Publié il y a 8 mois - Mise à jour le 09.02.2024 - François Desmeures et Thierry Allard - 4 min  - vu 1358 fois

FAIT DU SOIR Écoles : une cinquantaine de fermetures de classes envisagées contre une quarantaine d'ouvertures

Les parents d'élèves et élus de Saint-Laurent-des-Arbres ont manifesté ce jeudi à la sortie des classes

- Photo : Thierry Allard

Le Conseil départemental de l'Éducation nationale se tient ce vendredi matin à Nîmes. Lors du comité social d'administration, qui avait lieu ce jeudi, le directeur académique des services de l'Éducation nationale (Dasen), Christophe Mauny, a remis les élements de la carte scolaire aux syndicats, qui n'ont pas eu le droit d'en débattre et ont voté contre. Une cinquantaine de fermetures sont envisagées contre une quarantaine d'ouvertures. Tandis que les élus locaux louent une concertation plus importante qu'auparavant, les syndicats regrettent un manque de dialogue et de marges de manoeuvre qui se réduisent. 

Une manifestation, en juillet 2022, devant les grilles de la direction des services de l'Éducation nationale, à Nîmes • François Desmeures

La grogne de nombreux villages - que le Dasen précédent avait pu observer de sa fenêtre tout en refusant une entrevue aux maires concernés - c'est du passé. Du moins, c'est la volonté qu'affiche Christophe Mauny, qui est arrivé dans le Gard lors de la dernière rentrée scolaire. "Le Dasen a souhaité faire des réunions, il y en a eu quatre, deux pour l'arrondissement de Nîmes, une pour celui du Vigan et une pour celui d'Alès, confirme-t-on dans l'entourage du Dasen. Le but était de parler avec les élus de la préparation de la carte scolaire, de l'évolution démographique, expliquer pourquoi on prend certaines décisions." 

"Le Dasen a beaucoup plus de disponibilités, il tient plus de réunions. On en a notamment eu trois pour savoir comment fonctionnait la carte scolaire", confie le maire d'une commune rurale. Avec un point d'orgue, mardi dernier, l'installation de l'observatoire départemental des dynamiques rurales. Celui-ci réunit le Dasen, les présidents d'intercommunalité, la sous-préfète du Vigan, les associations de maire ou encore la CAF. 

But de l'observatoire : travailler sur l'école en milieu rural pour anticiper la nouvelle carte scolaire et, donc, les éventuelles fermetures de classe. "C'est une réflexion sur le long terme, croit savoir ce maire rural, le Dasen a précisé, au cours de la réunion, vouloir maintenir un service public de qualité pour tous les territoires." Les élus ont aussi reçu des chiffres sur les zones rurales, que ce soit en lien avec le recensement scolaire ou sur les résultats des évaluations.

Dans l'entourage du Dasen, on répète que la baisse du nombre d'enfants est "une tendance lourde". Pas de quoi convaincre tous les élus : "l'Éducation nationale se replie derrière une baisse démographique importante, poursuit le maire. On essaie de comprendre et de défendre en même temps. En expliquant que nous, dans les zones rurales, on est aussi impactés par la Zéro artificialisation nette et le porté à connaissance feux de forêt." Des dispositions qui limitent la construction, et donc l'implantation de populations. Car dans les villages, sans nouvelle population, l'école risque bien de connaître un funeste destin. 

"C'est un cercle infernal"

Thierry Daublon, maire de Saint-Jean-de-Maruéjols-et-Avéjan

Cette situation, le maire de Méjannes-le-Clap la connaît très bien. Il était l'un des rares, en début de semaine, à savoir qu'une de ses classes était menacée (*). Comme l'an dernier. "On a envoyé un courrier au Dasen ce matin, confirmait le maire, Jérôme Bassier, mardi 6 février. L'an dernier, on avait 52 inscrits pour trois classes. Cette année, 51. Mais avec neuf entrées dans le cycle 1." La fermeture de classe aurait pu intervenir alors que la mairie avait récemment investi sur l'établissement, avec l'installation de la climatisation, une insonorisation, la pose de volets roulants, etc. 

