Publié il y a 3 ans - Mise à jour le 08.12.2021 - marie-meunier - 5 min  - vu 620 fois

PONT-DU-GARD Amazon et la pie grièche s'invitent dans les débats du conseil communautaire

Le conseil communautaire de la Communauté de communes du Pont-du-Gard s'est tenu ce lundi 6 décembre à la salle Eugène-Lacroix à Aramon. (Marie Meunier / Objectif Gard)

Quelques tensions étaient palpables lors du conseil communautaire de la Communauté de communes du Pont-du-Gard (CCPG) ce lundi soir. Alors que les élus s'apprêtaient à voter le nouveau projet de territoire, le maire de Fournès, Thierry Boudinaud, a mis le sujet Amazon sur la table.

Pour rappel, le projet de territoire est un document qui résume les orientations que va prendre la CCPG dans les cinq à dix prochaines années. Comme une feuille de route qui va déterminer la politique à venir dans différents domaines : économie, tourisme, cadre de vie, services à la population... Alors une question essentielle brûlait les lèvres de Thierry Boudinaud, le maire de Fournès : "Le projet de territoire aborde la question économique. Sur le territoire, il y avait un projet important à ce sujet. Il est totalement occulté dans ce document."

Vous l'aurez deviné, il parle bien entendu d'Amazon. Il y a un mois, le tribunal administratif de Nîmes a décidé d'annuler l'autorisation environnementale accompagnant le projet de construction du centre de tri d'Argan, porté par le géant du e-commerce. Alors le maire de Fournès revient à la charge : "Le jugement a été rendu, nous disposons d'un permis de construire tout à fait valable, l'autorisation environnementale a été annulée. Je voulais connaître votre position sur votre dossier", adresse-t-il au président.

Bien embêté, Pierre Prat peine à trouver ses mots : "La communauté de communes ne formulera pas de réponse tant que les délais de recours ne sont pas achevés. On ne prendra position qu'à ce moment-là. (...) Et que l'on soit pour ou contre, ça ne va pas faire avancer le schmilblick, c'est le juge qui décide." Le maire de Fournès ne se satisfait pas de cette formule, estimant que l'avis du président est "important" sur ce projet qui ramènerait une manne considérable de fiscalité sur le territoire.

"Si l'annulation de l'autorisation environnementale est confirmée par la cour d'appel, ça poserait une difficulté majeure quel que soit le lieu et le projet"

C'est la présence d'une espèce protégée, la pie grièche, qui a fait annuler l'autorisation environnementale. Alors Louis Donnet, maire de Domazan, se demande si cette pie, potentiellement présente sur tout le secteur, ne va pas condamner le projet d'extension de la zone de Domazan et même l'essor économique en général du territoire. "Nous l'avons en tête... Si l'annulation de l'autorisation environnementale est confirmée par la cour d'appel, ça poserait une difficulté majeure quel que soit le lieu et le projet. Mais je ne suis pas un ornithologue", reconnaît Pierre Prat.

Pas facile de concilier développement économique et la préservation des espèces protégées. Encore faut-il offrir des compensations écologiques acceptables. Les 30 hectares proposés par la mairie de Fournès ne l'étaient pas assez aux yeux des juges. À la grande désolation du maire et la grande inquiétude de certains élus qui ont peur de ne pas pouvoir sortir leurs projets. Notamment Muriel Dherbecourt, maire de Castillon-du-Gard, qui éprouve des difficultés à convaincre les autorités de la pertinence de son projet photovoltaïque : "On crée un projet de territoire, mais nous, on va être bloqués complètement. Une loi nous autorise, une autre loi nous en empêche. Va falloir prendre position."

La neutralité et la placidité de Pierre Prat ont agacé les élus du fond de la salle qui aurait préféré un président "qui monte au créneau" et qui "défend le territoire". Il ne faut pas oublier que ce projet Amazon pourrait générer 600 emplois équivalent temps plein et bien d'autres retombées économiques. Toutefois, l'équipe de la précédente mandature avait adopté une motion de soutien à ce projet de centre de tri, qui n'a pas été retirée... Le projet de territoire a finalement été validé avec neuf abstentions.

