Publié il y a 12 jours - Mise à jour le 07.05.2024 - Boris De la Cruz - 3 min  - vu 4380 fois

NÎMES Le SOS des policiers

Syndicats et policiers tirent la sonnette d’alarme. L’investigation n’attire plus les policiers, les seigneurs de la police judiciaire (PJ) ne font plus rêver, et tous les services d’enquête croulent sous les dossiers.

Des jeunes qui sont interpellés avec des stupéfiants dans les poches, une bagarre dans la rue, un suicide, ou encore des violences intra-familiales... Le GAJ, le Groupe d’appui judiciaire, est de toutes les affaires délictuelles. Il traite parfois mêmes des affaires criminelles comme des dossiers de viols. Mais ce service, comme tous les services d’enquête à Nîmes, est, selon les syndicats, à l’agonie.

Les services d’investigation sont sous l’eau à Nîmes, comme dans beaucoup de commissariats de France. Si, en termes de communication politique, il faut voir du « bleu » partout dans les rues, les enquêtes piétinent. La cause : les enquêteurs sont au bout du rouleau. Ils sont, selon Bruno Bartocetti du syndicat "Unité" Police, « asphyxiés par la masse de travail ». Il reprend : « Derrière une interpellation il y a une procédure qu’il faut effectuer. » Ce responsable zonal estime également qu’il y a « un désamour du service judiciaire qui ne fait que s’amplifier depuis plusieurs années ».

« À une époque pas si lointaine, les collègues se battaient pour aller dans un service d’enquête, c’était le graal dans une carrière. Aujourd’hui, plus personne ne veut y aller. Il y a une crise des vocations en raison en particulier des horaires de travail et des mauvaises conditions de travail », selon le même syndicat.

C’est tout l’organigramme de l’investigation qui crie à l’aide et la suppression récente de l’antenne PJ à l’échelle départementale gardoise n’est pas le seul grief évoqué.

Tous les étages sont grippés avec une charge de travail qui explose

Le GAJ qui traite la plupart des flagrants délits est incontestablement le service le plus en souffrance. D’autant que Nîmes est devenu depuis l’été dernier un centre névralgique du trafic de drogue vu de Paris. Le pouvoir politique se doit donc de réagir… Sauf que, derrière les interpellations, il y a des procédures. « C’est bien de montrer ses muscles dans la rue, mais il faut que d’autres puissent faire les procédures. Les opérations « Place nette » commandées par le ministère de l’Intérieur, c’est du ressort du politique, mais nous, concrètement sur le terrain, on constate qu’il n’y a pas plus de policiers pour traiter les procédures. Ça c’est une réalité incontestable », confie un policier qui pense lui aussi à quitter l’investigation.

« Lorsque le pouvoir politique décide la venue d’une compagnie de CRS et que l’on n’est pas au courant une heure avant au commissariat de Nîmes ce n’est pas normal, et ça désorganise tout. Ceux qui en pâtissent en premier lieu se sont les enquêteurs qui eux ne bénéficient d’aucun renfort et qui voient arriver une marée à gérer en procédures », indique une autre source policière, elle aussi dépitée des conditions d’exercice.

Et puis au GAJ, les enquêteurs prennent de plus en plus des procédures plus complexes qui avant étaient assurées par d’autres services.

Aucun policier à l'appel dans un groupe de 7

Très concrètement, le dernier week-end d’avril, il n’y avait aucun policier pour gérer les urgences judiciaires au service dit du GAJ alors qu’ils sont habituellement sept dans ce groupe. Entre les repos, les malades et le ras-le-bol prégnant depuis de nombreux mois, les sept policiers de cette équipe du GAJ étaient aux abonnés absents. Résultat : un commissariat en panne. Mais ce constat n’est pas unique. Quelques jours plus tard, le jeudi 2 mai, il y avait deux fonctionnaires présents dans ce même groupe de sept. Les deux groupes du GAJ qui se complètent en journée 7 jours sur 7, tournent à sept pour l’un et huit pour l’autre...

« On réclame deux groupes de dix depuis longtemps mais nous ne sommes pas entendus, et en cascade nos collègues sont sous l’eau », confirme Rémy Alonso, patron d’Alliance Police 30. Le responsable syndical rappelle que tous les individus interpellés sur Nîmes sont d’abord ramenés au GAJ : « Ils sont les premiers remparts même si ensuite les investigations sont confiées à d’autres, mais les conditions de travail dans les autres services ne sont pas meilleures. »

Autre grief : les procédures. « On nous explique qu’il y a une procédure pénale simplifiée alors qu’il y a 120 pages de plus, poursuit le délégué syndical Alliance. Mes collègues n’en peuvent plus, ils en ont ras-le-bol. Attention car il y a de plus en plus de burn-out à l’investigation ».

Des conditions de travail qui risquent de ne pas s’améliorer dans les prochaines semaines à l’approche des Jeux Olympiques qui nécessitent des renforts colossaux des forces de l’ordre dans la région parisienne.

*Le DIPN, le contrôleur général Jean-Philippe Nahon patron des policiers gardois, contacté lundi matin n’a pas répondu à nos sollicitations.

Boris De la Cruz

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