Publié il y a 2 ans - Mise à jour le 03.08.2021 - abdel-samari - 4 min  - vu 2907 fois

FAIT DU JOUR Le professeur Emmanuel de la Coussaye, l'honneur et la passion au service des autres

Le professeur Emmanuel de la Coussaye en juillet 2021 Photo : Abdel Samari / Objectif Gard

Le professeur Emmanuel de la Coussaye Photo : Abdel Samari / Objectif Gard

Dans quelques jours, il quittera sa blouse définitivement pour une retraite bien méritée. Le professeur des universités-praticien hospitalier, chef du service des urgences du Centre Hospitalier Universitaire de Nîmes, Emmanuel de la Coussaye, passera le flambeau à l'un de ses élèves, Pierre-Géraud Claret, son adjoint depuis déjà si longtemps.

Emmanuel de la Coussaye n'a pas de regret particulier ce vendredi du mois de juillet quand il accepte de nous raconter l'émotion d'un départ après une carrière si bien remplie. "J'ai le sentiment d'un travail accompli même si le contexte de départ avec la crise sanitaire laisse un sentiment de frustration car ce n'est malheureusement pas encore terminé."

Une crise covid qui a démarré il y a bientôt deux ans. "Elle nous a épuisé franchement", même si les équipes médicales, la direction de l'établissement avaient anticipé au maximum les risques. "Même mon fils qui vit à Shanghaï nous tenait informé avec quelques mois d'avance."

Président de la Commission Médicale d’Établissement (CME) du CHU de Nîmes depuis 10 ans, Emmanuel de la Coussaye est devenu médecin à Paris officiellement en 1971. Originaire de Thonon-les-Bains, il décide de rejoindre la capitale pour son internat durant quatre longues années. "J'ai commencé en 1974 à faire le SAMU de Paris. À cette époque, on n'avait pas grand chose honnêtement. On regardait les ongles des malades pour savoir s'ils manquaient de saturation."

"Je me souviens surtout des échecs"

Deux événements vont rester à jamais dans la mémoire du professeur. Un accident catastrophique d'un bus scolaire avec plus de vingt morts. "Si ces gamins avaient la ceinture comme aujourd'hui, le drame horrible aurait été évité." Et un attentat, déjà, au coeur de Paris dans les années 70. "Je me souviens de m'être approché de deux jeunes allongés au sol, dans l'action, on ne se pose pas de question, on agit. Et un flic m'a interpellé en m'interdisant de leur porter secours."

Le professeur Emmanuel de la Coussaye Photo DR

En se remémorant ses souvenirs, douloureux, le chef des urgences de Nîmes pour encore quelques jours, ne peut retenir ses larmes. "J'ai des souvenirs très douloureux. Je me souviens surtout des échecs, des gamins que je ne suis pas parvenu à sauver. On ne s'habitue pas à la mort, plus on avance, moins on s'habitue."

Pour surmonter ces épisodes traumatisants, Emmanuel de la Coussaye a toujours appliqué la même recette : s'entourer d'une équipe soudée, fidèle et à l'état d'esprit irréprochable. Raison pour laquelle très vite, il ne veut pas se retrouver "dans un gros machin. J'ai choisi volontairement un poste moins brillant mais dans des établissements plus à taille humaine comme Montpellier et Nîmes."

Avec l'équipe qui l'entoure au quotidien, il va connaître aussi les évolutions de la médecine. "En anesthésie-réanimation, on pratiquait beaucoup l'approche manuel des outils. Aujourd'hui, on a la chance d'avoir par exemple des ventilateurs sophistiqués."

"La fierté de mon équipe qui m'est toujours resté fidèle"

Tout a été possible pour le CHU de Nîmes car Emmanuel de la Coussaye a trouvé aussi des acteurs institutionnels et des élus mobilisés pour l'avenir médical de la capitale gardoise. "Quand nous étions en difficulté, heureusement que Jean-Paul Fournier (maire de Nîmes, NDLR) ou encore Damien Alary (président du Département du Gard de 2001 à 2014, NDLR) et bien d'autres se sont mis autour de la table pour trouver des solutions. Et cela continue aujourd'hui avec la députée Françoise Dumas, le sénateur Laurent Burgoa. Je crois que c'est une des forces aussi de Nîmes."

Qu'est-ce qu'il gardera d'autre comme souvenirs ? "La fierté de mon équipe qui m'est toujours resté fidèle. En 40 ans, j'ai vu beaucoup de gens mais ceux qui n'avait pas l'esprit d'équipe ne sont pas restés. Bien sûr que chaque médecin a sa personnalité mais dans des crises comme le coronavirus, si vous n'êtes pas soudé dans d'adversité du quotidien, vous ne pouvez pas y arriver."

Le professeur Emmanuel de la Coussaye avec le directeur général Nicolas Best sont régulièrement venus ensemble sur le plateau de Bonsoir le Gard sur Objectif Gard

Et aussi de belles rencontres à l'internat parisien, "une bande d'amis", le docteur Patrick Richard, Nicolas Best "un directeur général extraordinaire avec qui on est toujours arrivé à se mettre d'accord" ou encore Pierre-Géraud Claret, qui va lui succéder très prochainement "c'est déjà lui qui gère tout aujourd'hui. Je suis apaisé et rassuré de savoir que l'hôpital nîmois sera entre de bonnes mains."

Et demain ? Emmanuel de la Coussaye a sa petite idée. "Je vais m'occuper de ma famille. D'abord de mon épouse, une femme extraordinaire. On est un vieux couple, ensemble depuis l'âge de 18 ans." Et ses enfants, déjà bien grands. Son garçon de 36 ans, designer de métier au Japon. Et sa fille, 34 ans, responsable marketing-communication dans une entreprise locale.

"Les gardois ont de la chance d'avoir un très beau CHU et des agents exceptionnels"

Mais pas question de tirer un trait définitif sur l'avenir médical de Nîmes. "Je resterais toujours à disposition, je garde beaucoup d'amis au sein de la communauté médicale du CHU. Encore une fois, même si cela n'a pas été facile tous les jours, on est resté unis."

Passionné par son métier, Emmanuel de la Coussaye est aussi un homme fier de l'établissement nîmois. "Les gardois ont de la chance d'avoir un très beau CHU et des agents exceptionnels. Je suis fier d'avoir travaillé dans cet hôpital. Je voudrais vraiment dire à ceux qui vont lire cet article, qu'ils peuvent vraiment venir en confiance ici. Et avec Nicolas Best à sa tête, ils sont aussi assurés d'un bel avenir pour l'établissement"

Un avenir du CHU de Nîmes qui s'écrira sans Emmanuel de la Coussaye qui fermera pour la dernière fois son ordinateur, sa mallette, éteindra la lumière de son bureau dans les prochains jours avant d'embrasser une retraite sereine et bienveillante. Comme cet interne parisien qui a foulé la terre nîmoise voilà plus de 40 ans pour venir sauver des vies, et faire honneur à sa profession...

Abdel Samari

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