Publié il y a 3 ans - Mise à jour le 19.05.2020 - marie-meunier - 5 min  - vu 534 fois

LE 7H50 du député Anthony Cellier : "Le déconfinement n'est pas synonyme de relâchement"

Le député de la troisième circonscription du Gard Anthony Cellier (Photo : Thierry Allard / Objectif Gard)

Pour Anthony Cellier, député LREM de la 3e circonscription du Gard, les journées durant le confinement ont été bien remplies. Nommé référent du groupe de travail dédié à l'énergie, il a travaillé sur de nombreux dossiers portant sur le système énergétique français pendant et après ces deux mois au ralenti. À une semaine de déconfinement, il appelle aussi les habitants à la prudence même si la vie doit reprendre.

Objectif Gard: Quel est votre point de vue sur le plan de déconfinement du Gouvernement ?

Anthony Cellier : Le plan de déconfinement présidentiel fait écho à plusieurs semaines de confinement. Ça va sans dire, mais c'est mieux en le disant. Il y a deux impératifs qui sont pris en compte : l'aspect sanitaire et l'aspect social et économique. C'est ce que le Premier ministre appelle la ligne de crête. Il a trouvé une image qui va bien à la situation complexe de cette stratégie de déconfinement. Quand on parle de ligne de crête, ça veut dire que l'équilibre est fragile. [...] Cette économie de déconfinement présente des conditions sanitaires. Les collectivités ont envie que les plages, les bars, les restaurants rouvrent. Nous on est dans cette logique : oui mais soyons prudents. On est dans une progressivité adaptée cette situation exceptionnelle. On a arrêté l'économie, on a arrêté d'avoir une vie normale depuis le 15 mars. C'est colossal ce qu'on a demandé aux Français. Il faut maintenant sortir de cet état là et apprendre à vivre avec.

Au niveau local, vous avez réussi à l'adapter ?

Ce plan de déconfinement, on l'a adapté localement avec des mesures prises par le préfet en concertation avec les maires et les présidents d'Agglomération. Cela s'appelle le Collec (comité local de levée du confinement). On se réunit toutes les semaines avec le préfet, le président d'Agglo et les maires des grandes communes de la circonscription.

Une semaine après le déconfinement, que voulez-vous dire aux Gardois ? De ne pas baisser la garde ?

C'est assez compliqué, il y a un côté ambivalent. Il faut vivre avec le virus mais rester vigilant. Tout le monde veut reconquérir les libertés qu'on nous a enlevées. Mais il faut que tout le monde comprenne : le déconfinement dépend du comportement de tout un chacun. Le déconfinement n'est pas synonyme de relâchement mais de vigilance. On retrouve une petite vie sociale qu'il faut maîtriser avec beaucoup de prudence. Se prémunir, c'est aussi prémunir la vie des autres. Il n'y aurait rien de plus terrible que de savoir que vous avez été vecteur du virus qui a causé des situations catastrophiques autour de vous.

Est-ce que le classement du Gard en vert est un atout pour le redémarrage de l'activité économique ?

C'est tout aussi fragile. Ces indicateurs sont revus toutes les semaines et sont supportés par trois critères : taux de nouveaux cas, capacité en lits et propension du virus à se diffuser. Être en vert, ce n'est pas synonyme que tout va bien. Il y a encore des morts dans le département, il y a encore des personnes contaminées. On est en vert mais cela peut rapidement changer. J'enfonce des portes ouvertes mais ce virus n'a pas de pied, pas de bras, ne marche pas. Il faut un être humain pour le transporter mais le meilleur rempart, c'est aussi l'être humain.

Le déconfinement permet aux entreprises de reprendre une activité presque normale. Même si sur le plan sanitaire, c'est une autre manière de travailler. Une équipe de quatre personnes peut perdre jusqu'à 25-30% de rendement. Les masques sur le plan de l'oxygène, ce n'est pas possible de travailler tout le temps avec. Ce plan de déconfinement va aussi faire appel à la capacité des entreprises à s'adapter, à créer de nouvelles choses. Une soixantaine de fiches métiers expliquent quelles sont les mesures à appliquer en fonction de chaque activité.

