Publié il y a 1 mois - Mise à jour le 29.05.2024 - Boris De la Cruz - 3 min  - vu 6787 fois

GARD Accident mortel du travail : " sa société l'a envoyé à la mort" selon le procureur

Le Palais de Justice de Nîmes. Photo Tony Duret / Objectif Gard

Une société industrielle déjà condamnée pour des « homicides involontaires » dans le cadre du travail, est sanctionnée à nouveau après le décès d’un salarié en 2015 sur le site de Marcoule. Un employé qui est mort... intoxiqué au gaz argon.

« Il était un père, un fils, un frère. Il manque énormément à sa femme, à sa fille. On n’a pas le droit de mourir au travail », témoigne à la barre du tribunal et avec émotion la sœur d’un homme mort sur un chantier du site de Marcoule. Et pourtant, ce salarié d'une entreprise privée indépendante qui intervenait sur la zone, est bien décédé au travail le 8 septembre 2015. Le jour du drame, d’autres employés ont remarqué ses jambes, ses pieds comme suspendus dans une sorte de regard. « Un décès dont l’autopsie réalisée par le docteur Benslima évoque de façon hautement probable une inhalation au gaz argon », résume Jérôme Reynes, le président du tribunal correctionnel de Nîmes lors de l’audience sur le fond tenue il y a quelques semaines. Le salarié pris en charge dans un état désespéré et dans le coma décèdera 6 jours plus tard des suites de cette intoxication.

L'entreprise nie sa responsabilité

La société industrielle nie sa responsabilité dans cet accident du travail et les responsables de la structure racontent même que tout a été fait dans les règles de l’art. Une entreprise qui incrimine à l'audience la victime, en expliquant qu’il se trouvait dans un endroit où elle ne devait pas être... « Ce chantier, plus aucune personne ne devait intervenir, il était même fermé avec des écrous », estime l’avocat de l’entreprise. « Il n’était pas commandé ce travail, et cet employé n’était pas habilité pour aller dans cette canalisation. Il y va et il trouve la mort », plaide l’avocat de la société, une entreprise déjà condamnée à Rennes suite aux décès de plusieurs salariés et pour des blessures involontaires sur une passerelle de Saint-Nazaire en Bretagne.

Pour le procureur la société essaie de brouiller sa responsabilité

« Ce que j’entends de la bouche de la société c’est que cet accident ne devait jamais arriver, mais cette société essaie aussi de brouiller sa propre responsabilité », tranche le procureur Stéphane Bertrand. « Je pense qu’il faut revenir aux éléments précis du dossier. Il est allé au travail, mais sa société va l’envoyer à la mort. Il n’est pas informé, il n'est pas averti des risques, on l’envoie dans un endroit où il y a un gaz dangereux et il va dans le regard où se déroule l’accident. Et d’ailleurs depuis cet accident mortel il y a une consigne avertissant du danger, c'est un élèment important. L’employé n’était pas informé du risque lié à ce gaz », certifie le procureur Bertrand qui réclame pour cet homicide involontaire l’amende maximale à l’encontre de l’entreprise... à savoir 225 000 euros.

Sébastien est décédé à cause du gaz argon et de la responsabilité d’une société.

« C’est une deuxième souffrance d’entendre de la part de l’entreprise fautive que si Sébastien est mort, c’est de sa faute. Il s’agit en réalité de nombreuses défaillances qui incombent à la seule société », dénonce Maître Vincent-Roch Carail. « Sébastien il laisse une famille, un enfant, une épouse, tous sont dévastés par le chagrin, estime l’avocat des parties civiles qui pointe encore la responsabilité de l’employeur : « qui a refusé à trois reprises les demandes de l’inspection du travail », « une société déjà condamnée pour les mêmes faits ».

« Il laisse une petite fille qui était âgée de 3 ans au moment des faits », ajoute maître Laurence Bourgeon, l’autre conseil de la famille. « Comment expliquer à sa fille que papa est mort, qu’il a eu un accident et qu’il ne reviendra plus. Lui et son épouse voulaient avoir un second enfant, ils n’en auront jamais », conclut la pénaliste dans une silence de cathédrale.

Si l'audience s'est déroulée il y a quelques semaines, la sanction est tombée ce mardi en début d’après-midi et la société « Endel » est reconnue coupable et condamnée à 150 000 euros d’amende.

Boris De la Cruz

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