Publié il y a 6 ans - Mise à jour le 18.07.2017 - philippe-gavillet-de-peney - 3 min  - vu 737 fois

HOMME DE LETTRES GARDOIS Épris de liberté, Marc Bernard n'aimait pas le travail...

L'écrivain nîmois Marc Bernard a obtenu le prix Goncourt 1942 et le prix Interallié 1934 (Photo : DR)

Tout l’été, Objectif Gard propose de vous attarder sur les destins de quelques éminents hommes de lettres gardois. Marqué par son enfance nîmoise, le talentueux dilettante Marc Bernard a connu une vie de liberté mouvementée ponctuée de belles rencontres... 

Né à Nîmes le 6 septembre 1900, rue Bonfa, dans le quartier populaire de la Croix-de-Fer, l'écrivain Léonard Marc Bernard, alias Marc Bernard de son nom de plume, aura toujours entretenu une relation forte avec la cité des Antonin, omniprésente dans ses souvenirs et dans son oeuvre. Au point que sa ville natale figurera dans la plupart de ses romans. "Il m’est impossible d’écrire un livre où Nîmes ne figure pas", confessait-il.

Né dans une famille pauvre, d'un père espagnol originaire des Baléares, parti comme chercheur d’or au Texas où il a été assassiné, et de Maria Louise Joyeuse, une lavandière, le jeune Nîmois se retrouve orphelin à 12 ans. Il est recueilli par une cousine, Alice, et son mari, Eugène. Commissionnaire pour gagner sa croûte, il devient ensuite ouvrier. Au sortir de son service militaire de deux ans accompli en haute-Silésie (Prusse), ce passionné de corrida embrasse la carrière de cheminot et adhère dans la foulée au Parti Communiste et au syndicat CGTU (Confédération générale du travail unitaire). Marc Bernard quittera Nîmes pour la première fois à l'âge de de 18 ans et rejoint Marseille, où il suivra pendant un an le cours d’art dramatique du Conservatoire, puis Lyon.

Mais plus tard, c'est à Paris qu'il rencontre l'écrivain, critique et éditeur nîmois Jean Paulhan. Et, en 1929, il publie grâce à lui "Zig Zag", un roman d'inspiration surréaliste. Paulhan présente Marc Bernard à André Gide qui se prendra d'affection pour lui et le protégera. Défenseur acharné de la littérature prolétarienne engagée, le Nîmois collabore au journal pro-communiste Monde (à ne pas confondre avec Le Monde !) en tant que critique. En 1938, au musée du Louvre, il rencontre Else Reichmann, docteur es lettres qui avait connu Sigmund Freud, une jeune femme juive autrichienne fuyant l'Anschluss. Marc Bernard est mobilisé en septembre 1939 à Marseille, comme infirmier. Auparavant, il a quitté Paris, où il vit principalement depuis 1923, pour passer quelques jours à Nîmes avec sa fille, Annie, et sa fiancée. C'est encore à Nîmes qu'en 1940 le romancier et sa bien-aimée convoleront en justes noces.

Homme libre et talentueux dilettante, Marc Bernard abhorrait le travail (Photo : DR)

Avéré, son talent est couronné en 1934 par le prix Interallié pour "Anny" puis par le Goncourt en 1942 pour "Pareils à des enfants". Ayant le travail et les contraintes en horreur, Marc Bernard s'était lancé avec enthousiasme dans une carrière littéraire qui lui laissait du temps libre. Et comme en parallèle il ne courait ni après les honneurs ni après l'argent, il avait refusé plusieurs collaborations à la radio et au Figaro, pourtant bien payées, pour vivre sa vie à son gré. "J’abandonne gloire, puissance et fortune à qui les veut. Je leur préfère la liberté, c’est-à-dire les vacances", écrit-il.

Connaissant quelques revers de fortune, en Espagne, au Maroc ou en Grèce, avec Else ils se tournent vers une vie de patachon durant laquelle ils auront parfois du mal à faire bouillir la marmite. "Quand on a envie de voyager, le mieux est de partir, sans trop se soucier de l’argent, ni de l’heure. Je mangeais dans une gargote de la rue de la Grande Chaumière quand je décidai, au milieu de mon miroton, d’aller en Espagne. Le temps d’aller à la gare et je prenais le train qui m’attendait pour se mettre à rouler. Il y a toujours un train sous pression si votre envie est irrésistible", raconte-t-il.

Au soir de sa vie, après la disparition d’Else morte d'un cancer en 1969 et à qui il consacrera une trilogie, Marc Bernard reviendra à Majorque, la ville de son père, et s’y construira une maison après avoir cette fois accepté de travailler 6 mois en donnant des cours dans une université américaine ! Revenu plus tard à Nîmes où son ami le Docteur Paradis (ça ne s'invente pas !) lui offre le gite, et involontairement promis à des vacances éternelles, Marc Bernard décédera le 15 novembre 1983. Il laisse l'empreinte d'un amoureux de Nîmes et de la liberté ainsi qu'une oeuvre forte d'une quinzaine de récits et de pièces de théâtre (Les voix, 1945, Le carafon, 1961), principalement édités chez Gallimard.

Philippe GAVILLET de PENEY

philippe@objectifgard.com

Sources : Roger Grenier, "Les vacances de Marc Bernard", Littératures, Stéphane Bonnefoi, "Marc Bernard, romancier du réel en terre imaginaire", Wikipédia.

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