Publié il y a 2 ans - Mise à jour le 27.06.2022 - marie-meunier - 4 min  - vu 2660 fois

FAIT DU SOIR Sécheresse : sur le bassin versant de la Cèze, la situation devient critique

En amont du pont de Tharaux, la Cèze est en assec. Le phénomène ne se produit qu'à la fin de l'été d'habitude. (photo ABCèze)

Les pluies de vendredi étaient les bienvenues pour regonfler les cours d'eau, victimes de la sécheresse. Mais c'est encore loin de suffire pour rattraper les carences qui se creusent depuis des semaines. La situation est critique pour la Cèze et ses affluents.

Le cours d'eau est même coupé depuis une semaine à Tharaux, où des missions de sauvetage ont été organisées, avec l'AAPPMA Les Amis de la Cèze, pour épargner les poissons pris au piège. Bien sûr, il arrive que cette zone se retrouve en été à sec. Mais cela se produit généralement à la fin de l'été. Un peu plus en aval, des sources provenant de Montclus et de Goudargues rechargent un peu le cours d'eau. Sans cela, le débit serait bien plus faible.

La cartographie globale du bassin versant de la Cèze est plutôt inquiétante : "Il n'y a pas eu les pluies de recharge automnales et printanières. Pour exemple, le Tabion (ruisseau affluent de la Tave, NDLR) n'a jamais été aussi bas depuis au moins cinq ans. Il avait été mesuré au plus bas à 123 litres s'écoulant par seconde le 21 août 2019. En ce moment, on mesure 87 litres/seconde. Quant au barrage de Sénéchas, il n'a pas pu se remplir à son maximum en amont de la Cèze. Le soutien d'étiage est donc inférieur à d'habitude", constate Hugues Brentegani, chargé de mission Ressources en eau au syndicat mixte ABCèze.

Plus globalement dans le Gard, lors du dernier comité sécheresse, il a été constaté un déficit de 35 % de remplissage suite au manque de précipitations sur la période allant du 1er septembre 2021 au 13 juin 2022. Si l'on regarde seulement le mois de mai 2022, le pourcentage est encore plus criant : il n'est tombé que 9,6 mm de pluie, ce qui équivaut à un déficit de 88 %. Après 2015, il s'agit du deuxième mois de mai le plus sec depuis le début des relevés météo en 1960, et du mois de mai le plus chaud.

La Cèze amont et aval placée en niveau d'alerte renforcée

Juin n'est pas encore fini mais devrait être très sec aussi. Sans compter ce vendredi, seulement 15 à 4 millimètres de précipitations étaient tombés sur la Cèze. Sur le bassin versant du cours d'eau, le seuil d'alerte est dépassé depuis fin avril et le seuil de crise depuis mai. Au 9 juin, le débit enregistré au niveau de La Roque-sur-Cèze est de 1,305 m3/seconde alors que le seuil de crise est fixé à 2,57m3/s.

Face aux tensions sur la ressource en eau, la préfecture du Gard a instauré un niveau d'alerte renforcée depuis le 16 juin dans les zones Vidourle, Cèze amont et Cèze aval. Ce qui implique des mesures telles que l’interdiction de l'arrosage des espaces sportifs, ainsi que celui des pelouses et espaces verts privés et publics, de l'irrigation agricole et l’arrosage des potagers entre 8h et 20h... Si les restrictions passaient au stade de crise, l'usage serait cantonné uniquement à l'eau potable, à l'abreuvement des animaux et à la lutte contre les éventuels incendies.

Malgré les opérations de sauvetage, des poissons ont été pris au piège dans la Cèze, à Tharaux. (photo ABCèze)

On n'en est pas encore là, mais les conséquences sur la qualité de l'eau sont déjà bien visibles : à cause des niveaux plus bas, de la baisse des débits et de la chaleur, la température de la rivière augmente, les algues prolifèrent et la faune aquatique en pâtit. Le syndicat ABCèze récolte au maximum de données pour identifier au mieux les zones de sécheresse, les usages qui sont faits et ainsi pouvoir mieux faire face si ça reproduit les années suivantes.

Certaines communes obligées de s'approvisionner en eau potable autrement

Si la situation de la Cèze et de ses affluents est alarmiste, celle des eaux souterraines l'est tout autant. Certaines, normalement prélevées pour alimenter des communes en eau potable, ne se trouvent plus en quantité suffisante. Certaines communes sont embêtées, notamment Saint-Marcel-de-Careiret, où l'Agglomération du Gard rhodanien fait venir régulièrement des camions-citernes pour remplir le château d'eau depuis des semaines. Saint-Michel-d'Euzet a eu son premier approvisionnement aussi et Laval-Saint-Roman pourrait être vite dans le rouge. Écologiquement, ce dépannage d'appoint n'est pas bon, et financièrement, il pourrait revenir cher : 500 000€ si le problème dure jusqu'à la fin de l'année.

L'Agglomération a d'ailleurs prévu une réunion de crise le 7 juillet avec tous ses maires. "Je suis très inquiet sur notre capacité à passer l'été. Il va falloir prendre des décisions tous ensemble, qui seront peut-être difficiles", indique grave Jean-Christian Rey, président de l'Agglomération du Gard rhodanien. Il n'est pas le seul à voir l'urgence de la situation, qui se conjugue mal avec le temps des solutions techniques. Le temps d'avoir toutes les autorisations pour exploiter une nouvelle ressource en eau est de l'ordre de cinq ans, par exemple. "On entre dans une nouvelle ère. Il faut que chacun change ses habitudes", ajoute Jean-Christian Rey, qui a également obtenu un rendez-vous avec la préfète et ses équipes.

Les précipitations de fin de semaine dernière ont fait augmenter le débit de la Cèze. Il a plu en amont du bassin versant (110 mm sur les hauteurs), mais pas de pluies significatives sur l'aval (entre 6 et 30 mm). Reste à savoir combien de temps la situation tiendra à l'amont. En aval, cela demeure critique sur les affluents et les sources d'eaux souterraines. En témoigne le lavoir de Lirac, totalement à sec depuis quelques jours.

Marie Meunier

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