Publié il y a 3 ans - Mise à jour le 15.08.2020 - marie-meunier - 4 min  - vu 3175 fois

FAIT DU JOUR Les visiteurs attendus pour le top départ de la récolte de l'oignon doux de Vers-Pont-du-Gard

Cette variété tombée dans l'oubli dans les années 60 a été réintroduite par quelques producteurs passionnés
L'oignon doux de Vers est une variété tombée dans l'oubli dans les années 60 et qui était cultivée sur la commune depuis le XVIIIe siècle. (Marie Meunier / Objectif Gard)

Laurent Iampietro et Jérôme Taulelle sont les deux principaux producteurs de l'oignon doux de Vers-Pont-du-Gard. Ils cultivent 20 000 oignons sur une production totale annuelle de 40 000. (Marie Meunier / Objectif Gard)

De 500g jusqu'à 2kg. C'est le poids exceptionnel de l'oignon doux de Vers-Pont-du-Gard, contre 100g pour un bulbe classique. Cette variété ancienne a disparu dans les années 60. Depuis bientôt 2011, une association l'a réintroduite et essaye de la faire connaître. Pour la première fois, elle organise ce samedi 15 août une journée découverte à l'occasion du premier jour de récolte. 

De 9 à 12h, les visiteurs pourront se rendre au hangar de la Marquise de Vers pour cueillir directement dans le champ leurs propres oignons et déguster les premiers de la saison. Aux mêmes heures, rendez-vous aussi à la noria encore en activité, route d'Argilliers, irriguant les cultures maraîchères. À partir de 15h, des oignons doux seront vendus à la Bégude Poulon où il sera aussi possible de rencontrer et de discuter avec les producteurs. Enfin, dès 18h, le groupe Western Bell fera l'animation musicale et il sera possible de déguster des tapas faits à base d'oignon de Vers avec du bon vin.

Aujourd'hui, on compte 12 producteurs d'oignons doux de Vers sur la commune, soit une production annuelle de 40 000 unités par an équivalent à 30 tonnes. Dans les années fastes, lors de la première moitié du XXe siècle, c'était plutôt de l'ordre de 100 tonnes annuelles réparties entre huit producteurs qui faisaient entre 100 000 et 200 000 oignons chacun. Deux époques, deux ambiances...

Véritable fleuron économique en son temps, la culture de l'oignon doux fait partie de l'histoire du village de Vers depuis le XVIIIe siècle. Au point qu'on appelait les habitants de Vers les "mangacels", littéralement les mangeurs d'oignon en patois. "On dit qu'on envoyait des oignons au front pendant la guerre 14-18 pour nourrir les soldats. Ils les mangeaient crus avec le pain. Ils étaient tellement doux qu'on pouvait les manger comme ça, sans avoir la bouche en feu", raconte Jérôme Taulelle, président de l'association de l'oignon doux à la tête de la Marquise de Vers.

Plus il est gros, plus il est doux et moins, il vous fera pleurer

Lui et Laurent Iampietro, son vice-président, le considèrent vraiment comme un légume à part entière. Sa douceur, il la doit à son imposante taille. Plus il est gros, plus il est doux et moins il vous fera verser une larmichette au moment de la coupe. Pour le rendre grassouillet, tout est une question de densité dans les rangées de plants. S'il a beaucoup d'espace, il pourra atteindre les 2kg. De quoi tenir quelques repas, même si en moyenne, son poids s'approche plus des 800g, ce qui est déjà pas mal. Cet oignon se caractérise aussi par son aspect brillant, ses rouelles épaisses et translucides, sa chair blanche et ferme et son goût sucré avec des arômes poivrés.

L'oignon doux de Vers fait en moyenne 800 g. Mais son poids peut varier entre 500 g et 2 kg pour les plus gros spécimens. Sachant qu'un oignon classique fait en moyenne 100 g. On distingue bien ici son importante taille à côté d'une tomate. (Marie Meunier / Objectif Gard)

On est loin des caractéristiques de la variété phare du Gard, connue dans toute la France, l'oignon doux des Cévennes. Les producteurs versois ne le considèrent pas comme un concurrent pour autant. "On n'est pas sur le même marché, pas la même agriculture... Notre oignon est plus rustique, avec un calibre bien à lui qu'on ne veut pas dénaturer", affirment-ils.

