Publié il y a 4 ans - Mise à jour le 29.08.2019 - anthony-maurin - 3 min  - vu 1111 fois

NÎMES Sixième campagne de fouille et énième bonne surprise

Le rempart antique de la route de Sauve dévoile encore de belles choses.
Passionnantes découvertes (Photo Anthony Maurin).

En bas de la route de Sauve, les restes du rempart augustéen de Nemausus (Photo Anthony Maurin).

Nîmes, enfin Nemausus, avait le cinquième plus vaste rempart du monde romain. C'est un fait même si on a encore du mal à le comprendre ! En effet, la cité des Antonin était un lieu de pèlerinage et même si son enceinte était conséquente, on s'imagine mal les tenants et les aboutissants d'une telle construction.

Richard Pellé, responsable des fouilles nîmoises pour le rempart augustéen pour le compte de l'INRAP, le dit à quelques jours de la fin de l'ultime campagne située sur les flanc de la route de Sauve (Montaury) : " Nîmes a une belle enceinte avec des tours énormes qui mesurent a minima onze mètres de diamètre contre neuf mètres en moyenne ailleurs. Les tours sont variées. Il en existe des saillantes. Ce sont les seules de l'Empire romain, c'est exceptionnel ! "

Richard Pellé au pied de " son " rempart (Photo Anthony Maurin).

Nous avons l'habitude, depuis maintenant plus de six campagnes estivales, d'entendre cela mais les études vont encore nous en apprendre plus sur l'antique édifice et sur ce qui pouvait se passer aux environs. " C'est un rempart ostentatoire qui servait à montrer le pouvoir des Volques arécomiques (*) et de leurs édiles. C'est colossal comme construction et par conséquent, très onéreux. On peut imaginer que l'argent qui a servi pour l'édifier devait venir de l'atelier monétaire de la ville ", estime Richard Pellé.

Les fouilles seront terminées en fin de semaine (Photo Anthony Maurin).

Rappelons ici qu'Auguste, le premier empereur romain, qui a succédé à Jules Cesar, a permis à Nemausus de bâtir son rempart. Il y a aussi implanté un atelier monétaire duquel l'As de Nîmes, frappé de la victoire augustéenne d'Actium, est sorti et s'est répandu à travers l'empire.

" Très peu de villes gauloises avaient à l'époque un rempart. On parle d'une quinzaine de cités, évoque Richard Pellé. Celui de Nîmes a été permis par Auguste en 16-15 avant notre ère. C'est ce que l'on peut lire sur la porte Auguste. Le temps de réunir les fonds, le chantier a débuté aux alentours de l'an 5 et s'est poursuivi jusqu'en 30 sous l'empereur Tibère. Cela a duré une génération et on s'est rendu compte que plusieurs équipes se sont rencontrées car le chantier est très homogène. Nous avons encore des interrogations. " Les tours auraient, par exemple, été construites en premier, reliées plus tard par les murs de courtine (muraille).

Des ossements adultes dans une tombe. Ailleurs sur le site, des clous évoquant la présence d'un coffre funéraire, ancêtre du cercueil, ont été retrouvés (Photo Anthony Maurin).

Au pied des vastes remparts, en-dehors de la ville, un espace public : le monde des morts. Si devant l'amphithéâtre trois tombes avaient été découvertes, ici, c'est le jackpot ! Richard Pellé a eu quelques belles surprises. " En prolongeant cette étude du rempart, nous sommes arrivés à ses pieds. Une fois le niveau architectural bouclé, nous voici sur la zone funéraire. Elle est en contrebas, publique et tout le monde pouvait s'y faire enterrer. Nous avons de nombreuses informations à digérer mais nous avons trouvé des choses importantes, notamment sur le traitement réservé aux corps périnataux (du fœtus au bébé âgé de six mois). Le monde des vivants était à l'intérieur des remparts, les adultes décédés étaient ensevelis à l'extérieur. Pour les enfants âgés de moins de trois ans, ils n'avaient pas de statut réel mais on se rend compte que les parents demeuraient des parents et qu'ils attachaient un soin tout particulier à leur défunt bébé. Nous voyons ici les rites funéraires pratiqués. "

Au loin sur la droite, la Tour Magne, autre tour du rempart. En bas, la route de Sauve (Photo Anthony Maurin).

Un chantier inouï pas forcément composé d'esclaves, des rites surprenants comme la présence, sur moins de 100 m², de plus de soixante tombes qui parfois se superposent ! Ces dernières étaient signalées par de plus ou moins grossières stèles et des dépôts divers ont été retrouvés.

" La fouille est exhaustive et maintenant achevée. On ne peut pas aller sous la route de Sauve mais dès la fin de la semaine, nous rebouchons définitivement. Les politiques et l'administration choisiront le devenir de cet espace ", conclut l'archéologue qui a déjà sévit à Nîmes, au pied de l'amphithéâtre, là où s'érigeait le rempart. Aujourd'hui mise au jour d'une année sur l'autre, l'enceinte est maintenant mieux comprise qu'il y a quelques décennies.

Si on trouve les financements, on peut imaginer connaître et analyser le contenu antique de ces "marmites" qui ont aussi servi dans le monde des morts (Photo Anthony Maurin).

À l'heure où la Ville candidate à l'inscription à l'UNESCO, il est bon de noter que ces vestiges ne peuvent être oubliés. Les mettre en valeur, les éclairer, les faire visiter et les mettre aux normes pour une accession au grand public deviennent des nécessités. Depuis 1989, l'enceinte romaine du Haut-Empire est inscrite aux Monuments Historiques. À 800 mètres de la majestueuse Tour Magne, ne peut-on pas imaginer un parcours qui relierait les deux pour ne faire plus qu'un ? Comme avant !

* Avec les Volques Tectosages, les Volques Arécomiques constituent un peuple celte qui aurait émigré au IIIe siècle avant J.C., depuis les régions danubiennes jusque dans le sud de la Gaule.

Anthony Maurin

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