Publié il y a 3 ans - Mise à jour le 02.03.2021 - marie-meunier - 4 min  - vu 2600 fois

FAIT DU SOIR En 1975, Serge Gainsbourg tournait son film "Je t'aime moi non plus" dans l'Uzège

Ce mardi, cela fait trente que "l'Homme à la tête de chou" a disparu. Il est mort à 62 ans d'une crise cardiaque.
"Je t'aime moi non plus" est le premier long-métrage écrit et réalisé par Serge Gainsbourg, avec en tête d'affiche, sa compagne de l'époque, Jane Birkin [Photo via MaxPPP] - EFE

Ce mardi, cela fait trente ans que Serge Gainsbourg est mort. Icône de la chanson française, anticonformiste, souvent provocateur, il a croisé la route de nombreuses vedettes au cours de sa carrière. Ce que l'on sait moins, c'est que "l'Homme à la tête de chou" a aussi réalisé une poignée de longs-métrages. Le tout premier s'intitule "Je t'aime moi non plus" et il a été tourné en 1975 dans l'Uzège, avec sa compagne de l'époque, Jane Birkin. Quelques habitants ont eu la chance de croiser la route du couple mythique. Ils racontent.

Si on regarde la distribution de "Je t'aime moi non plus", on voit Jane Birkin, l'acteur américain Joe Dallesandro ou encore Gérard Depardieu. Du beau monde qui a passé quelques temps dans l'Uzège puisque le film a été tourné principalement à l'aérodrome de Belvezet mais aussi à Uzès ou Arpaillargues.

Ce drame d'1h30 est sorti dans les salles obscures en mars 1976. Il raconte les tumultes amoureux d'une jeune femme androgyne (Jane Birkin) serveuse dans un bar de routiers au milieu de nulle part et d'un chauffeur homosexuel qui cède malgré tout à ses charmes. Leur rapprochement va être troublé par le petit ami de ce dernier. Le long-métrage assez sulfureux a failli être classé X en France, et ne sera diffusé que dans un seul cinéma gay londonien en Grande-Bretagne. Ce qui n'a pas empêché le film d'être nommé aux César en 77 dans la catégorie de la meilleure musique écrite pour un film. Par la plume de Serge Gainsbourg lui-même.

"Un décalage entre les équipes de tournage de la capitale et l'ultra ruralité de Belvezet"

Loin d'assimiler tout cela, Michel Lafont, actuel maire de Belvézet, avait cinq ans quand le tournage s'est installé dans sa ville. Il ne garde pas de souvenir d'une scène précise mais plutôt de l'ambiance, loin de son quotidien rural : "À l'époque pas mal de gamins allaient voir à quoi ressemblait un tournage. Il y avait un décalage entre les équipes de tournage de la capitale et l'ultra ruralité de Belvézet. Deux mondes se télescopaient." Il se remémore une ambiance "sacrément décontractée" comme "une grande colo de vacances parisienne à la campagne".

Ce qui ressort des témoignages que nous avons recueillis, c'est que les troupes aimaient se décontracter en ville, à Uzès, entre les prises. Jacques Regniers atteste : "Mes parents ont tenu pendant de nombreuses années un bar à Uzès. Quelques fois Jane venait se faire coiffer dans la cuisine du bar. Enfant, je m’en souviens très bien. Ils venaient le soir prendre l’apéro en terrasse avec l’équipe. Déjà cinéphile je n’oublierai pas cette période."

D'autres encore ont eu la chance de croiser Serge Gainsbourg, Jane Birkin et les autres acteurs au bar le Bengali (actuel emplacement du Comptoir agricole) où ils allaient souvent. "Il garait sa grosse voiture, une Maserati de mémoire, sur l'Esplanade. Jane en ressortait avec son panier en osier et son chien. Ils étaient toujours bien mis. Lui avec ses Repetto blanches et Jane avec ses chapeaux. Ils allaient au Bengali. Mon père avait un commerce en face, je les voyais souvent", raconte Geneviève Garcia, Uzétienne,16 ans à l'époque.

Jane Birkin, l'acteur Joe Dallesandro, et Serge Gainsbourg, en soirée dans la salle voûtée du Château d'Arpaillargues, le 26 septembre 1975. (photo Château d'Arpaillargues)

Alors qu'il avait 9 ans, Bruno Blachere se souvient aussi de l'avoir vu au restaurant du Château d'Arpaillargues - lieu où Serge Gainsbourg et Jane Birkin avaient séjourné pendant le tournage : "Il est arrivé avec des copains et Serge avait discuté avec ma mère. Moi, trop jeune, je lui avais serré la main."

Le bar du film toujours intact dans le club house de l'aérodrome

C'est vraiment la sympathie parfois teintée d'extravagance qui ressort du personnage, comme se le remémore Marie Bailly, habitante de Castillon-du-Gard, qui vivait à Uzès à ce moment-là : "Je l'ai croisé sur l'Esplanade. J'avais 16 ans. Il avait un perroquet sur l'épaule, il lui parlait. Quand il m'a croisée, il m'a souri et m'a dit "Bonjour". Je me suis retournée pensant qu'il disait bonjour à quelqu'un qu'il connaissait mais il n'y avait que moi." Adolescente, Marie n'était pas vraiment fan, "mais ça arriverait maintenant, je lui courrais après pour avoir un autographe." Mais elle garde le souvenir d'un homme tel qu'on le voyait à la télévision, "très nature".

Le bar de routiers, l'un des principaux lieux du tournage, est en fait l'actuel club-house de l'aéroclub de Belvezet. On peut voir ci-dessus le lieu décoré lors du tournage ci-dessus. (Marie Meunier / Objectif Gard)

Dans le film, Jane Birkin incarne donc Johnny, une serveuse dans un établissement pour routiers, qui prend comme décor un bâtiment de l'aérodrome de Belvezet. À sa création autour de 1963, c'était en fait un garage à avions. Il a été totalement métamorphosé pour les besoins du tournage. Une grande enseigne avait été clouée intitulée "Boris snack", des gros pneus de camions entassés avec des bidons d'huile. Tous les décors ont aujourd'hui disparu... sauf l'immense bar en inox qui traverse en large toute la salle.

Le fameux bar du film, encore intact. (Marie Meunier / Objectif Gard)

"On est en pleine réhabilitation du bâtiment pour le rendre plus accueillant. Mais la première chose que nous ont dit les anciens, c'est : "Ne touchez pas au bar!"", dit en riant Frédéric Barneaud, membre du conseil d'administration de l'aéroclub. Le souvenir restera intact, c'est promis.

Marie Meunier

Marie Meunier

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