Publié il y a 7 mois - Mise à jour le 21.02.2024 - Corentin Corger - 3 min  - vu 1802 fois

FAIT DU JOUR L’histoire de Marius Rodeillat : le dernier gardois exécuté

Parmi les trois exécutés, seul Marius Rodeillat était Gardois

- Midi Libre, édition du 27 avril 1948

Le meurtrier du Mas de Lauze fut guillotiné à la maison centrale de Nîmes le 27 avril 1948.

Une semaine après l’hommage national à Robert Badinter, l’ancien garde des Sceaux qui a aboli la peine de mort en 1981, Objectif Gard s'est intéressé au dernier condamné à mort exécuté dans le Gard. La Seconde Guerre mondiale est officiellement terminée depuis quelques mois ce 24 décembre 1945, les familles françaises et Nîmoises s’apprêtent donc à fêter leur liberté. Mais, chemin de Valdegour, au Mas de Lauze, la famille Sallier vit un Noël macabre. Le père de famille est retrouvé mort, abattu sur le seuil. À l’intérieur de la maison, les policiers décriront « un spectacle horrible ». La mère, le fils et l’une des filles ont été tués et égorgés. La benjamine, âgée de 7 ans, a également été égorgée mais à ce moment-là elle vit encore.

Durant plus d’un an et demi, l’enquête patine. Elle avance enfin en juin 1947. À la suite d’un vol commis par un certain Marius Rodeillat, marchand primeur à Nîmes, les policiers perquisitionnent son domicile en centre-ville. Cet homme a également un terrain à 500 mètres du Mas de Lauze, tristement renommé « Le Mas Maudit », car par la suite d’autres crimes y seront commis. Chez lui, les policiers découvrent une arme enrayée de même calibre que celle qui a tué la famille Sallier.

« Son seul désir était d’en finir avec la vie »

Sans donner véritablement de raisons à cette tuerie, le suspect avoue le massacre, précisant qu’il s’était présenté à la porte du mas quelques jours avant et qu’il venait dans ce coin car il « s’amusait à tirer des rafales sur les lapins ». Le compte-rendu de l’audience révèle que le meurtrier a également volé 25 francs ce soir-là avant de « s’habiller pour aller avec des amis réveillonner gaiement jusqu’à 6 heures du matin ». Les psychologues de l’époque ont considéré le Toulonnais de naissance comme « anormal », mais ayant « agi avec conscience » sans « état de démence au temps de l’action »

mas de lauze
Le mas de Lauze • Photo Boris de la Cruz

Le 27 avril 1948, l’homme de 29 ans est guillotiné alors que « le bruit se répandit en ville que l’exécution aurait lieu ce matin », comme le relate le Midi Libre du jour. L’échafaud est situé dans la cour de la maison centrale de Nîmes, devenue aujourd’hui le palais de justice face aux arènes. Le quotidien raconte que Rodeillat simula la folie au cours de son procès et qu’il « accueillit sa condamnation à mort presque avec soulagement » car « son seul désir était d’en finir avec la vie » reconnaissant « qu’il était un individu malfaisant digne de la guillotine ».

"C’était quelque chose de caché"

« Avec la mort de Rodeillat se termine un des plus sombres drames de la petite histoire nîmoise », conclut le journal. Cette histoire, un proche de la famille Rodeillat la connaît bien. Des descendants qui savaient que leur ancêtre avait été guillotiné mais le sujet était tabou et personne ne connaissait les détails. « C’était quelque chose de caché. Le fils de Marius avait huit ans au moment du drame et n’a jamais voulu en parler. Nîmes était un petit village et il en a beaucoup pâti. »

Mais avec la médiatisation du « Mas Maudit » par la presse locale il y a quelques années, le nom de Marius Rodeillat est ressorti et les descendants ont pu en savoir plus. « On n’a pas à avoir honte. C’est assumé mais ce n’est pas nous qui l’avons fait. On peut vivre normalement », complète notre interlocuteur. Un proche qui, après avoir épluché l’affaire, émet des doutes sur la culpabilité de son ancêtre.

"Cette affaire n'est pas claire"

« Cette affaire n’est pas claire. La police n’arrivait pas à résoudre cette enquête et je pense que les policiers ont choisi la facilité. Cette arme enrayée retrouvée chez Marius, c’est bizarre.» 

Si Marius Rodeillat est bien le dernier Gardois exécuté, ce 27 avril 1948 il était en réalité accompagné de deux autres personnes à l’échafaud : Nguyen Van-Van et Pnam Van Lao, deux réfugiés vietnamiens, qui avaient assassiné à Méjannes-le-Clap, Alphonse Chauvet, chauffeur de taxi à Nîmes.

Les derniers condamnés à mort nîmois

Marius Rodeillat, Nguyen Van-Van et Pnam Van Lao le 27 avril 1948. Mohamed Bekkouche, le 4 février 1948 pour avoir abattu le 20 janvier 1946 Madame Bonnidan, son fils et une voisine. Jean Robert et Vincent Faïta condamnés à mort par la gestapo le 23 avril 1943.

Corentin Corger

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