"Je ne voudrais pas passer pour le méchant qui s'en prend aux enfants"

S'en est suivi un long défilé de délibérations techniques. Alors que les élus s'apprêtaient à ranger leurs affaires et se diriger vers le buffet, la voix de Muriel Dherbecourt s'élève : "Alors, on est capable de faire une convention pour la gestion d'une déchetterie mais on n'arrive pas à faire de convention pour stopper l'éviction d'un enfant d'une crèche. Ça nous semble tellement honteux ce qui se passe..."

Le tacle fait référence à la commune d'Argilliers qui quitte au 1er janvier la CCPG pour la Communauté de communes Pays d'Uzès. La CCPG n'acceptant que des enfants habitant le territoire dans ses crèches, des parents d'Argilliers sont contraints de trouver une nouvelle structure pour leur enfant de 18 mois. Ils vivent la situation comme une "prise d'otage" politique.

"Je ne voudrais pas passer pour le méchant qui s'en prend aux enfants", s'offense Pierre Prat, qui ajoute : "Le règlement de la crèche est ainsi et il doit être appliqué. Cela fait 10 ans qu'Argilliers veut sortir de la CCPG, ils avaient deux choses à s'occuper pour faire une sortie correcte : avertir les habitants des conséquences et cette histoire de panneau d'affichage. Dix ans pour régler deux affaires et ça n'a pas été fait. Ne me faites pas de procès à moi concernant cet enfant." Les oreilles du maire d'Argilliers, Laurent Boucarut, (absent au conseil) ont dû siffler... Le président a aussi rappelé que d'autres enfants étaient sur liste d'attente pour obtenir une place en crèche et que cette décision difficile résultait aussi d'un principe d'équité.

"N'était-il pas possible de passer une convention juste pour que cet enfant termine son année dans cette crèche ?", insiste Muriel Dherbecourt. Face au débat, Pierre Prat assure qu'un "groupe de parole sera mis en place pour les cas à venir, mais que la décision est prise."

Marie Meunier

Et aussi...

C'est en train. Philippe Marchesi a aussi présenté aux élus les deux projets de pôles d'échange multimodal (PEM) d'Aramon et de Remoulins. Les deux communes se trouvent sur le tracé de la ligne ferroviaire TER rive droite du Rhône. Cette dernière doit rouvrir aux voyageurs à l'été 2022 qui pourront monter et descendre à Pont-Saint-Esprit, Bagnols/Cèze, Avignon et Nîmes. Pour la desserte des gares d'Aramon et Remoulins, il faudra attendre l'horizon 2026 (même si une desserte ponctuelle est déjà permise par la Région à Remoulins, ndlr). Les deux gares feront partie des PEM qui facilitent les échanges entre les différents modes de déplacement (bus, train, vélos, voitures, co-voiturage, taxi...). La communauté de communes sera maître d'ouvrage pour les travaux d'aménagement.

Eau. Avant de débuter le conseil communautaire, Lionel Georges, directeur de l'EPTB Gardons, est venu parler aux élus de l'évolution de la taxe Gémapi. Elle sera en hausse sur le territoire, passant de 10-11 € à 18 € de cotisation par habitant. La CCPG est la communauté de communes qui subira la plus importante hausse, mais les principaux chantiers mené par l'EPTB Gardons ont été menés sur son territoire. Mais pourquoi les tarifs augmentent-ils ? C'est parce que le syndicat a perdu presque 50 % de son autofinancement en 2020. Forcément, il faut raquer. Mais quitte à alléger le porte-monnaie, autant ajouter quelques pièces au pot commun pour avoir un service meilleur et pas seulement équivalent. L'EPTB Gardons veut mettre un coup de collier sur la communication auprès des élus, car pour encore beaucoup de personnes, ses missions restent très obscures...

Marie Meunier

A la une

Voir Plus

En direct

Voir Plus

Studio