musique baroque est populaire"
Le célèbre chef d’orchestre Argentin Gabriel Garrido sera au Pont du Gard samedi et dimanche pour deux représentations exceptionnelles de l’opéra Orfeo de Claudio Monteverdi.
Un retour aux sources pour le chef d’orchestre installé à Montfrin depuis quelques années, auteur il y a vingt ans avec le baryton Argentin Victor Torres de la version considérée comme de référence d’Orfeo. Un complice qu’il retrouvera au Pont du Gard ce week-end, pour deux concerts qui s’annoncent déjà historiques. Interview.
Objectif Gard : vous semblez avoir une relation spécifique avec Monteverdi et son oeuvre. Qui est-il pour vous, qu’est-ce qui vous touche dans son oeuvre ?
Gabriel Garrido : pour moi, c’est le plus grand compositeur de l’histoire de la musique, c’est simple ! Et je suis prêt à en discuter avec ceux qui ne seraient pas d’accord… Je suis un amoureux de la Renaissance italienne et de la musique baroque, qui est une musique haute en couleurs. Pour moi, Monteverdi est la figure la plus représentative de cette exaltation des sens, de la bascule de la Renaissance au début du baroque. C’est lui qui invente la musique baroque, c’est un génie, qui a inventé de nouvelles formes d’expressions, un langage à lui tout seul qui s’est répandu dans tout l’occident. Monteverdi m’a enseigné une autre façon de voir le baroque, que c’est dans le chaos que les choses se créent.
On célèbre les 450 ans de la naissance de Monteverdi, et Orfeo est un des plus anciens opéras jamais créés. Est-il toujours actuel?
Aujourd’hui, la musique classique est devenue élitiste, la musique contemporaine est moins populaire. Le baroque est mille fois plus populaire. La musique baroque est populaire, elle parle directement aux gens. Ce qui plaît dans la musique baroque, c’est aussi son exaltation, et je me suis lancé dans une interprétation beaucoup plus exaltée. Le baroque, c’est la condition humaine exaltée, et Monteverdi amène plus loin l’humanisme de la Renaissance. Il exalte nos fautes, nos pensées, nos colères, avec un langage encore utilisé de nos jours.
Vous êtes tombé amoureux du Gard et de Montfrin il y a quelques années. La musique est-elle plus belle quand elle est jouée dans des vieilles pierres ?
Oui, sans hésitation. C’est une région pleine de contrastes, de vie, il y a des siècles d’histoire et une histoire passionnelle des pierres qui correspond à Monteverdi. Monteverdi, c’est la perfection dans l’imperfection.
Jouer dans un petit village comme Montfrin ou au Pont du Gard alors que vous êtes reconnu mondialement, c’est une autre manière de transmettre ?
Oui, le but est toujours la transmission de ma passion. Je suis un enfant des quartiers sud de Buenos Aires, les quartiers populaires, et j’ai l’habitude de dire que si ma concierge comprend ce que je fais, alors mon but est atteint. Je veux, avec humilité, montrer que la musique baroque est pour tout le monde.
Ces deux concerts marquent aussi vos retrouvailles avec le baryton Victor Torres…
C’est avec lui que j’ai vécu le moment le plus haut de ma carrière, il y a vingt ans, avec l’enregistrement de l’Orfeo. Je lui ai demandé s’il voulait venir pour fêter cet anniversaire, ça fait dix-sept ans qu’on n’a pas joué ensemble, c’est très émouvant. On a beaucoup de chance que le Pont du Gard ait accepté. On est un peu les « vieilles canailles » de l’Orfeo !
L’Orfeo de Monteverdi, direction et reconstitution musicale Gabriel Garrido, Orfeo Victor Torres, mise en scène Haydée Pino. Deux représentations sale Pitot, rive droite, samedi 16 septembre à 20 heures et dimanche 17 septembre à 17 heures. Tarif plein 28 euros, réduit 22 euros. Quatre représentations du théâtre de papier d’Eric Poirier, mises en musique par la claveciniste Ryoko Katyama, seront jouées le 15 septembre à 14 heures, le 16 septembre à 17 heures et le 17 septembre à 11 et 14 heures. À partir de 10 ans. Infos et réservations ici.
Propos recueillis par Thierry ALLARD