Au pied du plateau de Méjannes, la commune de Saint-Jean-de-Maruéjols-et-Avéjan sait elle aussi qu'une de ses classes est menacée. Son maire, Thierry Daublon, a rencontré son inspectrice de secteur, ce mercredi, pour plaider sa cause. "De quatre classes, on tomberait à trois", résume Thierry Daublon, qui compte une douzaine d'enfants de moins pour la rentrée prochaine. Sans compter les enfants âgés de 2 ans, l'effectif passerait de 80 à 68. "Mais avec des classes à double niveau, on ne pourra plus accueillir les enfants qui proviendraient d'autres communes. C'est un cercle infernal", se désole le maire. 

Autre cas, Saint-Laurent-des-Arbres, à mi-chemin entre Bagnols et Avignon. Pas exactement une commune rurale. "Nous sommes un village qui se développe", avance la maire Sylvie Barrieu-Vignal, qui s'apprête à lancer d'importants travaux dans son groupe scolaire, pour la coquette somme d'1,6 million d'euros. Alors l'annonce d'une fermeture de classe en élémentaire à la rentrée prochaine ne passe pas. "Le seuil minimum pour garder toutes nos classes est de 209 élèves, or nous en sommes à 206", pose l'élue. 

Deux ans que Saint-Laurent flirte avec la ligne de flottaison. Pas pour longtemps, estime Sylvie Barrieu-Vignal, alors qu'un lotissement doit voir le jour prochainement, avec la possibilité de voir de nouvelles familles s'installer. Alors la maire espère que les services de l'Éducation nationale feront preuve de "bienveillance". Depuis quelques jours, les parents d'élèves se mobilisent, et ce jeudi à la sortie des classes ils étaient nombreux à exprimer leur désapprobation. "Ce serait un prof de moins et une classe de moins, c'est brutal et on va se retrouver avec des classes de 30 élèves et plus de classes à double niveau", tempête la représentante des parents d'élèves, Leila Rahali. Une pétition a même été lancée. Car "fermer une classe c'est facile, en rouvrir une ça l'est moins", craint la parente d'élève.

Les syndicats votent contre la carte scolaire présentée, à l'unanimité

Si le Dasen est loué par les élus pour son sens de la concertation, le retour syndical du comité social d'administration, qui avait lieu aujourd'hui, a une tout autre saveur. "Ça ne s'est pas passé comme on voulait, confie un membre d'une organisation syndicale. Pour la deuxième année, on nous a fourni la liste des ouvertures et fermetures en instance. Donc, on n'a pas pu discuter des fermetures de classe." Le Dasen aurait repoussé la discussion au seul Conseil départemental de l'Éducation nationale (CDEN) de ce vendredi. 

Christophe Mauny
Le Dasen du Gard Christophe Mauny • Photo DR Dasen 30

"Le dialogue n'est pas rompu, mais avec des normes qui nous posent problème", poursuit le syndicaliste. Les syndicats avaient demandé un report de la carte scolaire, la semaine dernière. Ils n'ont pas été entendus. Sans surprise, ce jeudi, ils ont voté unanimement contre la nouvelle carte scolaire, qui prévoit une cinquantaine de fermetures pour une quarantaine d'ouvertures. 

"C'est un mépris, on n'a pas eu droit à la parole, conclut ce syndicaliste. Il nous annonce 670 élèves de moins mais, nous, on constate à chaque rentrée qu'on a plus d'élèves que ce qui avait été annoncé." Aux élus, mardi, le Dasen aurait évoqué travailler sur un territoire éducatif rural, dispositif créé par le plan France ruralité, qui pourrait être Cèze Cévennes pour le département du Gard. Quand les élus interrogés louent la concertation de Christophe Mauny, les syndicats ont plutôt tendance à y lire de la communication, sans changement de fonctionnement de fond.

(*) Selon nos informations, le comité social d'aministration, de ce jeudi, aurait finalement renoncé à la fermeture de la classe de Méjannes-le-Clap. Et ce alors que le maire, Jérôme Bassier, s'apprêtait à informer le Dasen de trois nouvelles inscriptions dans son école. 

François Desmeures et Thierry Allard

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