Publié il y a 3 ans - Mise à jour le 28.05.2021 - marie-meunier - 4 min  - vu 2115 fois

FAIT DU JOUR Débroussaillage et futur projet immobilier : le vallon des chèvres au coeur des interrogations

Plusieurs riverains ont monté l'association "Préservation du vallon des chèvres". Ici : Dimitri Maraine, le président, Caroline Blanc la trésorière et Jeanne Castelain une adhérente. (Marie Meunier / Objectif Gard)

Le vallon des chèvres est connu pour être un endroit de promenade pour les Villeneuvois mais c'est aussi le départ de plusieurs tracés de randonnée. (Marie Meunier / Objectif Gard)

À Villeneuve-lez-Avignon, le vallon des chèvres est connu pour être une zone naturelle paisible, prisée des randonneurs. Pourtant elle génère beaucoup de bruit depuis quelques semaines. En cause : le défrichage d'un terrain jugé "disproportionné"  par des riverains qui s'inquiètent de la suite.

Ce défrichage, il est actuellement réalisé sur un terrain appartenant au promoteur Espace 2, propriétaire depuis le début des années 2000. Ce val en contre-bas du domaine de la Tour est bien connu des Villeneuvois et des marcheurs puisque c'est le départ d'un chemin de randonnée joignant le château pointu.

Depuis quelques jours, certains ont pu remarquer que des engins étaient sur place pour défricher le terrain. Une opération effectuée dans le but de limiter le risque incendie à l'approche de l'été. C'est un acte obligatoire imposé par la DDTM (Direction départementale des territoires et de la mer) et qui s'inscrit dans l'orientation d'aménagement et de programmation (OAP) prévue par la commune à cet endroit.

"Des arbres de 25-30 cm de circonférence ont été coupés", atteste Dimitri Maraine, habitant le Domaine de la Tour depuis octobre. (Marie Meunier / Objectif Gard)

Sauf qu'aux yeux des riverains du Domaine de la Tour, "ce défrichement va bien au-delà de ce qui devrait être fait. Des arbres de 25-30 cm de circonférence ont été coupés", indique Dimitri Maraine. Lui et plusieurs habitants des chemins Pierre Longue, de Safrus et des Oliviers ont alors décidé de se monter en association "Préservation du vallon des Chèvres" pour défendre le lieu.

"Ce site comporte des espèces protégées"

D'emblée, Dimitri Maraine a publié sur les réseaux sociaux des vidéos pour alerter des dégâts engendrés par les pelleteuses. Les élus de la liste d'opposition sociale, écologique et solidaire ont d'ailleurs mis le sujet sur la table lors du dernier conseil municipal la semaine dernière. L'un d'entre eux, Morgan Buisson, déplore le "massacre de cette zone naturelle" en pleine période de nidification. "Ce site comporte des espèces protégées et nous tenons à votre disposition l'étude de la zone faite à la demande des riverains par Nicolas Bastide, un écologue expert naturaliste ornithologue. L'Office français de la biodiversité confirmera d'ailleurs l'interdiction de la destruction de ces 22 espèces protégées d'oiseaux, de ces trois espèces de reptiles, du papillon de la Diane et de leurs habitats."

Aux yeux des riverains, le débroussaillage effectué va au-delà des prérogatives destinées à se prémunir du risque incendie. (Marie Meunier / Objectif Gard)

Alertée par les remontées des riverains, la mairie a vite réagi en envoyant sur place les services et la police municipale. "Nous avons saisi le propriétaire par mail en mettant en copie la DDTM pour qu’il justifie. S’il est allé au-delà de ses prérogatives, nous lui demanderons de replanter et de se conformer à ce qui est nécessaire", a répondu Nathalie Le Goff, adjointe villeneuvoise déléguée au Foncier et à l'urbanisme. Elle rappelle toutefois que l'action de la mairie est limitée car il s'agit d'un terrain privé et non communal.

