Publié il y a 2 ans - Mise à jour le 17.06.2021 - marie-meunier - 4 min  - vu 784 fois

BAGNOLS/CÈZE Comment les élèves infirmiers ont-ils vécu la crise sanitaire ?

Les élèves de l'IFSI de Bagnols/Cèze ont raconté comment ils avaient vécu leur formation bousculée par la crise sanitaire. Ils ont été largement mis à contribution pour prêter main forte aux soignants. (Marie Meunier / Objectif Gard)

C'est en 1976 qu'a été créé l'institut de formation aux soins infirmiers (IFSI) de Bagnols/Cèze. Mais jamais depuis son ouverture, les élèves n'avaient été confrontés à un contexte sanitaire aussi tendu. Comment, à tout juste 20 ans, vit-on le fait d'être projeté dans une crise inédite ? Comment élèves et enseignants ont surmonté ces moments difficiles et se sont adaptés pour poursuivre une formation de qualité ? Ils racontent.

On a beaucoup parlé des soignants pendant la crise sanitaire et du grand travail qu'ils ont accompli auprès des malades. Mais ils n'étaient pas les seuls à être sur le pont pendant des mois. Il y avait aussi des élèves des écoles d'infirmiers. Des étudiants qui entament tout juste leur cursus dans les métiers de la santé et qui se sont trouvés confrontés à une situation inédite.

Beaucoup ont vu leur stage annulé et ont été réquisitionnés pour affronter la crise et prêter main forte. "Il a fallu que les étudiants répondent rapidement aux structures et établissements d'accueil et palier l’absentéisme croissant dû aux cas de covid parmi le personnel. D'ailleurs, nos élèves n'ont pas non plus été épargnés, plusieurs ont été contaminés par le virus", retrace Danièle Payan, directrice de l'IFSI bagnolais.

Les étudiants ont aussi été mobilisés pour garder les enfants du personnel du centre hospitalier à l'IFSI, filtrer l'entrée de l'hôpital, brancarder les malades, tenir les tablettes tactile pour que les résidents calfeutrés de l'Ehpad des 7 sources puissent échanger avec leurs proches... "Si on n'avait pas eu les étudiants, ça aurait été catastrophique. C'est une chance d'avoir cet IFSI", atteste Jean-Philippe Sajus, directeur du centre hospitalier, qui rappelle qu'en plus, le Gard a été le département le plus impacté d'Occitanie lors de la 2e vague. Jusqu'à 30 lits covid avaient été accordés à l'établissement bagnolais, sans compter les lits de réanimation.

"On s'est tous pris une claque"

Amandine, 22 ans, était en première année lorsque le premier confinement a été proclamé. Elle a été réquisitionnée pour garder les enfants à l'IFSI. "On s'est tous pris une claque. On voyait un monde de la santé un peu idéalisé mais la réalité nous est revenue de plein fouet. Cette crise, ça a été formateur, on sait pourquoi on a choisi la formation."

Adrien, 21 ans, délégué des 3es année s'apprête à terminer sa formation pour devenir infirmier. "Quand on a été envoyé sur le terrain en avril 2020, on ne disposait pas encore de toutes les protections nécessaires. Certains y allaient avec la boule au ventre, mais on a participé au service public. On a en plus appris beaucoup sur l'hygiène, les techniques de dépistage, de vaccination."

Si le 2e semestre de l'année scolaire 2019-2020 a été très perturbé par la crise, l'année suivante a été plus apaisée. L'IFSI a trouvé une nouvelle organisation hybride entre présentiel et distanciel. Les structures ont de nouveau accepté de prendre des étudiants en stage. Mais la vie étudiante et le lien social ont été fortement distendus, voire inexistants : "On a été bien formés, bien encadrés mais on n'a pas pu vraiment se rencontrer avec les autres étudiants de ma promo. L'IFSI, c'est aussi un lieu de rencontre", témoigne Lisa, 19 ans, déléguée des 1es année.

Des groupes de parole pour extérioriser des situations difficiles

Bien conscients des difficultés et de la solitude qu'ont pu ressentir les étudiants, les formateurs de l'école d'infirmiers bagnolaise ont communiqué leur numéro de téléphone, si certains ressentaient le besoin de parler. Des groupes de parole étaient organisés une fois par semaine pour les 2es et 3es années. "On a la chance d'être un petit IFSI où tout le monde se connaît", atteste Maryline Morche, coordinatrice pédagogique des stages.

En plus d'avoir vécu une formation bousculée, les trois étudiants délégués craignent d'être discriminés sur le marché du travail, car ils font partie des premières promotions constituées via Parcoursup. Depuis trois ans, l'accès aux IFSI n'est plus sur concours mais sur la plateforme d'orientation post-bac.

Là-dessus, les formateurs se veulent rassurants. À cause du covid, ils ont donc imaginé une formule mi présentiel mi distanciel, avec du contenu innovant et ludique, notamment des vidéos ou des quiz. Formule appliquée depuis la rentrée 2021 et qui se poursuivra à la rentrée 2022. "C'est une nouvelle pédagogie, un nouvel apprentissage mais ce n'est pas une formation au rabais", poursuit Maryline Morche. Cela apparaît même parfois plus pertinent qu'un cours magistral, même si bien sûr, pour tout ce qui est pratique sur mannequin et mises en situation, les élèves viennent sur place. Tous ont plutôt apprécié cette nouvelle formule "cassant la routine" et permettant à chacun "d'apprendre à son rythme".

11 875 étudiants ont postulé dans les 12 IFSI de l'Occitanie Est, pour seulement 1 000 places

À la rentrée de septembre 2021, la promotion des premières année montera à 60 places. Tous les dossiers de candidature ont été déposés sur la plateforme Parcoursup, mais le travail de sélection est long pour les formateurs. Pour l'Occitanie Est, ce sont 11 875 futurs étudiants qui ont postulé, alors qu'il y a environ 1 000 places disponibles dans les 12 IFSI du territoire.

Le choix est particulièrement difficile. À travers ce système, Parcoursup offre une chance à tous les bacheliers mais le critère de proximité géographique du candidat n'est pas pris en compte. Ce qui pose question sur la future main d'oeuvre hospitalière de Bagnols et alentours : "Un candidat venu d'Alsace, on aura du mal à le faire rester à Bagnols. Même si on fait tout pour les séduire, on est victime de l'éloignement géographique. On se retrouve chaque année avec parfois 15-16 postes d'infirmiers vacants, et pour combler, on doit recourir aux contrats d'interim", décrypte Jean-Philippe Sajus. Ce qui est positif en revanche, c'est que cette crise a découragé très peu d'étudiants d'exercer le métier d'infirmier. Et ça, c'est de bon augure pour l'avenir.

Marie Meunier

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Marie Meunier

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