NÎMES Isabelle, 16 ans, guerrière de l'échiquier
Parce qu'elle est sans doute trop modeste pour le souligner, Isabelle Malassagne, 16 ans, fait partie des 4 meilleures joueuses d'échec de France (cat. moins de 20 ans). En août prochain, elle sera à l'affiche des championnats de France d'échec à Nîmes.
Timide, réservée, cette jolie petite blondinette ne paye pas de mine au premier abord. Mais ne vous y trompez pas, avec un échiquier entre les mains, il y a de fortes chances pour qu'elle vous laisse sur le carreau. Un niveau d'excellence qui n'est pas dû au hasard. Dès 9 ans, elle fait ses armes à l'école où on lui apprend les rudiments des échecs. Le soir, à la maison, elle affronte son père, joueur amateur. "Au final, j'ai commencé tard. Les joueurs qui atteignent le très haut niveau ont commencé à 4 ou 5 ans." Ce qui ne l'empêche pas d'impressionner son père, qui la pousse à s'inscrire dans un club, l’Échiquier Nîmois. En à peine six mois de pratique, elle devient championne du Gard poussine, puis championne régionale en 2008. Son titre ultime sera championne de France des moins de 14 ans obtenu en 2012. Une victoire qui lui fera intégrer l'équipe de France et l’emmènera à Pragues pour le championnat d'Europe et à Maribor en Slovénie pour les championnats du monde en 2012. Une expérience qu'elle renouvellera l'année d'après puisque, à nouveau qualifiée en équipe de France, elle s'envole pour le Montenegro en 2013 à Butva pour les championnats d'Europe et aux Emirats-Arabes-Unis pour les championnats du monde. Un parcours détonnant dont elle garde un souvenir impérissable, et restera marquée par un match, "J'ai perdu à un petit détail près contre Khomeriki Nino, la joueuse Slovène qui a fini 2ème mondiale... au championnat du monde de Slovénie."
Isabelle passe par trois clubs différents tout au long de son parcours, l’Échiquier Nîmois, l’Échiquier Orangeois, puis au Marseille Echec. Aujourd'hui à la recherche d'un nouveau club, elle se dit prête à étudier toutes propositions, "si je sens que je peux évoluer et progresser, pourquoi pas".
Les femmes moins fortes que les hommes ?
Isabelle n'est pas la seule dans la famille Malassagne à taquiner le coup du roque. Ses deux frères sont dans la partie également, et Isabelle l'avoue : "Le plus grand a 19 ans, et il est meilleur que moi". Il y aurait en effet des prédispositions masculines aux performances de l'échiquier. Seulement 1 % des titres de Grand Maître ont été obtenus par des femmes. De nombreuses enquêtes, dont une publiée dans The Independent, ont confirmé ce constat, mais pour des raisons purement liées à la perception de la joueuse, ce sentiment qu'elle ne pourra pas gagner face à un homme. Une nouvelle enquête italienne - pourtant pas les derniers sur les questions machistes - ajouterait que les femmes seraient bien plus performantes aux échecs lorsqu'elles jouent entre elles. Elles perdraient effectivement 50 % de leurs capacités face à un homme. "Les plus grandes championnes le disent aussi, et cela fait débat à la Fédération", ajoute le papa d'Isabelle. La meilleure joueuse britannique Susan Lalic aurait déclaré, "les femmes sont simplement moins obsédées par certaines choses que les hommes". La puissance ? La domination ? A vous lecteur, de vous faire votre propre avis, aucune précision ne sera donnée par la joueuse...
Et exit les clichés du joueur d'échec matheux : "Il n'y a pas de profil particulier mais plutôt des personnalités très différentes, certaines plus littéraires. Il y'a des joueurs très extravagants aussi. Et c'est un milieu bien plus festif qu'on ne le pense" ajoute le papa d'Isabelle. Un milieu festif, soit, mais qui nécessite un niveau de concentration extrême, une fois que les pions sont placés. Le résultat donne des lectures de parties totalement abstraites pour le premier des néophytes, dont une certaine poésie s'en échappe. "Quand ma fille me parle de placements harmonieux, c'est là que je comprends qu'on est plus de la même planète", plaisante son père. Arrivés à un certain niveau, les joueurs peuvent anticiper jusqu'à 40 coups de l'adversaire. Isabelle peut en anticiper une vingtaine, en s’entraînant 2h à 3h par semaine. "En ce moment, c'est plutôt 2h par jour", précise Isabelle.
Une échéance qui arrive à grand pas, celle des championnats de France d’échecs qui se joueront à Nîmes à partir du 17 août prochain. Et même si elle ne l'avouera qu'à demi-mot, Isabelle espère montrer ce dont elle est capable dans sa ville natale. Peut-être un jour parviendra t-elle à prouver que, non, les hommes ne sont pas meilleurs aux échecs que les femmes.
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