FAIT DU SOIR Le tourisme en forte baisse au Grau-du-Roi, "du jamais vu !"

La plage du Grau-du-Roi déserte.
- Photo Lïana DelgadoEn plein cœur des vacances d’été, les touristes se font rares au Grau-du-Roi. Une situation complexe pour les commerçants locaux qui constatent une baisse de chiffre d'affaires conséquente.
À cette période de l’année, les rues et les plages du Grau-du-Roi devraient être noires de monde. Mais cet été, la station balnéaire camarguaise semble tourner au ralenti. Les touristes sont là, mais en plus petit nombre, et avec un budget plus serré. Une tendance confirmée par les commerçants, hôteliers et restaurateurs du centre-ville et du front de mer. Annie, venue de Lille avec ses trois enfants, n’a pas d’autre choix que de limiter ses dépenses : “La location est devenue très chère. Une fois qu’on a payé le logement et le transport, il ne reste plus grand-chose pour les restaurants ou les sorties. À quatre, ça monte très vite.”
Une autre manière de consommer
L’hébergement et le transport pèsent de plus en plus lourd dans le budget global, laissant peu de marge pour les extras du séjour. Un constat partagé par Nadine et Jean-Pierre, un couple de retraités venus, eux aussi, passer quelques jours en bord de mer. S’ils continuent de venir régulièrement au Grau-du-Roi, leur façon de consommer a changé : “Avant, on se faisait plaisir deux fois par jour au restaurant. Aujourd’hui, on y va qu'une fois par jour, et c’est déjà un luxe. Avec les menus à 35 ou 40 euros, on ne peut pas faire autrement.”
Le phénomène touche toutes les générations et tous les profils : familles actives, seniors, jeunes. Confrontés à une baisse du pouvoir d’achat, de nombreux Français ajustent leurs habitudes de consommation, y compris en période de vacances. Chaque euro compte. Et au-delà des dépenses sur place, certains réduisent directement la durée de leur séjour. C’est un choix fait par Franck, un Parisien qui n’a plus les moyens de partir aussi longtemps qu’avant. “Avant le covid, on prenait 15 jours de vacances. Avec la hausse des prix actuels, on part seulement une semaine. C’est dommage, mais on ne peut pas se permettre de faire autrement”, assure le père de famille.
Tourisme au ralenti
La prudence des vacanciers dans leur budget se ressent fortement chez les professionnels du tourisme. Une baisse de fréquentation et des changements d’habitudes sont clairement observés. Au restaurant de l’Hôtel de la Plage, Philippe Djaidi dresse un premier bilan : “Du côté restauration, c’est catastrophique. Nous sommes à -25 % de chiffre d'affaires par rapport à juillet 2023, et ce n'était déjà pas une bonne année. Pour l'hôtel, je n’ai pas de recul par rapport aux autres années, car il était en travaux. Le mois d’août s’annonce bien, mais le mois de juillet est calme.”
À l’hôtel Splendid Camargue, situé en première ligne face à la mer, on constate un phénomène inédit : les réservations de dernière minute. “Avant, l’hôtel était complet au moins deux semaines à l’avance. Aujourd’hui, on finit complet, mais seulement le jour même. Les chambres sont réservées au dernier moment. C’est du jamais vu”, explique Patrice Le Tohic, premier de réception.
Moins d’animations
Autre signe d’un été plus timide : l’ambiance en soirée. Guillaume Thevenin, patron du glacier Glaces Maison, n’a jamais vu les rues aussi vides après 21 heures. “C’est vraiment très calme. Les gens sortent moins, et il y a moins de festivités que les années précédentes. Parfois, il y a des petits concerts, mais ils se terminent à 20 heures. Beaucoup d’habitants de la région ne viennent plus à cause de l’ambiance nocturne inexistante”, assure-t-il. Ce dernier a fait -15 % de chiffres d’affaires par rapport à juillet 2024.
Dans les commerces, la situation est encore plus inquiétante. Pour une boutique de vêtements du centre, la réalité est rude. “On n’a pas du tout de clients. C’est une catastrophe. Déjà que les touristes galèrent à payer pour dormir et se restaurer, alors venir faire du shopping, ce n'est pas imaginable. On n'est pas indispensable, donc on nous esquive, ce que je peux comprendre”, analyse la responsable. Les raisons de cette baisse de fréquentation touristique sont multiples : pouvoir d’achat en baisse, prix de l’immobilier saisonnier en forte hausse et un calendrier d’animations locales plus allégé que les années précédentes.
Août, dernier espoir
Malgré tout, certains restent optimistes. Août s’annonce mieux rempli, et la météo semble enfin stable. Plusieurs hôteliers confirment une hausse des réservations pour la première quinzaine. Robert Crauste, maire de la commune, assure : “L'activité touristique sur le Grau-du-Roi s’est annualisée. Sur les 9 600 000 nuitées, 42 % sont prises en juillet et août et 58 % en dehors de ces deux mois d’été. On observe depuis plusieurs années que le mois de juillet n’est plus un mois intense, tandis que le mois d’août reste un mois chargé où la fréquentation est à son maximum.” Pour les commerçants, le mois d’août est un moment crucial pour tenter de rattraper un mois de juillet compliqué, mais aussi pour maintenir un équilibre financier fragilisé. C’est désormais sur août que reposent les derniers espoirs d’un été réussi.