La tranche 2 du projet immobilier du domaine de la Tour freinée par le risque inondation

Contacté par Objectif Gard, Gabriel Barda, PDG d'Espace 2 et propriétaire du terrain, affirme qu'il n'a fait que suivre les règles : "L’État nous donne l’obligation en tant que propriétaire de débroussailler les terrains à l’approche de la saison sèche pour limiter les risques incendies. Si nous ne le faisons pas, d’abord, on est en infraction, et en plus, on s’expose à ce que la mairie le fasse à notre place et à nos frais. On a déjà eu un incendie sur un terrain qui nous appartient à Uzès et qui n’a pas été débroussaillé. Ça a nécessité l’intervention des pompiers..."

Quant à l'impact environnemental de ce débroussaillage, il rétorque : "En quoi c’est contre la nature ? Au contraire, les belles espèces se trouvent favorisées par ce traitement. Les beaux arbres vont se développer encore mieux."

Si l'association "Préservation du vallon des chèvres" s'alarme, c'est aussi parce qu'elle craint que cet entretien des espaces soit le préambule à la construction d'un projet immobilier. "Peut-être est-ce un prétexte pour évaluer le terrain?", soulève Dimitri Maraine. D'autant que l'idée de construire la tranche 2 du domaine de la Tour à cet endroit ne date pas d'hier. Mais elle avait été mise à l'arrêt au titre de la loi sur l'Eau.

85% du terrain passé inconstructible mais un projet envisagé pour plus tard

C'est d'ailleurs la DDTM qui avait exigé que le projet du Domaine de la Tour soit scindé en deux tranches. La première (là où vivent plusieurs riverains de l'association) a pu être réalisée, mais la deuxième a été suspendue à cause du risque inondation, avec notamment une zone placée en aléa fort. Sans parler de crue éventuelle, car en cas de pluie les eaux tombées des hauteurs environnantes, notamment le plateau de Pujaut, se déversent toutes dans ce ravin. Aux yeux des riverains, construire des logements et donc imperméabiliser davantage les sols à cet endroit serait dangereux. Sans parler "du cadre de vie" qui en prendrait un coup.

Alors ils se posent la question : quelle sera la nature de la construction ? Pour combien de ménages ? Est-ce que cela sera une barre d'immeuble ? Le promoteur s'insurge : "Une barre d’immeuble ? Pas du tout, le plan local d'urbanisme (PLU) encadre strictement." Surtout qu'aujourd'hui, 85% de ce terrain de 4 hectares a été déclaré inconstructible. Ce qui limite considérablement les possibilités, comme nous fait remarquer le promoteur. Ce dernier reprécise : "On a bien un projet, qui pour l’instant n’est pas en cours mais ultérieurement oui. Il y a des études à faire, on n'en est pas là. Mais ça n’a rien d’une nouveauté."

On le sait, le secteur de Villeneuve-lez-Avignon est prisé. Alors bien sûr, quand une place est libre, les projets immobiliers fleurissent. Mais pour qui ? La commune est particulièrement carencée en termes de logements sociaux et le paye cher chaque année. Se tourner vers le logement collectif pour combler ces manques paraît de plus en plus inéluctable. Mais est-ce que cela rapporte suffisamment aux promoteurs ? Pas sûr... Et est-ce que cela doit se faire au détriment du peu d'espaces vierges encore disponibles sur la commune ? Pas sûr non plus...

L'urbanisme n'est pas chose simple surtout quand la loi SRU prend en étau les communes qui n'atteignent pas leurs 25 % de logements sociaux. Communes qui en plus, comme Villeneuve, prônent le cadre de vie comme l'une des priorités absolues. Et communes qui doivent prendre en compte l'environnement et limiter la bétonnisation. Un beau casse-tête pour les mairies mais un véritable enjeu pour les années à venir.

Marie Meunier

Marie Meunier

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