ALÈS Mieux vivre ensemble : les « invisibles » se dévoilent
Dans le cadre de sa soirée sur le thème de l’exclusion organisée ce jeudi soir, le réseau Mieux vivre ensemble a donné la parole à des femmes et des hommes aux parcours de vie difficiles.
« La rue, c’est chez moi. » Jean-Charles, 39 ans, n’a plus de toit depuis l’âge de 15 ans. Une atmosphère familiale pesante l’a poussé, deux jours avant son anniversaire, à quitter le domicile où il se sentait « comme en prison. » Pendant cinq ans, l’adolescent a travaillé. « Et puis j’ai posé mon chapeau pour faire la manche », se souvient-il. Avec les années, ce mode de vie est devenu un choix pleinement assumé. « Quand on vit dehors, on a le strict minimum à manger et à boire, et une couverture. Il faut juste ne pas être gourmand, explique-t-il. Vous savez, il y a des gens qui sont enfermés chez eux et qui ne sont pas plus heureux que moi ! » Mais surtout, Jean-Charles tient à répéter que « tous les gens de la rue ne sont pas mauvais. Quand je vois à quel point les êtres humains détruisent la planète, détruisent tout, je peux vous dire que ce n’est pas nous qui foutons le plus le bordel. »
Aux côtés de Jean-Charles, un jeune homme livre, à son tour, un bout de sa vie. Depuis un peu plus d’un mois, il est hébergé grâce à l’association pour le logement et l’entraide des salariés (Ales) après avoir passé onze moi sans abri : « J’ai perdu ma maman quand j’avais 15 ans et demi. De là, je suis parti en foyer et puis j’ai fini par me retrouver dehors. J’ai essayé de me débrouiller par moi-même, mais il n’y avait plus de place dans les hébergements d’urgence… Alors je dormais dans la rue. »
Sonia, jeune algérienne arrivée en France à 16 ans, a rencontré d’autres types de difficultés. « Je suis venue ici pour connaître mon père. Je l’ai cherché de partout mais je ne l’ai pas trouvé. » Ce qu’elle a réussi à trouver, en revanche, c’est le courage de continuer sa scolarité malgré des débuts difficiles : « Je n’avais pas droit aux bourses mais ça ne m’a pas empêché de continuer mes études. De plus, il y avait des personnes qui souhaitaient que j’échoue, et ça m’a donné encore plus envie de réussir. » Elle suit aujourd’hui un BTS économie sociale et familiale. Comme Sonia, Alain, 39 ans, n’a pas connu la rue mais a été marqué par d’autres bouleversements. « J’étais commando parachutiste. Mais un jour, j’ai été blessé. On m’a dit de rentrer chez moi. L’État et l’Armée n’ont pas voulu reconnaître leur faute. Alors, si j’ai un conseil à vous donner, ne vous posez pas la question de ce que votre pays peut faire pour vous, mais plutôt de ce que vous pouvez faire pour lui. » Jeudi soir, à l’espace Cazot, le réseau Mieux vivre ensemble a relevé son challenge : les « invisibles » sont entrés dans la lumière.
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