Sur le territoire, beaucoup d'entreprises exportent, Orano Melox par exemple, comment ces échanges reprennent-ils avec le déconfinement ?

Si on prend le cas typique de Melox, qui fabrique du mox (du combustible pour centrale nucléaire, ndlr), les chaînes de production se sont adaptées avec un plan de continuité d'activité. Il n'y a pas de problème de rupture. C'est heureux car une partie de la stratégie énergétique dépend du mox. En revanche, l'activité économique nucléaire gardoise, elle, a subi le confinement et cet arrêt économique. Par exemple, au CEA le plan de continuité d'activité est très réduit. Beaucoup d'entreprises de sous-traitance ont du se mettre à l'arrêt aussi et ça crée un retard sur les chantiers du CEA. Il va falloir rattraper ce retard, décaler les chantiers qui devaient débuter. La conséquence pour les entreprises ne s'étend pas à deux mois, cela va se prolonger dans un temps avec un effet domino, avec des problématiques multiples.

Quelles actions vont-elles être mises en place pour favoriser l'économie locale et sa relance ?

Par exemple, j'ai eu une réunion avec Grisbi (groupement d’entreprises qui exercent leur activité dans le domaine des services, du bâtiment et de l’industrie implanté à Bagnols, NDLR) qui a validé sa campagne de communication avec l'Agglo et la ville de Bagnols pour capitaliser sur ce covid. Pendant cette période de confinement, les entreprises et le commerce ont fait preuve d'inventivité : drive, livraisons à domicile... Le confinement a permis de mettre en exergue ce savoir-faire local. Pour le déconfinement, on va essayer de capitaliser là-dessus pour que les gens continuent à acheter local.

L'activité de l'Assemblée s'est poursuivie pendant le confinement. Sur quels dossiers avez-vous travaillé ?

Une mission m'a été confiée par la commission des affaires économiques sur le système énergétique français. Cela repose sur un triptyque : comment le système énergétique français s'est adapté à l'arrêt brutal dû au confinement. On a eu -20% d'électricité au niveau national. Ensuite, il faut que le système énergétique français s’insère dans la notion de reprise. Les visites décennales dans les centrales nucléaires sont codifiées par un calendrier précis. Le covid est venu tout bousculer avec des conséquences au-delà de deux mois. On peut potentiellement se retrouver en déficit de production d'énergie si des opérations prévues à l'hiver 2020-2021 se retrouvent en période estivale où on consomme moins d'énergie. Mais EDF fait en sorte que ça n'arrive pas.

Le dernier pilier du triptyque c'est celui de la relance économique corrélée aux ambitions écologiques et climatiques. On travaille sur la mobilité électrique et donc la hausse du parc automobile électrique français. Cela passe aussi par le travail sur le système de distribution électrique (bornes), c'est quelque chose qu'on expérimente dans le Gard rhodanien avec la CleanTech vallée. Cela s'appelle le vehicle-to-grid. Un réseau intelligent : c'est ni plus ni moins l'avenir de la mobilité électrique. Si elle s'étendait au niveau de tout le pays, cela deviendrait un formidable espace de stockage d'énergie et les véhicules deviendraient des unités de stockage.

J'ai travaillé aussi sur la rénovation énergétique car les bâtiments aujourd'hui sont énergivores. On s'est aperçu pendant le confinement où les gens restaient chez eux que le volume de leur consommation électrique n'avait pas changé. Les valeurs sont les mêmes que s'ils sont chez eux ou pas chez eux. Il y a donc une somme d'énergie intéressante à aller chercher. C'est bon pour la planète et pour le porte-monnaie.

Vous avez aussi fait plusieurs auditions ?

On fait des auditions avec les référents de la commission. J'ai eu le directeur général d'EDF en visioconférence, le président d'Enedis et l'ensemble des grands énergéticiens français en l'espace de deux-trois semaines. Dans le cadre de mes missions de parlementaire, j'ai aussi eu des auditions avec les ministres et le Premier ministre. On a des rendez-vous réguliers par rapport au covid. En tant que parlementaire, on a une mission de contrôle des actions du Gouvernement.

Propos recueillis par Marie Meunier

Marie Meunier

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