FAIT DU JOUR À Lanuéjols, le centre de formation de l'Aigoual, cocon idéal pour l'apprentissage aux travaux publics

Le formateur Brice Benezech donnant ses consignes à un apprenti
- François DesmeuresFondé en 1988, le Centre de formation de l'Aigoual profite des grands espaces du causse Noir pour la formation de ses 36 élèves. Concentrés sur leurs activités, les apprentis disposent, malgré l'éloignement des villes, de tous les conforts de leur époque et de la proximité des formateurs, qui peuvent répondre plus facilement et directement à une de leurs sollicitations. Les inscriptions sont en cours pour la rentrée prochaine.
Deux formations de première année, et un CAP "turbo", pour les plus pressés. C'est l'offre du centre de formation de l'Aigoual, fondé en 1988 sur un pari et un vide régional constaté en matière de formation aux conducteurs d'engin. Ce CAP est resté, celui de "Conduite d'engins travaux publics et carrières". S'est ajouté, ensuite, celui de maintenance des matériels, secteur qui recherche activement de la main-d'œuvre. En plus de ces deux premières années, un CAP Turbo propose celui de conducteur d'engins en un an.
"Dans cet espace rural, notre aire d'évolution est assez conséquente", constate la directrice du centre, Monique Teissier, non sans euphémisme. Pour autant, la formation dispensée ne l'est pas au rabais. "On a la même volonté et la même passion que les autres centres de formation. Mais on a aussi une dotation en matériel et physique importante, comme des simulateurs de conduite et des simulateurs mécaniques." Jusqu'au simulateur hydraulique, qui permet de reproduire les réparations possibles sur les imposants engins.
"On veut vraiment relancer le CAP de maintenance de matériel, insiste Monique Teissier. C'est un très bon complément pour un conducteur d'engins. Et, surtout, les entrepreneurs nous le demandent." Signe d'une carence déjà atteinte, ou redoutée, par les entreprises. Alors que le centre de l'Aigoual était seul dans son domaine, au moment de sa création, huit autres organismes (privés, eux) se sont créés, depuis, pour tenter de voler une part du succès à l'échelle de l'académie de Montpellier, à l'occasion de la réforme de l'apprentissage. Ce qui n'empêche pas les élèves de Lanuéjols de venir parfois de loin, "de tout le Languedoc-Roussillon, et même de Perpignan, un peu de Haute-Loire et d'Ardèche", précise Monique Teissier.
"Les élèves sont délocalisés du milieu familial, du dimanche soir au vendredi midi", argumente Monique Teissier. Ce qui peut être difficile à vivre pour certaines familles, mais permet à l'élève de s'immerger pleinement dans ses études. Ils sont logés dans un internat de onze chambres, à deux ou trois par chambre et en pension complète, encadrés par un maître d'internat.
"La ville, quand ils sont ici, ils n'y pensent même plus", constate Monique Teissier. Entre deux parties de baby-foot ou de basket, ou un moment de repos devant la télévision de la chambre. Cerise sur le gâteau, les élèves ont accès à Canal + dans la pièce commune, et donc aux matchs de Ligue des champions, moments forts de certaines semaines. "Les parents sont tranquilles quand ils nous les laissent", rassure la directrice du site. Et ils retrouvent leur progéniture le vendredi soir, les cours finissant à 13h pour laisser le temps à chacun de rentrer chez soi.
Deux formateurs en conduite d'engins sont présents, un autre en mécanique. Ainsi que huit enseignants d'enseignement général. "La plupart de nos jeunes sont bien intégrés et, au final, restent dans leur entreprise en fin de formation, constate Monique Teissier. Et, sinon, ils n'ont pas de problème à trouver du travail. Certains souhaitent aussi compléter par autre chose, comme le CAP routier ou le bac professionnel travaux publics. Et le salaire est généralement intéressant, grâce aux primes qui s'ajoutent."
À un kilomètre du centre, un élève fait quelques séances particulières avant l'examen. La zone est vaste et sert à s'entraîner à "préparer des plateformes", précise Brice Benezech, formateur indépendant passé par Bouygues ou Eiffage. "On leur apprend les bases de sécurité, puis évidemment à conduire. Ils apprennent l'implantation topographique, à réaliser des ouvrages implantés, comme un bassin ou un plancher, puis à faire des talus, lors de la deuxième année. Il faut aussi savoir connaître les matériaux car, avec la terre, on n'a pas le même coefficient de densité que dans du granit ou de la pierre."
Les mathématiques étudiées sont donc en lien avec le métier et gagnent en concret : "Surfaces, volumes, nombre de camions nécessaires à tel ou tel chantier font partie des exercices. Et la partie mécanique d'entretien, pour connaître le circuit hydraulique, la vidange, ou savoir changer un pneu. Mais la base première reste la conduite de l'engin", détaille Brice Benezech.
Et ce même si le travail change, à l'époque où les grands chantiers, type TGV Méditerranée, se réduisent. "De nos jours, poursuit le formateur, les secteurs où il y a le plus de travail, ce sont les aménagements de réseaux ou les pistes cyclables... Si un gros terrassement intervient, c'est souvent pour une installation d'entreprise. En revanche, on aura toujours besoin de carrières." Et pour s'entraîner aux travaux urbains, être formé dans le secteur rural ne change pas grand-chose. "On les amène au plus proche des réalités. Dans un trou, on mettra les réseaux éventuels, on planque des canalisations comme dans un milieu urbain."
"On travaille aussi la cohésion d'équipe, la structure hiérarchique, leur responsabilité. Y compris qu'il existe un droit de retrait quand ils pensent que la sécurité n'est pas assurée", explique Brice Benezech. Le but étant d'amener les apprentis au "chef-d'œuvre", ce qu'ils devront produire lors de leur examen final. "Certains, en CAP, partent du principe qu'ils sont en échec, regrette le formateur. Alors que c'est aussi la possibilité d'apprendre un métier, de créer sa société. Et c'est un métier valorisant, car on voit le travail fini..."
Le site internet du Centre régional de formation de l'Aigoual, partenaire de l'IFTP (institut de formation des travaux publics) est à retrouver ici