La culture de l'oignon doux a été abandonnée petit à petit dans les années 60. Plus assez rentable. C'est aussi une décennie où la consommation de nécessité a commencé à être remplacée par les produits d'envie. Les vignes et les cerisiers ont détrôné les champs d'oignons jusqu'à disparaître. C'est pourquoi Laurent Iampietro, Jérôme Taulelle et quelques producteurs ont œuvré pour réintroduire cette variété ancestrale sur les marchés, avec le soutien du maire de l'époque, Marc Poulon, et la Chambre d'agriculture. Ils ont mis la main sur d'anciennes graines pour relancer la production. D'année en année, ils ont affiné les récoltes pour garder les meilleurs bulbes, se rapprochant le plus possible de l'oignon doux de Vers originel. En 2020, on atteint une homogénéité de 90-95%. "C'est une très bonne copie. Il y ressemble, il a le même goût, la même conservation", assure Laurent Iampietro.

Un produit de niche qu'on pourra bientôt trouver ailleurs qu'à Vers ?

Encore aujourd'hui, pour garantir une production de qualité et assurer la pérennité du produit, les plus beaux bulbes de l'année précédente sont sélectionnés chez les producteurs et replantés pour la production de graines l'année suivante. Depuis 2016, la culture de cet oignon est soumise à un cahier des charges précis : il doit faire minimum 500 g, être séché, nettoyé par les producteurs... Les oignons sont plantés en avril, désherbés, soulevés et ramassés à la main le 15 août pour une agriculture raisonnée. Ceux cultivés par ces deux principaux producteurs versois sont même labellisés HVE (Haute valeur environnementale).

Les producteurs qui ont lancé en 2011 l'association de l'oignon doux de Vers-Pont-du-Gard espère maintenant pouvoir l'exporter partout en France voire à l'étranger grâce à une production qui augmente d'année en année. Au début de sa réintroduction, 8 000 oignons doux étaient cultivés contre 40 000 en 2020. (Marie Meunier / Objectif Gard)

La zone de production est vraiment limitée à la commune de Vers. Un territoire parfaitement adapté par son climat sec, chaud et ensoleillé doté de sols secs et argileux traversés par de nombreuses sources. Cette année, après presque dix ans de travail, les producteurs de l'oignon doux de Vers envisagent de mener leur pépite plus loin et élargir sa vente. Freinés par leur petite production, ils éclusaient quasiment l'intégralité des bulbes durant la foire du 3e dimanche de septembre. Ils sont quasiment introuvables dans le commerce sauf sur quelques marchés de l'Uzège-Pont-du-Gard. Au départ de la réintroduction, 8 000 oignons étaient produits contre 40 000 aujourd'hui.

"On est en train de voir à l'expédier partout en France, voire en dehors des frontières. Mais avant, il fallait qu'on ait un oignon qui soit à la hauteur et avoir suffisamment de graines pour faire des volumes assez importants. C'est la première année où on l'envisage", développe Jérôme Taulelle. Il faut compter entre 3 et 4€ le kilo pour acheter ce gros oignon. Une taille qui fait son identité mais qui peut aussi faire peur aux consommateurs, décontenancés parfois devant ce gabarit hors-normes. "Faut que les gens le goûtent pour l'adopter", poursuit-il.

L'association s'évertue à donner des idées de recettes pour débloquer les a priori des clients : farcis, en tarte, en beignets, en pissaladière, crus avec une pincée de sel... Il y a des dizaines de façons de déguster l'oignon doux de Vers. Même le célèbre critique gastronomique, François-Régis Gaudry s'était laissé séduire en 2019 par ce produit de niche. Tout comme le journaliste et présentateur télé, Jacques Legros, qui avait même ramené une cagette dans le train... Déjà gros par sa taille, l'oignon doux de Vers deviendra grand par sa notoriété. Ses producteurs y travaillent ! Avec l'AOP (appellation d'origine protégée) en ligne de mire ?

Marie Meunier 

Tout le programme de la journée découverte ici et ici.

Marie Meunier

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